Certaines personnes fréquentent ces lieux de culte seulement pour l'utilisation des WC l Des imams et des fidèles tirent la sonnette d'alarme. Les nombreuses mosquées abritant des toilettes publiques se voient chargées d'une fonction impudique qui relève de la stricte compétence des autorités locales. Cette affectation incompatible avec la vocation d'un lieu de culte prend des dimensions sauvages. Les autorités religieuses tardent à réagir. Le phénomène prend l'allure d'un scandale au quotidien. La progression alarmante de l'état d'insalubrité dans les mosquées urbaines atteint des proportions graves. Des fidèles et des imams s'insurgent contre le comportement de certains individus sans scrupule qui détournent le lieu sacré de sa vocation habituelle en utilisant ses toilettes, sans éprouver le moindre sentiment de honte. Le parfum de musc, c'est révolu. Entre les odeurs nauséabondes des latrines, les mycoses et les champignons des ongles logés dans les mailles des tapis, la fréquentation de nombreuses mosquées comporte un risque sanitaire certain. Sous le climat de laxisme total qui s'ajoute aux pressions exercées par des groupuscules qui tentent l'exercice du pouvoir sur les lieux, les mosquées sont envahies par les foules de commerçants ambulants de proximité et des individus de passage qui franchissent le seuil du «mesdjid» pour leurs soulagements intestinaux, traînant sous la coupole les résidus de matières fécales sous leurs pieds crasseux. Parfois, c'est pour faire la sieste. La prosternation sur ces tapis devient alors un redoutable exercice d'apnée. Le silence général devant cette situation désobligeante est dû, sans doute, au statut particulier du lieu de culte qui s'impose, en principe, comme un espace de respect et de dévotion. La première responsabilité incombe vraisemblablement aux constructeurs «modernistes» qui dessinent systématiquement leur scandaleuse architecture avec les outrageantes installations sanitaires et latrines, au lieu d'une simple fontaine pour ablutions. Ces nouvelles normes sont systématiquement validées par les autorités religieuses, et cette désinvolture est indécente. Les musulmans étrangers sont choqués par cette particularité algérienne. La mosquée n'a aucune obligation à assurer la fonction de WC aux foules urbaines. C'est une «bidaâ», autrement dit, une grave entorse à la loi sacrée et la tradition. Aucun texte, du reste, n'impose cette basse vocation. La maturité citoyenne et l'engagement font défaut. «Mais où va-t-on faire ça ?» Ainsi réagit une majorité silencieuse à défaut d'opinion. Des milliers d'usagers se ruent quotidiennement vers les WC qui jouxtent la salle de prière. Y a-t-il un problème ? Formulée ainsi, la question suscite des réponses plus réfléchies. Effectivement, il y a un sérieux problème à déplorer. Ailleurs, dans le monde musulman où l'on traite la mosquée avec plus de dignité, les douches et des toilettes publiques sont gérées par des particuliers à proximité mais toujours hors de l'enceinte. Ainsi, le fidèle peut accomplir son devoir dans un état de propreté physique conforme au lieu et dans la plénitude de la foi. Et ce n'est pas faillir à la tradition que d'interdire les WC et les tapis en textiles, vecteurs de maladies dermatologiques. Les parquets en lyno, faciles d'entretien, acceptent mieux le nettoyage quotidien à l'eau avec une solution antiseptique. Nos mosquées, surtout les nouvelles, en mal d'hygiène, méritent une gestion fondée sur une meilleure discipline et le respect de leur vocation originelle.