Après 40 ans de règne, le fou de Tripoli perd sa couronne. Plus de quatre décennies de pouvoir sans partage, de prétention hégémonique, Mouammar El Gueddafi est pris comme un rat, lui qui traitait son peuple de rats. Son parcours depuis l'âge de 27 ans – âge où il a pris le pouvoir – a été celui d'un tyran. Que retenir de ce personnage à l'allure burlesque ? Le souvenir d'un dictateur qui aura trahi une révolution pour se maintenir à la tête d'un pays. Le jeune capitaine, qui a renversé le 1er septembre 1969 la monarchie d'Idriss Snoussi, s'est cru élevé au rang des grands révolutionnaires et c'est sur cette base qu'il a construit son règne au lieu de fonder un Etat. Il se farde du grade de colonel et du titre de guide pour assujettir le peuple libyen. Il choisit pour son pays la voie d'un socialisme arabe d'Etat, et la suivra de nationalisation des entreprises étrangères. Se targuant d'être un «révolutionnaire» et en parfait mégalomane, comme le sont tous les dictateurs, El Gueddafi lance «la révolution du peuple», une idée qu'il développa en 1977 dans son fameux Livre vert et sur la base duquel il rebaptisa la République arabe libyenne en Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste. C'est pourtant ce «révolutionnaire», disant combattre les visées hégémoniques de l'Occident, qui n'a pas hésité à annexer une partie du Tchad en 1973. Il se voyait même devenir le roi des rois d'Afrique. A partir des années 1980, les Occidentaux, à leur tête les Etats-Unis, l'accusent de soutenir des mouvements armés, notamment l'IRA, l'ETA et les Brigades rouges. En 1986, suite à l'interception d'un message de l'ambassade libyenne à Berlin-Est éveillant les soupçons sur une implication libyenne dans un attentat contre une discothèque à Berlin-Ouest faisant trois morts, dont deux militaires américains, un raid de bombardement américain cible Tripoli et Benghazi. Deux années plus tard, un avion de la PanAM explose à Lockerbie en Angleterre. La Libye est soumise à des sanctions, dont un embargo pétrolier. Sur le plan interne, El Gueddafi applique une véritable politique répressive et ne permet aucune forme d'expression libre. Aucune forme de vie politique n'est tolérée. Les fameux comités populaires censés prendre en charge les préoccupations et les attentes des citoyens ne sont que des coquilles vides. La décision est centralisée et rien n'échappe au contrôle du clan El Gueddafi. La Libye est un grand conglomérat de tribus qu'El Gueddafi a contrôlé durant plus de 40 années de pouvoir. Ce dernier maintient les structures tribales pour éviter toute prétention à une vie politique moderne susceptible de mettre en péril son royaume. Il maintient les équilibres internes en distribuant à profusion la manne pétrolière. Depuis 1999, il tente un rapprochement avec les puissances mondiales en livrant à la justice britannique les Libyens auteurs de l'attentat de Lockerbie. El Gueddafi a entrepris une stratégie d'ouverture économique et attiré les investissements étrangers qui le lui rendaient bien jusqu'à l'avènement des soulèvements des peuples en 2011.