Les devoirs, obligations et responsabilités des magistrats seront débattus la semaine prochaine lors d'un séminaire international sur la déontologie. La première manifestation organisée par le Syndicat national des magistrats (SNM), depuis sa création, il y a 17 ans. Prévue les 10 et 11 juillet à Alger, elle réunira 45 juges, venus de 18 pays membres de l'Union internationale des juristes (UIJ), de l'Europe, du monde arabe, de l'Afrique et de l'Amérique latine mais aussi de l'Association du barreau américain (ABA). A l'ordre du jour, huit communications axées essentiellement sur l'éthique et la déontologie du juge, suivies de débats, puis d'un rapport de synthèse qui pourrait servir de base de réflexion sur l'enrichissement de la toute récente charte de déontologie mise en application début de l'année en cours. Il est également question de réfléchir à une charte universelle adoptée par les pays membres de l'UIJ. Lors d'une conférence de presse animée au siège de la résidence des magistrats à Alger, Djamel Aïdouni, président du SNM, explique que cette rencontre entre dans le cadre de la politique « d'ouverture sur le monde » adoptée par l'organisation depuis quelques années, notamment depuis sa demande d'adhésion à l'UIJ, et qui passera au vote le 27 septembre prochain par l'assemblée générale, prévue en Norvège. Selon lui, la déontologie est un « sujet d'actualité qui appelle à une concertation et à une convergence des idées à travers tous les pays ». Il s'agit d'une rencontre « très particulière », dit-il, dans la mesure où les participants, « tous des magistrats, viennent en toute indépendance de leur gouvernement, puisqu'ils participent à ce séminaire à leurs frais personnels ». Interrogé sur les pressions exercées sur les juges en Algérie, notamment à travers le volume de travail excessif, M. Aïdouni renvoie la balle vers le manque de magistrats sur le terrain, tout en relevant que cette situation n'est constatée que dans les grandes villes. « Nous avions été les premiers à dénoncer le nombre important des affaires que le juge est tenu d'examiner quotidiennement. Lorsque nous traitions une quarantaine de dossiers par jour, les gens ont critiqué les lenteurs dans les jugements. Nous avons augmenté le nombre pour absorber le retard, les critiques sont devenues plus acerbes. Nous aurions aimé que ceux qui dénoncent les pressions proposent des solutions pour soulager les juges », déclare M. Aïdouni, en réponse à une question relative aux propos des avocats selon lesquels les juges exercent sous la pression. Effectif insufisant Pour M. Aïdouni, « jamais un magistrat n'a rendu un jugement bâclé », juste parce qu'il a un volume de travail important. « Le juge sait que les erreurs professionnelles sont comptables devant le conseil de discipline. Il ne peut risquer sa carrière », dit-il. A propos des nombreuses critiques, surtout des ONG internationales à l'égard de la justice algérienne, présentée comme étant en deçà des standards internationaux, M. Boussouf, chargé des relations extérieures du SNM et membre du Conseil supérieur de la magistrature, explique que le problème actuel des magistrats n'est pas dans leur capacité ou aptitude à juger une affaire, mais dans le volume du travail qui leur est soumis. « Nous avons saisi la chancellerie à plusieurs reprises et tout le monde sait que le manque d'effectif ne peut être résorbé en l'espace de quelques années. Nous sommes entre le marteau et l'enclume dans cette situation. La norme internationale de 1 magistrat par 2000 habitants, est impossible à atteindre y compris par les pays les plus avancés en la matière du fait du budget important qu'elle nécessite ». M. Aïdouni souligne en outre que les nouveaux allégements de certaines procédures vont contribuer à dépasser cette situation, estimant par ailleurs que celle-ci n'est pas propre à l'Algérie. Abondant dans le même sens, M. Boussouf cite quelques exemples, comme celui de la Belgique où le délai d'évacuation d'une affaire est de 7 ans. « Ce pays cumule 40 000 dossiers en stock, dont 28 000 sont liés aux affaires des émigrés. Le même délai est également adopté en France du fait du manque d'effectif. C'est aux pouvoirs publics de régler ce problème car la justice est un service public », s'exclame M. Boussouf en se demandant si ceux qui critiquent les magistrats « respectent eux-mêmes les standards internationaux ». Il relève que le séminaire, organisé sous le haut patronage du premier magistrat du pays, « est une tribune » offerte au syndicat pour « réoccuper les espaces perdus » pendant toute la période de crise que le pays a connue. Il cite, à ce titre, la participation du président honorifique de l'Union à cette rencontre, de l'adjoint du secrétaire général et du responsable pour la région Afrique. A signaler que l'ONG est représentée dans les cinq continents et possède un siège comme observateur auprès de l'ONU.