Personnage belliqueux, alambiqué et contradictoire, Ariel Sharon, presque 78 ans, dirige le gouvernement israélien depuis février 2001. Sa vie se confond avec les épisodes les plus tourmentés, les plus dramatiques de l'histoire du Proche-Orient. Connu pour sa tentation guerrière et sa brutalité, Sharon aime le bruit des bottes et le fracas des armes, la terreur des obus et les descentes punitives parfois jusqu'au cynisme. Sharon, de son vrai nom Ariel Scheinermann, est né le 27 février 1928 à Kfar Malal, une bourgade ceinturée par plusieurs villages arabes non loin de Tel-Aviv. A l'âge de 14 ans, soit en 1942, il rejoint la Haganah, la fameuse organisation militaire clandestine juive. Six ans plus tard, il commande une compagnie d'infanterie lors de la bataille de Latroun pour desserrer Jérusalem, encerclée par les armées arabes. Durant les combats, il a été sérieusement touché. Laissé pour mort, le jeune commandant s'en est sorti par miracle. Ce revers au champ de bataille ne fera qu'attiser sa soif de vengeance. Depuis son premier coup de fusil, jusqu'à son hospitalisation, Sharon a laissé des traces de sang et des odeurs de charogne partout où l'on a signalé son passage. De l'expression « à la guerre comme à la guerre », il en a fait sa principale devise. Après une courte convalescence, Sharon remet, en 1951, son treillis et ses épaulettes. Aussi a-t-il rajouté des traits sinistres à sa carrière militaire, déjà émaillée et tachée de sang de haut en bas. C'était également l'époque où il a dirigé le « commando 101 », unité d'élite chargée de mener des raids de représailles en territoire palestinien. Deux ans plus tard, ses sbires massacrent des dizaines de personnes, en majorité des femmes et des enfants, à Kibya, un village de Jordanie. Cette horrible action coûtera à Israël sa première condamnation au Conseil de sécurité des Nations unies. Comme un anthropophage qui a goûté ses premières gouttes du sang, Sharon récidive au début des années 1970 en menant la vie dure aux habitants des territoires conquis en 1967. En juin 1972, Sharon quitte l'armée pour se lancer dans la politique. Rapidement, il réussit à s'imposer sur l'échiquier politique en créant le Likoud, un parti qu'il a quitté récemment pour fonder un nouveau parti centriste, Kadima. Depuis les années 1980, il a siégé dans plusieurs gouvernements et occupé des fonctions diverses. En 1982, Sharon a encore fait parler de lui quand ses troupes envahissent deux camps de la banlieue de Beyrouth, Sabra et Chatila, où se sont entassés les réfugiés palestiniens. Bilan : plus de 800 civils massacrés. Pour Sharon, qui s'en est lavé les mains, cette tragédie ne fut qu'un règlement de comptes entre Arabes chrétiens et Arabes musulmans. Mais les faits sont là, têtus. En sa qualité de ministre de la Défense, il est considéré comme le principal architecte de la guerre au Liban. D'ailleurs, une commission d'enquête israélienne a démontré, preuves à l'appui, la responsabilité d'Ariel Sharon dans ces massacres. Cependant, la pression a contraint le bulldozer à démissionner du ministère de la Défense une année plus tard. De 1990 à 1992, il est ministre de la Construction et de l'Aménagement. En 1998, Sharon est nommé ministre des Affaires étrangères et dirige les négociations avec l'Autorité palestinienne. Après l'élection au poste de Premier ministre d'Ehud Barak en mai 1999, Ariel Sharon devient leader du Likoud suite à la démission de Benjamin Netanyahou. A l'issue d'une longue et néanmoins tumultueuse carrière politique et militaire, il devient Premier ministre en 2001. Son élection a coïncidé avec le déclenchement de la seconde Intifada. Il est réélu en mars 2003, suite à des élections anticipées. Aussitôt réélu, il suspend le processus de négociation avec Yasser Arafat, qu'il considère responsable des attentats suicides. Il entame également la construction d'une barrière de séparation à l'intérieur de la Cisjordanie. Après le décès de Yasser Arafat, il accepte de lancer des pourparlers de paix avec le nouveau leader de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas. En août 2005, et à la surprise générale, il met alors en œuvre le retrait israélien de la bande de Gaza, une opération qui prendra fin le 11 septembre 2005.