Le sang continue de couler en Syrie, malgré les appels à la raison de la communauté internationale. A quelques heures seulement de l'expiration de l'ultimatum de la Ligue arabe le sommant de cesser la répression de la révolte populaire, le régime de Damas a bombardé, hier, à l'artillerie lourde, Chezar, une localité, située dans la région de Hama, en proie à la contestation depuis 8 mois. Bilan de l'opération qui a également visé Homs : trois personnes tuées et de nombreux blessés. Trois autres civils sont morts dans le courant de la journée dans la ville de Kafr Takhareem, dans la province d'Idleb, frontalière avec la Turquie, dans des attaques de l'armée, a annoncé le président de l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), Rami Abdel Rahmane. Deux autres civils ont été tués par des tirs lors d'affrontements entre des militaires et des soldats dissidents à Qousseir, et un autre par un tireur embusqué à Homs (centre), a-t-il précisé. Officiellement, le gouvernement syrien n'a pas répondu aux injonctions de la Ligue arabe qui lui a donné, mercredi soir, trois jours pour cesser la répression des civils sous peine de sanctions économiques. Il est à rappeler que la Syrie est déjà suspendue de l'organisation panarabe. Ces nouvelles violences surviennent au lendemain de la mort de quinze civils, dont deux enfants. Ils ont été tués par les forces de sécurité qui avaient tiré pour disperser des manifestations appelant à la chute du régime dans plusieurs villes du pays. Ces victimes s'ajoutent ainsi aux 3500 autres abattues de sang-froid par l'armée syriennes depuis le mois de mars dernier. Devant les risques de voir la Syrie sombrer dans une guerre civile – ce qui est déjà pratiquement le cas depuis que l'opposition s'est dotée d'une armée –, les Etats-Unis, la France et la Turquie (qui abrite l'opposition à Bachar Al Assad) sont une nouvelle fois montés au créneau pour appeler à l'arrêt des violences. Les attaques de militaires dissidents se sont, en effet, multipliées parallèlement aux manifestations pacifiques. Preuve sans doute que la situation se complique et risque de contaminer la région, la secrétaire d'Etat américaine, Hillary Clinton, qui était au début réticente quant à l'usage du concept de «guerre civile», a fini aussi par évoquer la possibilité d'un tel risque. Cela surtout, a-t-elle ajouté, que «l'opposition est très déterminée, bien armée et finalement bien financée». L'Armée syrienne libre (ASL) a, rappelle-t-on, mené des attaques à la roquette contre des centres des services secrets et du parti au pouvoir. Devant les risques réels d'une propagation de la crise, le chef de la diplomatie française, Alain Juppé, a ainsi appelé l'opposition syrienne à éviter «le recours à l'insurrection armée». Les Etats-Unis, l'Union européenne et la Turquie ont préconisé, de leur côté, une accentuation des sanctions pour faire pression sur le régime de Bachar Al Assad. Malgré les pressions croissantes de l'Occident et des Arabes, M. Assad peut encore compter sur le «soutien critique» de ses alliés chinois et russe qui refusent toute ingérence étrangère en Syrie. Mais rien ne dit aussi que les choses resteront en l'état si la crise perdure. Le délai accordé par la Ligue arabe au régime syrien devait expirer hier à minuit (22h GMT). Vendredi, la Ligue arabe a dit examiner une demande syrienne de modifications à sa proposition d'envoyer à Damas une délégation de 500 observateurs pour s'assurer de la sécurité des populations civiles. Les pays arabes reprochent à Damas de ne pas respecter, contrairement à sa promesse, le plan de sortie de crise arabe qui prévoit la fin des violences, le retrait des troupes des villes, la libération de milliers de détenus et l'envoi d'observateurs arabes sur le terrain.