Du chant Gnawi pimenté de blues et de châabi, du berbéro-celte au rock en passant par le folk, Cheikh Sidi Bémol, de son vrai nom Hocine Boukella se distingue par son talent à mêler les genres musicaux. En concert, dimanche dernier au stade Oukil Ramdane de Tizi Ouzou, Cheikh Sidi Bémol a de nouveau prouvé son talent. Les fans, bien que peu nombreux en cette soirée de dimanche, ont savouré un style original qui fait la singularité du compositeur et parolier. Un style qu'il définit lui-même par «berbère, celtique, groove», soit un assemblage de genres musicaux qui entrainent ceux qui l'écoutent dans un long voyage à travers les temps et les lieux. D'une voie âpre et avec une formation acoustique réduite à 3 musiciens, Boukella a amorcé son spectacle par une série de chansons puisées de l'avant-dernieralbum, Izlan Ivahriyen ou chants des marins Kabyles. De cet opus, il présente au public les titres Amezwaru (le premier), Taqsit Uverri (lhistoire d'Ouverri), A mmi (Fiston), Awited un coup (Buvons un coup), Lhvas n Tizi (Les geôles de Tizi), Lmuziga (l'Harmonica). Chantées intégralement en Tamazight, ces chansons inspirées de chants de marins bretons, évoquent la vie des marins et sa région d'origine, la Kabylie maritime. Ce retour aux sources se retrouve également dans son dernier album Paris-Alger-Bouzeguène dont il interprète plusieurs titres phares que les fans ont fredonné en chœur : Ussan, un hommage à son père ; Telha, ode à la femme kabyle, Boudjeghlellou sur laquelle le public se déhanche… Dans ce dernier album, l'artiste a excellé dans la recherche musicale. Il disait que pour lui, «c'est un album complètement différent des autres, il y a beaucoup d'orchestration et plusieurs instrumentaux et plus de textes en kabyle. J'ai voulu faire plus un travail de musicien que de chansonnier. Et puis, j'ai voulu qu'il soit plus festif que les autres, moins blues, moins grave.» Très à l'aise, tout à fait décontracté chez lui, le fils de Bouzeguène offre aux mélomanes un come-back des singles de 2003 et 2007 qui ont fait aussi la renommé de l'artiste, notamment El Bandi et Bab El Mina (la porte du port), tiré de l'album Gourbi Rock. Avec la reprise de la chanson de Slimane Azem, Cheikh Sidi Bémol rend un hommage au monument de la chanson kabyle en interprétant Ad ezzi ssâa. Une reprise imprégnée d'un style moderne permettant à la nouvelle génération de découvrir notre patrimoine à travers la personne de Dda Sliman. La première partie du concert a été assurée par deux artistes en ascension, Nassim Djezma et le talentueux compositeur parolier Samir Fares. Qui n'a jamais admiré Hallou El Bibane (Ouvrez les portes), Li Sar Issir (Advienne que pourra) et Win Nelka kifek ; des titres enveloppés d'un habit musical folk et country. La fête a été un succès. Le seul véritable … bémol a été l'organisation et le coût des billets qui ont empêché de nombreux fans d'assister au spectacle : «600 DA pour l'entrée c'est trop cher. De plus, le gala est organisé dans un stade, donc pour la question de la rentabilité, l'espace ce n'est pas ce qui manque. Ajoutez à cela, le mauvais choix des points de vente des tickets, puisque l'organisateur, une boite privée, a choisi des espaces peu fréquentés du grand public», regrette un groupe de jeunes qui souhaitaient voir leur idole pour la première fois sur scène. Mais la prestation est loin d'être une défaite, car le maestro a de la générosité à revendre par son charisme et sa présence sur scène : «Que ce soit pour 10 personnes ou pour 5000, quand il chante pour son public c'est avec la même énergie qu'il donne de l'amour qu'il en prend en retour», commente une fan.