Renouant avec les grandes enquêtes historiques, Jean-Daniel Verhaeghe a réalisé pour le compte de la chaîne publique française France 3 un film poignant sur le procès en inquisition de Galileo Galilei, le savant italien universellement connu sous le nom de Galilée. Ce procès qui durera toute une année, entre 1632 et 1633, se veut celui de la science car l'Eglise, sous la pression des cercles les plus réactionnaires, craint que les dogmes qui fondent son pouvoir soient désormais remis en cause. Galilée, dont les thèses font alors autorité en Italie et dans les pays européens, est livré au Saint-office, le tribunal de l'Inquisition, pour y être accusé et convaincu d'hérésie. Les hérétiques, à l'époque, finissaient au bûcher. Tel avait été le sort, un peu plus tôt, de Giordano Bruno, philosophe et théologien italien (1548-1600), qui fut jugé et condamné à mort par le tribunal de l'Inquisition. Giordano Bruno, séduit par les thèses de Nicolas Copernic, les avait défendues dans de nombreux travaux et ses recherches personnelles l'avaient conduit à déterminer l'existence dans l'univers d'autres mondes comparables au nôtre. Giordano Bruno, s'appuyant sur les conclusions de Copernic, avait étudié les structures du ciel et l'idée seule avait heurté les principes de l'église romaine. Il sera jugé pendant huit longues années, de 1592 à 1600, avant d'être brûlé vif. Lorsque viendra le tour de Galilée d'être jugé, c'est autant son procès que celui, encore une fois, de Nicolas Copernic qui est instruit. Galilée avançait la thèse que la Terre tournait sur elle-même et autour du Soleil, ce qui paraissait à l'Eglise une chose blasphématoire. Le savant s'était fait de nombreux ennemis dans les rangs de l'Eglise et avait suscité la haine de l'ordre des jésuites qui avaient juré sa perte. Lorsque s'ouvre son procès, Galilée se trouve impliqué dans un affrontement politique qui dépasse les limites de son pays. La cible prioritaire, ce n'est pas seulement Galilée, mais plus certainement le pape Urbain VIII contre lequel se sont ligués de puissants groupes italiens conduits par le cardinal Borgia, mais aussi les influentes cours protestantes comme celle de Suède. Urbain VIII, c'est l'ancien cardinal Mafféo Barberini, ami de Galilée depuis qu'ils s'étaient connus à Florence dont ils sont originaires tous les deux. Bien que né à Pise, Galilée se considérait comme Florentin. Son père modeste compositeur, obligé d'exercer comme musicien pour gagner sa vie, était en effet un citoyen de Florence. Il avait de l'ambition pour son fils, dont il voulait faire un médecin. Galilée,qui avait la passion des mathématiques, n'ira pas jusqu'au bout de ses études de médecine. Il trouvera sa voie dans l'astronomie, devenant très vite une référence en matière de théorie du mouvement. Galilée avait démontré que la chute des corps n'est pas proportionnellement inverse à leur volume et leur poids de corps.Trois masses constituées de papier, de bois ou de fonte, tombaient au sol, du haut de la tour de Pise, à la même vitesse. Cette découverte avait ébranlé des certitudes qui remontaient aux travaux d'Aristote. Galilée s'était ainsi fait remarquer de l'Eglise, mais il avait encore des protecteurs dont le cardinal Barberini qui deviendra en 1622 le pape Urbain VIII. C'est ce même pape qui livrera Galilée au Saint-Office par choix politique car il attendait de la condamnation du savant, qu'il avait admiré et encouragé, qu'elle renforce son autorité contre ses détracteurs de l'intérieur et ses ennemis de l'extérieur, acharnés à la Réforme de l'église. C'était donc un procès politique que celui de Galilée qui était à l'automne de sa vie. Un combat du pot de fer contre le pot de terre. Galilée savait, depuis la mort tragique de Giordano Bruno, qu'on ne sort pas indemnes des mains du Saint-Office. Tout ce qu'il avait fait en 70 ans d'existence était devenu suspect aux yeux de l'église. On lui reprochait une correspondance avec Johannes Kepler, savant illustre, sous prétexte que celui-ci était protestant. S'être référé au savant musulman Averroes devenait de sa part un crime. A coup sûr, le bûcher était promis à Galilée s'il ne dénonçait pas publiquement ses convictions. Vieux, malade, persécuté par le Saint-Office avec le consentement du pape Urbain VIII, Galilée abjura solennellement ses thèses scientifiques. Il termina ses jours dans le désenchantement et la solitude. Le pape Urbain VIII lui survécut deux ans, ne tirant du renoncement son ancien protégé qu'une paix aléatoire. L'année de la mort de Galilée, en 1642, naissait Newton. La révolution copernicienne allait atteindre son apogée. Cela ne signifiera pas pour autant la fin de l'intolérance et des procès en hérésie. Galilée est à cet égard un archétype qui vaut pour tous les temps et il est logique que les idéaux progressistes en aient fait une figure emblématique des avancées humaines. L'histoire lui donnera raison car des siècles après sa disparition la science sera séparée du dogme religieux par cette même église qui avait fait brûler vif Giordano Bruno. Une question persistait pourtant : Galilée pensait-il un seul mot de ce qu'il avait dit devant ses juges ? Au sortir du tribunal de l'inquisition, des témoins l'avaient entendu prononcer cette phrase qui résume sa vie et sa mort : « Et pourtant elle tourne. »