Le Syndicat national des vétérinaires fonctionnaires de l'administration publique (SNVFAP) réoccupe le terrain de la contestation, après avoir recouru à une grève de trois jours, en octobre 2005. La corporation, qui regroupe 1400 praticiens à travers le pays, s'estime lésée. D'où un appel à un autre débrayage de sept jours, prévu du 4 au 10 février 2006. Dans cet entretien, le secrétaire général du SNVFAP, Kaddour Hachimi Karim, brosse un tableau général sur la situation du praticien affecté au secteur public. Que revendique concrètement le vétérinaire du secteur public ? Le respect et la reconnaissance. Cela peut paraître flou, vague, mais cet aspect est très important pour nous. Je m'explique : le vétérinaire affilié à l'administration publique se trouve au bas de l'échelle. Il est perdu dans les inspections vétérinaires qui, elles-mêmes et en dépit de leur importance, sont de simples services des directions des services agricoles (DSA). Alors que tous les fonctionnaires sont bien installés, ont des bureaux... le vétérinaire doit se débrouiller pour partager la chaise d'un collègue et trouver un coin pour classer ses documents. Je ne suis pas là pour dénigrer mes collègues des DSA. Je veux seulement dire qu'il est temps de remettre les choses à leur place. Nous en avons assez d'être insultés et brimés. Insultés par qui ? Lorsqu'il est affecté dans une subdivision vétérinaire qui a la compétence sur tout le territoire d'une daïra, le praticien doit se débrouiller pour veiller sur tout. Rien ne doit échapper à sa vigilance, les élevages ovins, bovins, le lait, les œufs ; en un mot, tout ce qui concerne la santé animale. Et s'il y a un problème, et dont il n'est nullement responsable, on l'accable de tous les maux. Oui, je me sens diminué et insulté quand on me dit : « Il n'y a pas de véhicule, débrouille-toi pour aller visiter tel éleveur. » Ce à quoi s'incline le vétérinaire en sollicitant les moyens de transport de l'éleveur en question. Et si, par malheur, il détecte chez celui-ci un quelconque problème et le signifie vertement, attendez-vous à des brimades et même des insultes. Avec à la clé le retour à pied à l'inspection. Depuis une année, c'est le bras de fer avec votre tutelle, le ministère de l'Agriculture, qui dit que vos revendications ne relèvent pas de ses compétences, mais plutôt de celles du gouvernement. Alors, pourquoi la grève ? Le SNVFAP ne cesse de clamer haut et fort que la balle se trouve dans le camp du ministère de l'Agriculture. La seule vérité qu'il a dite, c'est lorsqu'il avance que la question du statut particulier lui échappe. Mais l'opinion publique doit savoir que nous n'avons jamais revendiqué cela. Un bref historique s'impose. En 2004, nous avons réuni notre conseil national consultatif qui a regroupé quasiment toutes les wilayas. Une rencontre qui a abouti à une une plateforme qui dépeint tous les problèmes de la corporation et adressée au ministère de l'Agriculture qui emploi 95% des vétérinaires fonctionnaires. La pêche et l'intérieur, les deux autres tutelles, ont été également instruites. Suite à quoi, et après avoir déposé un préavis de grève, le secrétaire général du ministère de l'Agriculture nous a reçus avec la promesse de répondre à nos doléances. Ce qui fut fait, puisque une commission multisectorielle (tutelle, syndicat, Fonction publique et ministère des Finances), créée au lendemain, a tranché définitivement la question, en mai 2005. Sur les sept points inhérents au régime indemnitaire, trois ont été retenus. Il s'agit de l'indemnité spécifique globale, l'indemnité de contagion et de pénibilité et l'indemnité de documentation. La Fonction publique et le ministère des Finances étaient même surpris que nous ne soyons pas alignés au même titre que les praticiens de la santé publique. Un procès-verbal sanctionnant la réunion instruit la tutelle d'appliquer la décision dans la semaine qui suit. Malheureusement, rien n'a été fait à ce jour. Le mépris affiché à notre égard par notre tutelle est scandaleux. Le ministre, qui a déclaré que ses portes étaient ouvertes, refuse catégoriquement de nous recevoir. Pourtant, le SNVFAP est un syndicat agréé et représentatif. Votre syndicat a déclaré récemment que le secteur n'est pas assez outillé pour affronter une éventuelle pandémie de grippe aviaire. Pouvez-vous être plus précis ? Alors que les Européens sont en train de parler d'une force d'intervention rapide, car ils s'inscrivent dans une logique d'une véritable guerre, chez nous, on continue à faire dans le bricolage. La tutelle dit qu'elle a donné tous les moyens, alors que la vérité est tout autre. Certes, nous avons reçu des tenues spéciales, mais elles ne répondent pas totalement aux normes. Les gants, par exemple, censés servir à des actes chirurgicaux sur les volatiles, sont en fait des gants pour la vaisselle. Les chaussures ont des pointures de 44, 46 voire 48, alors que la majorité des vétérinaires sont des femmes. Nos services doivent être également approvisionnés en quantité suffisante en trousses de petite chirurgie, car il faut savoir que lorsqu'il y a alerte (un oiseau mort, etc.) le vétérinaire est tenu de se déplacer sur place et faire son autopsie. Le ministère a donné trois trousses pour chaque wilaya, et certaines wilayas n'en sont pas encore pourvues. C'est très très peu. Pour conclure, on ne peut pas combattre efficacement la grippe aviaire avec un vétérinaire payé 14 000 DA le mois.