Le conflit sur le nucléaire entre l'Iran et les pays occidentaux commence à peser lourdement sur le marché pétrolier. La possibilité de voir l'affaire devant le Conseil de sécurité des Nations unies a ravivé la tension avec, comme principale hypothèse, une nouvelle crise qui pourrait entraîner une rupture des approvisionnements ou du moins des perturbations très graves du marché. Depuis l'annonce, le 10 janvier dernier, d'une reprise du programme nucléaire iranien, les prix ont connu une remontée qui les rapproche de leurs records du mois d'août 2005 (avec, entre autres, plus de 70 dollars le baril sur le marché new-yorkais, le 30 août). Depuis le 10 janvier, les prix ont pris 5 dollars le baril. L'Iran avait annoncé avoir levé les scellés de l'ONU de ses installations nucléaires, y compris celles d'un centre d'enrichissement d'uranium. La Maison-Blanche avait réagi rapidement en indiquant que l'affaire pourrait aller devant le Conseil de sécurité. Le ministre iranien de l'Economie, Davoud Danesh-Jaafari, a évoqué, la semaine dernière, les risques en cas de sanctions. « Toute sanction dans la situation actuelle sera plus préjudiciable pour l'Occident que pour l'Iran », a-t-il estimé, en soulignant que « toute perturbation dans la situation économique et politique du pays peut mettre en crise la situation régionale et faire augmenter le prix du pétrole au-delà de ce qu'attendent les Occidentaux ». Dans un entretien avec la chaîne américaine de télévision CNBC, le vice-président des Etats-Unis, Dick Cheney, a évoqué les répercussions de la crise sur les prix du pétrole. « Qu'il y ait un pic sur les cours du pétrole, s'il y a une sorte de crise avec l'Iran, c'est entièrement possible », a-t-il déclaré. Toutefois, cette éventualité est préférée par Dick Cheney à la poursuite du programme nucléaire par l'Iran. « Mais je pense que les conséquences seraient nettement moins significatives que les conséquences de voir M. Ahmadinejad disposer de l'arme atomique », a-t-il estimé.Dans cette crise, l'hypothèse d'une hausse des prix du pétrole à des niveaux plus élevés que ce qu'on a vu ne semble pas avoir été écartée par les Occidentaux, pour qui il est plus important d'empêcher l'Iran de disposer de l'arme nucléaire. La nouvelle donne de la politique nucléaire française, exposée jeudi passé par Jacques Chirac, procède de la même volonté d'empêcher l'Iran d'acquérir l'arme nucléaire avec la précision que la doctrine nucléaire de la France englobe maintenant la garantie des approvisionnements stratégiques et la défense de pays alliés (entendre par là pétrole et Israël). L'hypothèse d'une frappe ciblée contre l'Iran semble être envisagée sérieusement. Cela a déjà été fait par Israël contre l'Irak en 1981, où la cible était un réacteur nucléaire. Ce sont toutes ces données qui ont amené le marché pétrolier à envisager une possible rupture des approvisionnements pétroliers en provenance d'Iran. L'Iran est le deuxième producteur de pétrole de l'Opep avec 4,2 millions de barils par jour. Ses exportations s'élèvent à environ 2,5 millions de barils par jour. Avec le fragile équilibre actuel du marché pétrolier, un manque de quelques centaines de milliers de barils porterait les prix à un seuil très élevé. Une autre hypothèse est plausible. En cas de sanctions, l'Iran pourrait se tourner vers la Chine pour vendre son pétrole. Ce qui n'aurait pas de grands effets sur les prix puisque la rupture de l'approvisionnement n'aurait pas eu lieu. Mais l'économie du pays en pâtirait avec un ralentissement des investissements. Mais si le pétrole iranien est indispensable pour le marché, d'un autre côté, l'Iran dépend largement des revenus du pétrole. Ils lui procurent entre 80% et 90% des recettes extérieures et contribuent pour près de la moitié du budget de l'Etat.Tout cela pour dire que si le gouvernement iranien joue l'épreuve de force avec l'arme du pétrole, il lui faudrait entrer en économie de guerre.