Le revirement à gauche des dirigeants algériens dans leurs choix économiques n'est pas du goût des Américains. Une note publiée sur le site wikileaks.org le laisse entendre. Rédigé en avril 2009 par l'ancien ambassadeur, David D. Pearce, sous le titre «Les libéraux économiques de l'Algérie virent à gauche», le câble critique notamment les changements abrupts apportés aux réglementations régissant les hydrocarbures et les investissements étrangers. Le diplomate américain estime que ces rectifications sont la conséquence de l'effondrement du groupe Khalifa, qui a complètement chamboulé les pouvoirs publics algériens, mettant fin ainsi à la parenthèse de la libéralisation du marché amorcée durant le premier mandat du président de la République, Abdelaziz Bouteflika. Cet épisode a poussé le gouvernement à adopter une politique économique foncièrement nationaliste, est-il indiqué. Chakib Khelil et Abdelhamid Temmar qui étaient respectivement ministre de l'Energie et des Mines et ministre de l'Industrie et de la Promotion des investissements à l'époque, en ont eu pour leur grade. Présenté comme étant l'artisan de la très libérale loi sur les hydrocarbures de 2005, Chakib Khelil a été applaudi sur le plan international. Le diplomate américain relève toutefois que cet encensement n'a été que de courte durée. LES AMIS DE BOUTEFLIKA Des amendements ont été apportés à cette loi en 2006 et Khelil qui la défendait avec acharnement «n'a pas tardé à revoir son discours», en claironnant que «les compagnies étrangères faisaient des gains injustes dans le marché algérien», fera remarquer l'auteur de la note confidentielle. L'ancien ambassadeur n'a pas manqué de souligner que Khelil ne doit son maintien à son poste que pour avoir été «un proche de Bouteflika». «Il est rapidement entré dans les rangs des penseurs nationalistes algériens», assène David Pearce. Pour lui, ces mesures ont sonné le glas de l'attractivité du marché algérien de l'énergie. L'ancien ambassadeur avait, par ailleurs, prédit la déchéance de l'ancien ministre de l'Industrie et de la Promotion des investissements, Abdelhamid Temmar, «ami d'enfance de Bouteflika», qui, visiblement, était écarté des prises de décision bien avant qu'on ne lui retire ce portefeuille à la faveur d'un remaniement ministériel. L'actuel ministre de la Prospective et des Statistiques avait «brouillé les cartes» en affirmant aux hommes d'affaires américains que les nouvelles mesures restrictives sur l'investissement étranger ne s'appliquaient qu'aux grands projets dans des secteurs stratégiques bien précis, alors que les instructions du Premier ministre, Ahmed Ouyahia, concernaient tous les projets sans exception, observe l'ancien ambassadeur en poste en Algérie. Dans un autre câble, le même auteur s'étonne que les chefs d'entreprise, issus du secteur privé, soient en faveur des actions allant dans le sens de la limitation des investissements étrangers. Il cite, notamment, le Forum des chefs d'entreprises (FCE) qui, selon lui, compterait parmi ses membres des généraux à la retraite et d'anciens ministres, tout en rappelant subrepticement que cette organisation avait soutenu Bouteflika pour briguer un troisième mandat.