Depuis le début de la décennie 2000, pas moins de six tripartites ont eu lieu. Des réunions souvent marathon au cours desquelles un certain nombre de décisions en faveur du monde du travail et de l'entreprise ont été prises pendant que des questions cruciales sont restées en suspens. Le relèvement du salaire minimum garanti (SNMG) a souvent été la décision phare par laquelle se ponctuait cette réunion, permettant à l'UGTA de se prévaloir d'un hypothétique succès, reléguant souvent au second plan les échecs patents. C'est ainsi que la cruciale question de l'article 87 bis du code du travail (qui stipule que le SNMG comprend le salaire de base, les indemnités et les primes de toute nature) reste à ce jour posée, alors qu'elle était à l'ordre du jour de la 11e tripartite en 2005. A l'époque, l'UGTA était allée à la réunion pour demander son abrogation pure et simple, en vain. Le problème sera à nouveau posé ce jeudi, alors que le ministre du Travail avait indiqué, il y a plusieurs mois, que son département planchait sur le sujet. Sans résultat pour le moment. Le gouvernement ne semble visiblement pas pressé de régler cette question, puisqu'il aurait très bien pu le faire, sans attendre cette énième tripartite. Cet article étant toujours appliqué, toutes les décisions d'augmentation du SNMG réduisent à néant les possibilités du relèvement du niveau de vie des citoyens.Sadek Dziri, président de l'Union nationale des travailleurs de l'éducation et de la formation (UNPEF) déclare à ce sujet que «l'évolution du SNMG n'a pas relevé le pouvoir d'achat du citoyen qui reste en deçà de la réalité du terrain et les précédentes tripartites n'ont pas changé cette donne». Selon lui, «un professeur qui en 1989 touchait l'équivalent de 4 fois le SNMG, 20 ans après, il n'est pas encore arrivé à toucher 4,5 fois ce salaire minimum». Si en dix ans le SNMG est passé de 6000 à 15 000 grâce à la tripartite, le bilan général de cette réunion reste néanmoins mitigé, les décisions indirectes débouchant le plus souvent sur la mise en place d'une multitude de groupes de travail mixtes dont les résultats restent indéterminés dans le temps, alors que les décisions les plus concrètes, quant elles sont positives, ne sont pas appliquées. Défaut de concrétisation C'est ce que déplore notamment Abdelouahab Ziani, président de la Fédération agroalimentaire affiliée à la Confédération des industriels et des producteurs algériens (CIPA) qui a laissé pendant quelques jours planer le doute sur sa participation à la tripartite du 29 septembre. «L'ensemble de nos adhérents s'est demandé comment participer à cette nouvelle tripartite alors que lors de la précédente (la 14e), nous avions obtenu de très bons résultats concernant l'entreprise privée et son environnement, malheureusement l'application sur le terrain n'a pas eu lieu». M. Ziani évoque particulièrement la décision prise de rééchelonner les dettes des PME. Selon lui, «il n'y a pas eu de considération pour ce qui a été décidé. L'association des banques et des établissements financiers se réunit sans nous, prend des décisions seules.Pourtant, nous avons ficelé le dossier fiscal», explique-t-il. Il précise que pour cette nouvelle tripartite, il s'agit d'y aller et de faire d'abord «le bilan de ce qui a été fait depuis la réunion de mai dernier». Si les résultats des précédentes tripartites laissent un peu à désirer, selon M. Dziri qui en veut pour preuve que «la majorité des entreprises publiques ont été dissoutes ou privatisées et des travailleurs licenciés avec l'aval de ces tripartites». En revanche, M. Ziani leur reproche uniquement le fait qu'elles étaient davantage orientées sur «les dossiers sociaux que sur l'entreprise». C'est d'ailleurs pour cela «qu'on a considéré la réunion du 28 mai dernier de très spéciale, car c'était la première fois qu'on parlait uniquement de l'entreprise et de ses problèmes. Avant, on en parlait mais vaguement». Un pacte national dépassé Dans le bilan mitigé de la tripartite, nul doute que la mise en application du pacte national économique et social, signé lors de la 12e réunion, occupe une place de choix. Se voulant une base à la concertation et au dialogue entre les différents partenaires socioéconomiques et le gouvernement, sa mise en œuvre dans la réalité fait, comme à l'accoutumée, défaut. «L'un des points faibles de ce pacte c'est le manque de concertation et le dialogue alors qu'il est lui-même basé sur ça», déplore M. Ziani. Il faut dire qu'en la matière, le gouvernement s'est souvent illustré en promulguant unilatéralement des lois, des textes réglementaires ou en prenant des décision sans se concerter préalablement avec les premiers concernés, notamment les représentants des secteurs économiques. En témoigne, le tollé provoqué par la loi de finances complémentaire de 2009, pour ne citer que celle là. Par ailleurs, comme l'explique M. Ziani, «ce pacte est actuellement dépassé et il faudra le mettre à jour, car les paramètres sur lesquels il a été fondé changent ainsi que les lois». Lors de la 13e tripartite, il a été décidé l'enrichissement et la reconduction du pacte, à l'issue de sa première période de validité en octobre 2010.