Le syndicat des magistrats a appelé, hier, à «une mise à niveau» des salaires du 1er président et du procureur général de la Cour suprême, ainsi que du président et du commissaire du Conseil d'Etat, et ceux des plus hauts cadres du pouvoir législatif, à savoir les présidents de l'APN et du Sénat. Dans la déclaration finale ayant sanctionné la réunion du Conseil national de l'organisation, les magistrats ont interpellé le président de la République, l'exhortant à «revoir à la hausse» leur régime indemnitaire, sans pour autant préciser de seuil. «Il n'est pas question de rester en marge de toutes les augmentations salariales décidées ces dernières années, notamment celles dont ont bénéficié les cadres supérieurs de l'Etat. Nous avons interpellé le Président en tant que premier magistrat du pays, pour qu'il renforce le pouvoir judiciaire à travers de nouveaux mécanismes. Des propositions dans ce sens ont été déjà soumises à la commission Bensalah», a affirmé M. Aïdouni. Moussa Boussouf, membre du bureau national, a indiqué pour sa part : «Il n'y a pas de raison pour que le président du Sénat puisse avoir quatre ou cinq fois le salaire du président de la Cour suprême, la plus haute institution de la justice. Si l'on part du principe qu'il y a égalité entre les pouvoirs judiciaire et législatif, il faut aussi que ceux qui les représentent aient le même statut avec les mêmes avantages…» Reprenant la parole, le secrétaire général a noté que cette revendication avait été soumise à la commission Bensalah, dans le cadre de ses consultations. Interrogé sur les «ingérences» de la chancellerie et sur les «pressions» dont souffrent les magistrats, M. Aïdouni a été catégorique : «Nous n'avons pas été saisis pour de telles pratiques. Le juge est souverain et ne décide qu'en son âme et conscience.» Abondant dans le même sens, Moussa Boussouf, membre du bureau national, a expliqué qu'il y a eu une «mauvaise interprétation» des instructions du ministre de la Justice, concernant les renvois des affaires au niveau des juridictions. «La note fait état d'une moyenne de 5 renvois pour les affaires civiles et de 3 pour les affaires pénales. Il n'a pas dit que c'est une obligation. Lorsqu'une affaire mérite d'être ajournée une dizaine de fois, il faut juste que ce soit motivé», a relévé M. Boussouf. Pour ce qui est du volume des affaires traitées, M. Aïdouni reconnaît qu'il reste assez élevé, du fait du manque de magistrats estimé à près de 4000. «C'est vrai que 200 à 300 dossiers pour un magistrat de siège et 40 à 50 dossiers pour un juge d'instruction, c'est énorme. Nous manquons d'effectifs. Nous allons atteindre les 6500 juges d'ici 2014, et nous espérons qu'un autre programme de recrutement sera engagé juste après pour combler le déficit. Ce qui aura une incidence directe sur le volume de travail.» Evoquant les critiques relatives au recours au mandat de dépôt, M. Aïdouni a déclaré : «La détention provisoire est minime. Les chiffres de l'administration pénitentiaire le confirment, puisque moins de 11% de la population carcérale est concernée. Le tribunal le plus important en Algérie est celui d'El Harrach, pourtant, le nombre de détenus en attente de procès est très faible.» Il se demande pourquoi l'intérêt n'est jamais porté sur les droits des victimes. A propos de la nouvelle mission de contrôle des élections, M. Aïdouni a reconnu «la lourde responsabilité» que les juges auront à assumer. «C'est une nouvelle expérience pour nous. Elle nous honore beaucoup, car elle démontre que l'Etat fait plus confiance à la justice qu'à l'administration. Nous espérons être à la hauteur de cette mission. Même avec 60 ou 70% de réussite, nous pensons que cela va être une vraie victoire, pour une première expérience, en attendant de la parfaire dans les années à venir.» Il a affirmé, par ailleurs, qu'il n'a aucune idée des conditions de mise en œuvre de ce contrôle, puisque, a-t-il dit, le décret d'application n'a pas encore été promulgué. Il a tenu à préciser que la réunion du conseil national n'a rien à voir avec le discours du président de la République lors de l'ouverture de l'année judiciaire. «Nous restons une organisation revendicative sans pour autant altérer notre mission au service de l'Etat de droit…»