Chaque année, cette noble tradition est dépouillée de son essence, devenant juste une saignée générale pratiquée dans le chaos le plus total, faisant beaucoup plus le jeu des spéculateurs de tous bords. Malgré les difficultés financières, la plupart des familles respecteront cette année encore la tradition religieuse du sacrifice du mouton, -ou Aïd El Adha-, prévue mardi prochain. Chaque musulman, s'il en a les moyens, est donc tenu d'observer le rituel en égorgeant un mouton. Cependant, le principal souci des chefs de famille en cette circonstance reste d'en avoir un à un prix abordable. A Bordj Bou Arréridj, précisément au niveau des marchés à bestiaux et dans tous les autres points de vente, c'est le moment pour les revendeurs de moutons de s'en mettre plein les poches, sachant que les gens d'ici ont coutume d'acheter celui-ci à la dernière minute, et «à tout prix» ! Laïd, âgé de 45 ans, fonctionnaire, a beaucoup économisé sur son salaire pour pouvoir en acheter un. Il est déterminé à observer le rite du sacrifice, notamment pour faire plaisir à sa mère, sa femme et ses quatre enfants. Le coût élevé ne saurait l'empêcher de respecter cette pratique. Au marché du mouton, Azzedine, un autre père de famille, a du mal à choisir la bête qui lui convient. Une chose est sûre, il ne partira pas avant d'avoir trouvé celle que mérite sa famille, et ce quel qu'en soit le prix: un bélier lourd et bien encorné, comme le veut la charia ! Farid, un entrepreneur, est décidé à acheter la bête qui lui vaudra le respect parmi ses voisins. «Les paysans ont besoin de cet apport d'argent en récompense de leurs efforts pour élever les bêtes», dira-t-il. «L'occasion appelle quelques sacrifices», ajoute-t-il. Ces jours-ci, les gens ne font rien d'autre que de chercher le bon mouton parmi ceux qui sont proposés dans leurs quartiers. Sur les marchés et points de vente de Bordj Bou Arréridj, les ovins sont nettement plus chers que l'année précédente. Pour un paysan de la région de Djaâfra, les prix ont connu une hausse significative par rapport à la même période de l'année écoulée. «Le mouton est vendu au prix du bœuf aujourd'hui», dit-il. «Cette année, un mouton moyen ne coûte pas moins de 30 000 DA, alors qu'il n'était qu'à 20 000 DA l'année dernière», ajoute-t-il. « Malgré le soutien des autorités publiques aux éleveurs sous différentes formes, les prix vont crescendo d'année en année», explique-t-il. Selon notre paysan de la commune de Djaâfra, cette année la mafia de la contrebande et autre blanchiment d'argent ont investi de grandes sommes et ont monopolisé presque le marché à bestiaux. «Des moutons algériens sont commercialisés au niveau des frontières Est pour être acheminés vers la Tunisie et la Libye», dévoile-t-il.