Mandaté par Jacques Chirac pour réécrire l'article 4 de la loi du 23 février 2005, le président de l'Assemblée nationale a annoncé, mercredi dernier, que son texte serait déposé « courant février ». « Il n'y a rien de rédigé encore, mais les consultations se poursuivent », a-t-on précisé dans son entourage. De même source, on a ajouté que « conformément à sa tradition, M. Debré ne dira pas un seul mot de plus jusqu'à la fin de la consultation » d'historiens et responsables d'associations, menée à un « rythme soutenu » depuis décembre 2005. Mercredi, le président de l'Assemblée a ainsi reçu successivement les dirigeants de l'association Agir, ceux de l'Association des Français rapatriés d'Afrique du Nord, ainsi que le vice-président de la Fédération nationale des rapatriés. Il devait s'entretenir jeudi avec les présidents de l'Association nationale des Français d'Afrique du Nord, de l'Association nationale des fonctionnaires d'origine nord-africaine. Des consultations, « principalement téléphoniques » en raison des congés parlementaires, ont également eu lieu avec des députés, notamment ceux des groupes d'amitié et ceux de l'outre-mer, a précisé la présidence. Nicolas Sarkozy a proposé, jeudi, que la nouvelle rédaction écarte « la référence ambiguë à l'outre-mer » puisque le texte, selon lui, « ne vise pas l'outre-mer au sens de notre actuelle Constitution, mais des territoires qui ne sont plus rattachés aujourd'hui à notre pays : anciens départements français d'Algérie, Maroc, Tunisie notamment ». Selon le président de l'UMP, la nouvelle loi devrait préciser que « les programmes scolaires accordent à l'histoire de la présence française dans ces territoires la place conséquente qu'elle a eue, pas plus, pas moins ». Pour le reste, « l'histoire n'appartient à personne », a ajouté, ironique, Nicolas Sarkozy. « On a vu apparaître une nouvelle race : les historiens. » « Ils arrivent, l'histoire leur appartient. » « Quelle étrange conception de la nation ! L'histoire n'appartient à personne » et « je souhaite que le Parlement puisse exprimer dans des résolutions (...) des avis politiques, des orientations politiques. » Ce n'est pas l'avis du PS. Le PS, qui vient de désigner son représentant au sein de la mission Debré, a confirmé qu'il demanderait l'abrogation pure et simple de l'article controversé. « La colonisation est, par principe, inacceptable », a déclaré Victorin Lurel. Le secrétaire national du PS à l'outre-mer estime que la proposition de Nicolas Sarkozy « ne cherche qu'à diviser et opposer les Français originaires de l'actuel outre-mer français et ceux originaires de l'ex-empire colonial ». Lundi, le président du groupe communiste à l'Assemblée nationale, Alain Bocquet, a jugé, dans une lettre à M. Debré, que « la simple réécriture de l'article n'apparaît pas de nature à favoriser le consensus souhaitable sur les bancs de l'Assemblée nationale, contrairement à la solution la plus simple, l'abrogation ». Pour sa part, la secrétaire nationale du Parti communiste français (PCF), Mme Marie-George Buffet, a indiqué à l'occasion de la présentation des vœux du nouvel an à la presse, mercredi, que « la mobilisation se poursuit et continue d'ailleurs de s'élargir. Il y a des signatures qui arrivent chaque jour » (sur le site Internet lancé par la gauche) pour l'abrogation de l'article 4 de la loi du 23 février 2005. Elle a ajouté : « S'il y a manifestation, nous serons partie prenante. » « A l'Assemblée nationale (dont les travaux reprennent le 17 de ce mois), nous allons agir dans le sens de l'abrogation de cet article. On ne peut pas rester à mi-chemin. » « Je ne sais pas si les dirigeants de notre pays mesurent les dégâts causés par cet article au plan international, notamment dans les pays victimes de la colonisation. Je pense qu'il est temps que la France grandisse en retirant cet article », a relevé Mme Buffet. A signaler qu'un collectif d'associations (MRAP, LDH, SOS Racisme, Attac...) appelle à une manifestation, le 25 février, pour l'abrogation de l'article 4 de la loi du 23 février 2005. Par ailleurs, huit associations de harkis ont demandé, elles aussi, l'abrogation de l'article 4, estimant que la colonisation est « une entreprise indéfendable », que les harkis « à leur corps défendant sont les produits de l'histoire coloniale » et « refusent de rester otages des défenseurs de l'Algérie française ». Ces associations, dont l'association Harkis et droits de l'homme et le collectif Justice pour les harkis et leurs familles, veulent également l'abrogation de l'article 13 de la loi qui vise à reconstituer les droits à la retraite des « exilés politiques », notamment les anciens membres de l'Organisation armée secrète (OAS) salariés du secteur privé.