Un an. C'est le temps qu'aura vécu l'article 4 de la loi française du 23 février qui fait l'apologie de la colonisation. Adopté en catimini à l'initiative d'un député, il a été porté à la connaissance de l'opinion publique par le mouvement associatif, entraînant dans sa mobilisation des hommes politiques avant de jeter un froid sur les relations entre Paris et Alger et de provoquer le scandale auprès des descendants d'esclaves dans les départements français d'outre-mer ; une proposition de loi réécrivant l'article controversé sera déposée “courant février” par le président de l'Assemblée nationale, Jean-Louis Debré, pour mettre un terme à la polémique qui divise la France depuis l'été. Ce texte de “réécriture”, souhaitée par le président Jacques Chirac lors de ses vœux à la presse le 5 janvier dernier, sera déposé à l'issue des consultations menées depuis la mi-décembre par M. Debré, a indiqué mercredi son entourage. L'article 4 de la loi du 23 février 2005 sur les rapatriés et les harkis dispose que “les programmes scolaires reconnaissent le rôle positif de la présence française outre-mer, notamment en Afrique du Nord”. “Il n'y a rien de rédigé encore, les consultations se poursuivent”, a-t-on précisé dans l'entourage de M. Debré qui mène cette mission que lui a confiée le président Chirac. De même source, on a ajouté que, “conformément à sa tradition, M. Debré ne dira pas un seul mot de plus jusqu'à la fin de la consultation” d'historiens et responsables d'associations, menée à un “rythme soutenu” depuis décembre. Mercredi dernier, le président de l'Assemblée française a ainsi reçu successivement les dirigeants de l'association Agir, ceux de l'Association des Français rapatriés d'Afrique du Nord, ainsi que le vice-président de la Fédération nationale des rapatriés. Jeudi, il a eu des entretiens avec les présidents de l'Association nationale des Français d'Afrique du Nord, de l'Association France-Tunisie et de l'Association nationale des fonctionnaires d'origine nord-africaine. Des consultations, “principalement téléphoniques” en raison des congés parlementaires ont également eu lieu avec des députés, notamment ceux des groupes d'amitié et ceux de l'outre-mer, a précisé la présidence. Dans une déclaration solennelle le 9 décembre, au plus fort de la polémique, Jacques Chirac avait chargé M. Debré d'une mission pluraliste “pour évaluer l'action du Parlement dans les domaines de la mémoire et de l'histoire”. Le président de l'Assemblée, un proche du chef de l'Etat, a demandé à chacun des groupes politiques de nommer un député pour “l'aider dans (sa) mission”. Le chef de file des députés communistes Alain Bocquet a jugé, dans une lettre à M. Debré, que “la simple réécriture de l'article n'apparaît pas de nature à favoriser le consensus souhaitable sur les bancs de l'Assemblée nationale, contrairement à la solution la plus simple, l'abrogation”. Le PS, qui a proposé fin novembre un texte d'abrogation de la loi, a désigné l'ancien ministre Jean Le Garrec. De son côté, Nicolas Sarkozy, ministre de l'Intérieur et chef de l'UMP, le parti au pouvoir, a proposé jeudi de réécrire l'article controversé, précisant “que les programmes scolaires accordent à l'histoire de la présence française dans ces territoires la place conséquente qu'elle a eue, pas plus, pas moins”. Celui qui brigue la succession de Chirac en 2007 a estimé, lors de ses vœux à la presse, que les malentendus “qui sont nés autour la loi du 23 février 2005 doivent être levés”. Pour M. Sarkozy, la réécriture de l'article 4 doit avoir pour premier objectif “d'écarter la référence ambiguë à l'outre-mer puisque le texte ne vise pas l'outre-mer au sens de notre actuelle Constitution, mais des territoires qui ne sont plus rattachés aujourd'hui à notre pays”. “Le second objectif, a indiqué le président de l'UMP, est de préciser que les programmes scolaires accordent à l'histoire de la présence française dans ces territoires la place conséquente qu'elle a eue, pas plus, pas moins, sans bien sûr qualifier cette place”. Si l'année 2005 a été celle d'un grand rendez-vous raté entre la France et l'Algérie, 2006 se présente sous les airs des retrouvailles. Paris et Alger travaillent “afin qu'un traité d'amitié vienne consacrer, dans un esprit d'équité et d'ouverture, cette relation nouvelle, confiante et durable qui est de l'intérêt de tous”, a indiqué mardi Jacques Chirac devant les diplomates en poste à Paris. Yacine KENZY