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Qu'est-ce qui bloque l'émancipation ?
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Publié dans El Watan le 02 - 11 - 2011

«Tant qu'un peuple est contraint d'obéir et qu'il obéit, il fait bien ; sitôt qu'il peut secouer le joug et qu'il le secoue, il fait encore mieux : car, recouvrant sa liberté par le même droit qui la lui a ravie, ou il est fondé à la reprendre, ou on ne l'était point à la lui ôter».
Jean Jacques Rousseau, Le contrat social.
Les peuples vivraient libres ou vivront pour se libérer…
Quand les peuples égyptien et tunisien ont fait leur révolution, tout le monde s'attendait à ce que les Algériens fassent là leur aussi. Il n'en a rien été. Certains avanceront qu'Octobre 1988 et une décennie de destructuration et de désarticulation profondes de toutes les structures de la société auraient fini par avoir raison de la foi des Algériens dans les vertus de la résistance et de la mobilisation collectives. Mais qu'en est-il réellement de tout cela ? Serait-il vrai que le peuple algérien, en l'état actuel de son fonctionnement sociohistorique et de sa maturité politique, est complètement voué à la résignation et à l'acceptation du sort peu reluisant qu'on lui a infligé ? Serait-il incapable de faire une révolution telle que l'ont faite ses voisins tunisiens et égyptiens ?(1) Y a-t-il une sorte d'inertie sociale qui bloquerait toute initiative collective et qui viserait à changer les règles de fonctionnement du régime actuel ? Il est évident que tous ces questionnements ne deviennent pertinents que si l'on accepte le présupposé politique suivant : le régime politique algérien, tel qu'il fonctionne (ou encore dysfonctionne) actuellement, a irréversiblement atteint ses limites et, par conséquent, il n'est plus en mesure de répondre aux attentes du peuple.
Il faut donc le changer complètement, mais il suffirait, peut-être, pour ceux qui pensent qu'une révolution n'est ni possible ni nécessaire en Algérie, de déconstruire ce présupposé. L'exercice est facile pour ceux qui veulent s'y essayer : le régime politique algérien recèlerait encore en son sein l'énergie nécessaire et suffisante pour qu'il puisse se sortir de l'impasse dans laquelle il s'est jeté et a jeté, avec lui, l'ensemble de la société algérienne. Il posséderait encore une volonté saine de se réformer, par lui-même, de l'intérieur. La commission de réforme, instituée par le président Bouteflika et dirigée par M. Bensalah, témoigne que l'idée par laquelle le régime politique algérien peut s'amender par lui-même et se racheter une virginité est fortement ancrée dans le sillage du pouvoir politique. Mais, manifestement, ce constat ne résiste pas à l'analyse. Une sociologie de la «misère du monde» social en Algérie en dira long sur les souffrances des Algériens et sur le peu de confiance qu'ils ont dans la capacité de leurs institutions représentatives et de leurs gouvernants de répondre à leurs aspirations au changement. Ainsi, c'est sans doute dans cette grille d'analyse qu'il faut développer une lecture des différents mouvements de grève et de protestation qu'a connues le front social dans les différents secteurs d'activités.
La conjonction de ses mouvements dans le temps (et souvent dans l'espace), indique qu'il ne s'agit pas de crises liées à des dysfonctionnements localisés au niveau des différents secteurs d'activités sociales ou économiques, mais plus gravement d'une crise structurelle liée au centre et à la fonction politique, primordiale, de ce centre, c'est-à-dire au fonctionnement de l'Etat lui-même (et du pouvoir politique auquel incombe la tâche d'assurer le bon fonctionnement des institutions de l'Etat et de tous les secteurs d'activités sociales). De même, une sociologie des institutions étatiques(2) (l'APN, le Sénat, etc.) et du pouvoir politique en dira autant sur l'obsolescence des mécanismes de fonctionnement de ce pouvoir, sur son incurie et son incapacité à renouveler ses modes spécifiques de pensée et d'action politiques. Mais ce n'est pas le lieu ici de faire ce travail. Il suffirait, peut-être, d'analyser le constat d'échec fait implicitement par ce pouvoir politique lui-même, pour comprendre son incapacité à se réformer. On s'intéressera à la période allant de 1999, date d'accession de M. Bouteflika à la présidence à nos jours.
En 2011, le président annonce l'ouverture d'un grand chantier de réformes nationales. Tous les secteurs sont concernés : la Constitution et la conception des grandes orientations de l'Etat, le politique, l'économie, l'enseignement, le sport, la culture, etc. En 1999, lorsque le président Bouteflika entame son mandat, il le fait avec les mêmes annonces concernant les réformes : la réforme des structures de l'Etat, de l'éducation, de la justice, etc. Après deux mandats, et un troisième largement entamé, grâce aussi à une «autre réforme» de la Constitution, force est de reconnaître qu'on en est encore à la case départ. Cela signifie qu'après douze ans, tout est à refaire. Douze ans ! C'est peut-être peu à l'échelle de la vie d'une nation, mais un échec stratégique(3), un faux départ, au niveau de la gestion de tout un pays, c'est beaucoup, c'est même trop. Car cela risque d'hypothéquer l'avenir des générations futures. Il n'y a aucune garantie qui puisse nous rassurer quant aux chances de succès de ce nouveau chantier de réformes lancé par le président. Les mêmes noms, les mêmes pratiques surtout sont reconduits à l'identique. Et il faut dire qu'à ce niveau d'enjeux, le peu que l'on puisse dire, c'est que le pouvoir n'a pas du tout droit à un deuxième échec. Encore plus, il ne doit même pas avoir droit à une deuxième tentative, car le peuple algérien, qui a beaucoup souffert, n'est pas un champ d'expérimentation pour des stratèges mal inspirés. Car, quand on est à la tête d'un pays, la devise est : «Messieurs ! Faites vos preuves, ou faites vos bagages !».
Le boycott de la commission de Bensalah par les personnalités nationales les plus crédibles, qui préconisent une sortie de crise par un changement radical du fonctionnement du pouvoir actuel, témoigne que d'autres options de sorties de crise sont envisageables. Et c'est sans doute là un élément incontournable dans l'effort de réflexion pour sortir de la crise : toute démarche de sortie de crise qui n'aurait pas pour préalable, au niveau de l'analyse, l'établissement du constat d'échec total et irréversible du pouvoir actuel, est vouée à son tour à l'échec. Toutes les propositions qui seront faites, aussi louables soient-elles, n'auraient qu'un effet de cautère sur une jambe de bois, si l'échec du pouvoir politique actuel n'aurait pas été intégré comme élément essentiel dans le diagnostic de la crise multiforme que connaît notre société. Ainsi donc, si l'incurie du pouvoir politique en Algérie est irréversiblement établie et sa responsabilité dans l'échec national est clairement avéré, pourquoi n'assistons-nous pas à l'émergence d'une «force» dans la société, qui imposerait le changement tant attendu et souhaité ? Comment expliquer l'échec des logiques de mobilisation et d'action collective ? Il est évident qu'un tel questionnement nécessite une approche pluridisciplinaire, historique, sociologique et sociopolitique. Nous ne prétendons pas apporter ici une réponse exhaustive à ce questionnement, mais nous espérons tout simplement développer, dans les limites de cette contribution, quelques éléments susceptibles de susciter le débat et de favoriser la réflexion.
De même que nous avons dit plus haut que la crise algérienne est principalement imputable à la défaillance de la fonction politique du centre (le pouvoir politique de l'Etat), de même nous pensons que l'échec des logiques de mobilisations collectives est principalement lié au relâchement et à la distension du lien politique au sein de la société, c'est-à-dire à la défaillance de la fonction politique également dans la société. Nous assistons à une déconnexion totale entre le politique, comme mode revendicatif premier et fondamental, au sein de toute société humaine, d'une part, et les autres modes ou formes de revendication, syndicales, intellectuelles, sociales, etc, d'autre part. Cette déconnexion est l'indice de l'incapacité des partis et des personnalités politiques de l'opposition à définir (ou peut-être à mettre en pratique) des projets politiques clairs autour desquels tout le monde (et tous les mondes, syndical, intellectuel, médiatique, etc.,) pourrait se mobiliser. Explication. Prenons un exemple. Avec la difficile émergence des syndicats dits autonomes, le mouvement syndical a pu, plus ou moins, marquer sa présence dans le paysage revendicatif. Mais nous pensons que ces revendications resteront toujours insuffisantes, voire vaines, tant qu'elles resteront circonscrites, dans leurs formulations et leurs exigences, uniquement à l'intérieur de la sphère professionnelle.
Car, en réalité, dans le contexte algérien actuel, il ne s'agit pas tant d'améliorer les conditions de travail (salaire, santé, congé et le reste des droits professionnels), qui sont certes nécessaires, que d'assurer et d'arracher les conditions (qui sont fondamentalement politiques) d'exercice libre du droit syndical lui-même. Sinon, comment expliquer l'épée de Damoclès qui pèse sur le droit à se syndiquer ? Comment expliquer le recours abusif du pouvoir à la justice pour casser des mouvements de grève légitimes ? Ou encore, comment expliquer les contraintes qui pèsent sur la création de nouveaux syndicats ? L'UGTA, qui affiche clairement son alignement, est-elle un instrument syndical ou un instrument politique aux mains du pouvoir ? Pourquoi s'interdirait-on alors la politisation des revendications syndicales ?(4) Aussi longtemps que les conditions politiques de l'exercice syndical libre ne seront pas réunies et garanties, toutes les formes de luttes syndicales, aussi opiniâtres et tenaces soient-elles, demeureront un exercice presque gratuit et sans efficacité. Ce que nous disons ici de la sphère syndicale vaut, «mutatis mutandis», pour les autres sphères, intellectuelles, médiatiques(5), associatives, etc.
On ne peut vraiment séparer le politique du syndical, le politique de l'intellectuel, le politique du travail associatif qu'une fois les conditions politiques élémentaires de l'exercice autonome de ces activités sont réunies : c'est donc la présence de ces conditions politiques, comme préalable, qui pourraient permettre au syndical d'être purement et seulement syndical, à l'intellectuel d'être purement et seulement intellectuel, etc. Parce que les droits du citoyen, qui est l'élément et le sujet abstrait du droit à l'intérieur de toute unité et entité politique, sont des impératifs et des préalables aux droits des travailleurs, des journalistes, des intellectuels, des cadres associatifs qui sont, eux, des sujets concrets du droit. Mais, dans les faits, cette séparation n'est qu'une limite idéale que seules les sociétés hautement différenciées pourraient atteindre. En Algérie, où la crise est fondamentalement liée à un échec politique du pouvoir central de l'Etat, si on veut un changement radical sur le modèle d'une révolution pacifique, on devrait faire l'économie de cette séparation. Car si révolution il y aura, qui seront ses sujets, sinon les travailleurs syndiqués ou non, les jeunes appartenant à des associations ou non, des jeunes chômeurs ou non, des journalistes, des avocats(6), des médecins, des enseignants, etc., dont les différentes luttes corporatives doivent s'inscrire en perspective d'un horizon politique qui garantirait l'exercice libre de tous les droits. Qu'est-ce qui réunirait toutes ses franges, qu'est-ce qui les mobiliserait, par-delà leurs revendications corporatives et catégorielles restreintes, sinon une recréation et une revitalisation du lien politique ? Car, finalement, il faut que l'intérêt à l'émancipation se répande comme un seul souffle dans tout le peuple. Celui-ci aime la liberté ; celle-ci ne l'aime peut-être pas et ne l'a jamais aimée ? L'a-t-elle trahi ? Pour l'instant, elle se refuse dédaigneusement à lui. «Puisse Dieu la faire (re)venir ! Le peuple ne s'en portera que mieux».

Morsli Mahieddine : Enseignant. Université de Laghouat


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