Star Academy 3, cette émission de divertissement de LBC, chaîne privée libanaise, diffusée, en Algérie, par l'ENTV, a provoqué une onde de choc chez le MSP. Par le biais de son président Bouguerra Soltani, également ministre d'Etat sans portefeuille, ce parti d'obédience islamiste a vertement critiqué la télévision algérienne pour avoir intégré dans sa grille de programmes cette émission diffusée chaque jour. Après avoir dénoncé ce programme, jeudi dernier, sur les ondes de la Chaîne II de la radio nationale, en disant que " celui qui a acheté Star Academy sera jugé par le peuple algérien ", M. Soltani est allé encore plus loin jusqu'à le considérer comme une provocation de la société et une atteinte à ses principes et à sa morale. " Ce programme est contraire aux mœurs, us et traditions de la société algérienne. Il véhicule une culture qui n'est ni la nôtre ni celle du monde arabo-musulman ", nous a-t-il déclaré hier au téléphone. M. Soltani trouve, en effet, que les tenues vestimentaires des jeunes qui participent à cette émission sont " extrêmement légères ", les discussions " vulgaires " et les comportements " inacceptables". " Je pense qu'un tel programme peut être suivi uniquement dans une chambre à coucher. Je ne peux le regarder ni à la maison en famille ni au bureau ", a-t-il ajouté avant d'indiquer avoir saisi, personnellement, le directeur général (DG) de l'ENTV pour lui demander de cesser d'émettre ce programme. M. Soltani dit ne suivre plus cette émission. “Je l'ai regardée une seule fois. C'était juste pour vérifier si les critiques et les commentaires des gens qui m'ont appelé étaient vrais”, a-t-il précisé. De son côté, le vice-président du même parti, Abderrazak Mokri, a usé du même ton pour battre en brèche ce programme dit de " la honte”. "C'est une atteinte majeure et grave à la Constitution qui interdit à tout établissement de l'Etat de faire véhiculer des programmes qui portent atteinte à l'éthique et la morale islamiques ", a-t-il fulminé. Le numéro 2 de l'ex-Hamas tire son argument du fait que l'ENTV est la télévision de l'Etat, donc "censée " appartenir à tous les Algériens. " En plus, elle est financée par l'argent du contribuable ", a-t-il encore martelé. Son parti a déjà entamé des contacts avec les différentes sensibilités existant dans le pays, des journalistes, des imams et des hommes de lettres pour se mobiliser ensemble afin que ce programme cesse d'être émis par l'ENTV. "Nous allons tenter aussi de mener une action au niveau de l'APN. L'un de nos députés a interpellé le chef du gouvernement par le biais d'une question orale. Nous envisageons d'utiliser également d'autres moyens. Nous n'allons pas nous taire ", a-t-il souligné. Le député Abdenacer Ben Oum Hani a, effectivement, saisi Ahmed Ouyahia par le biais d'une question orale. A travers sa question, déposée hier sur le bureau de l'APN, ce député demande au chef du gouvernement des explications sur le fait que les dirigeants de l'ENTV tolèrent la programmation de certaines émissions " contraires aux mœurs, traditions et culture algériennes telle que Star Academy". "Cette émission montre des danses avec des sous-vêtements dans des moments gênants où toute la famille algérienne se trouve regroupée devant le petit écran ", a-t-il souligné dans sa question. Pour lui, le summum de " la provocation " est dans le fait que cette émission passe souvent juste après le journal télévisé de 20h. Le député trouve, lui aussi, que les responsables de l'ENTV ont " bafoué " la Constitution, notamment son article 9 qui stipule : "Les institutions s'interdisent (...) les pratiques contraires à la morale islamique et aux valeurs de la Révolution de Novembre". Contacté par nos soins, Hamraoui Habib Chawki, directeur général de l'ENTV, a précisé que la télévision algérienne " ne s'impose à personne ". Tout en se refusant de commenter les positions du MSP qu'il trouve “respectables”, HHC estime, cependant, que la démocratisation du ciel dans le monde arabe permet aujourd'hui à tout un chacun de "choisir les programmes qu'il veut ou à défaut de zapper ". Il précise que Star Academy, avant qu'elle soit diffusée sur l'écran national, existait déjà sur les chaînes arabes. " Selon nos statistiques et nos analyses, les Algériens sont les plus nombreux à envoyer des SMS à cette émission. D'ailleurs, la candidate algérienne (Rym Ghazali, ndlr) vient d'être sauvée pour la seconde fois, après avoir été nominée, avec un score de 56%. Jamais un candidat dans la Star Academy arabe ou européenne n'a récolté un tel score ", a-t-il indiqué. Pour lui, cela démontre que les Algériens suivent " de près et avec force " cette émission. “Devant une telle demande, nous n'avons fait que ramener le programme pour qu'il soit suivi localement ", a-t-il observé, avant de répondre à ceux qui l'accusent d'avoir dilapidé les deniers publics, en leur disant : " Nous n'avons dépensé aucun dollar ni dinar ni aucun euro pour les droits de retransmission de Star Academy 3 ". Selon lui, la couverture financière se fait à travers des spots publicitaires. " Il faut que l'on sache une fois pour toutes que l'ENTV ne paie rien ", a-t-il insisté. Le DG de l'ENTV s'autorise une petite interrogation : "Combien sont-ils ces militants du MSP qui regardent les chaînes arabes comme LBC, Rotana et les autres ? " Et d'ajouter : " Rappelez-vous qu'à un moment donné, la musique raï était interdite d'antenne à la télévision algérienne. Maintenant, elle ne l'est plus ", a-t-il expliqué, avant d'enchaîner : " C'est grâce, entre autres, au raï et à des champions comme Hassiba Boulmerka que l'Algérie, qui a traversé une mauvaise période, est restée debout."