Malgré la répression féroce qu'ils subissent, les manifestants chiites bahreïnis restent déterminés à poursuivre leur mouvement de contestation en faveur des réformes politiques. Les manifestations se concentrent sur la voie de Budaya, qui relie les villages chiites de l'ouest de Bahreïn à la place de la Perle de Manama. Les manifestants continuent d'exiger une monarchie constitutionnelle avec un Premier ministre élu à la place de cheikh Khalifa Ben Salmane Al Khalifa, oncle du roi, en poste depuis 40 ans. Ce qui met fin au contrôle de la dynastie sunnite des Al Khalifa sur l'émirat où elle règne depuis 250 ans. Beaucoup de chiites, qui ont pris part à la contestation de février et mars, ont perdu leur emploi. D'autres ont connu la détention. «Nos revendications restent les mêmes : le gouvernement doit partir et de nouvelles élections doivent avoir lieu», a indiqué Hadi Al Moussawi, ex-élu du Wefaq, le principal mouvement chiite, qui était la première force politique au Parlement avec18 sièges sur les 40 convoités avant que ses députés ne démissionnent. Et de poursuivre : «Nous n'allons pas renoncer et nous voulons rester pacifiques» en observant que les contestataires sont divisés en un courant qui veut des réformes et un autre qui appelle au renversement de la dynastie sunnite. «Mais personne n'est contre une approche démocratique prévoyant un référendum» sur la question, a-t-il relevé. «C'est inconcevable que les gens se calment sans avoir rien obtenu», a estimé Matar Matar, un autre élu du Wefaq. Selon la commission d'enquête indépendante, la répression en février en mars a fait 35 morts, dont 30 civils. Onze autres personnes ont été tuées depuis, alors que 2929 personnes au total ont été arrêtées, 700 parmi elles sont encore en détention. Les licenciés veulent reprendre leurs postes Par ailleurs, des dizaines de chiites licenciés lors de la contestation du régime ont manifesté hier pour réclamer la levée des sanctions les frappant, au lendemain de l'annonce par les autorités de la réintégration de 181 fonctionnaires. Des médecins, dont certains sont passibles de peines allant jusqu'à 15 ans de prison, des infirmières, des enseignants, des employés des secteurs du pétrole et de l'aluminium ainsi que des fonctionnaires ont manifesté devant le siège du ministère du Travail à Issa Town, dans la banlieue de Manama. De nombreux employés chiites ont été licenciés ou indéfiniment suspendus de leurs fonctions dans la foulée de la brutale répression de la contestation de février et mars, animée par des chiites. Selon le syndicat des travailleurs de Bahreïn, 377 fonctionnaires ont été licenciés, et 171 toujours suspendus. A Alba, la compagnie publique d'aluminium, 405 salariés ont été suspendus. Comme 20 professionnels de la santé sont condamnés à des peines allant de 5 à 15 ans de prison par un tribunal d'exception, mais dont le procès a été récemment renvoyé devant un tribunal civil. Ils sont jugés sous diverses accusations, en particulier l'occupation du complexe hospitalier Salamaniya, situé à quelques kilomètres de la place de la Perle à Manama, où les protestataires ont campé près d'un mois en février et mars. Ils sont aussi accusés de possession d'armes. Vingt-huit autres professionnels de la santé sont également poursuivis pour participation à des manifestations. Mardi, les autorités ont annoncé la réintégration au 1er janvier de 181 fonctionnaires licenciés, et assuré que le dossier était désormais clos. Dans un rapport rendu fin novembre, une commission d'enquête indépendante a recensé 1624 employés licenciés ou suspendus lors de la répression de la contestation. Pour réprimer les manifestants au Bahreïn, l'Arabie Saoudite a envoyé en mars plus de 1000 soldats à Manama. Les Emirats arabes unis y ont dépêché 500 policiers et le Koweït a mobilisé une unité maritime. Cet arsenal fait partie des forces communes d'intervention du Bouclier de la péninsule créé en 1984 par les monarchies du Conseil de coopération du Golfe (CCG), à savoir l'Arabie Saoudite, Bahreïn, les Emirats arabes unis, Koweït, Oman et Qatar.