Le risque est en effet grand de voir ce pays, en proie à une flambée de violence, «s'irakiser». Et pour cause, un second attentat-suicide a fait au moins 26 morts, hier, dans un quartier historique du centre de Damas, deux semaines après une attaque similaire. Pour le régime de Bachar Al Assad, soucieux de faire diversion, l'imputation est toute désignée : les terroristes, mais forcément ceux d'Al Qaîda. Cette fois, le régime joue lui aussi la contre-propagande en désignant des terroristes qui se recrutent dans l'opposition syrienne. L a théorie du complot ourdi de l'extérieur était-elle, hier, un leitmotiv ? Pour l'opposition, il ne fait aucun doute que ce deuxième attentat meurtrier porte la signature du bras armé du régime. Le fait est que le jour même de ce drame, les forces de sécurité, fidèles au dictateur Al Assad, ont continué à canarder les manifestants civils. Au moins huit d'entre eux ont été tués par les tirs des forces de sécurité à travers le pays, où des dizaines de milliers de personnes ont manifesté pour réclamer que l'ONU intervienne pour faire cesser la répression sanglante de la révolte contre le régime de Bachar Al Assad. «Un kamikaze s'est fait exploser à 10h55, dans le quartier de Midane à Damas, qui est densément peuplé (...), afin de tuer le plus grand nombre possible de civils», a annoncé l'agence de presse officielle Sana, en citant le ministre de l'Intérieur, le général Mohammed Al Shaar. Selon le ministre, l'attaque a fait 26 morts et 63 blessés. L'attentat a eu lieu «près de l'école Hassan Al Hakim, dans un lieu bondé», a précisé la télévision syrienne en diffusant des images crues des lieux, montrant des restes de corps, des gravats jonchant le sol, des flaques de sang et des voitures calcinées aux vitres brisées. Le commandement général du parti Baas, au pouvoir depuis 1963, a affirmé que l'attentat était «un acte terroriste faisant partie du complot ourdi contre la Syrie» et qu'il coïncidait «avec des déclarations faites par des symboles de l'opposition syrienne et par des responsables français et américains», selon la télévision syrienne. Scénario à l'irakienne Quant aux Frères musulmans syriens, auxquels avait été imputé le premier attentat, ils ont expressément accusé le régime. «Nous faisons porter au régime, à ses services de sécurité et à ses gangs l'entière responsabilité de ce crime», a insisté leur porte-parole, Zouheir Salem, dans un communiqué. «Nous demandons une enquête internationale et arabe sur cette explosion, avant que les criminels ne cachent les preuves de leur crime», a-t-il ajouté. La télévision privée Dounia, proche du pouvoir, a indiqué qu'une équipe d'observateurs arabes s'était rendue sur le lieu de l'explosion, mais qu'aucun d'entre eux n'avait fait de commentaire. Les explosions sont survenues au lendemain de l'arrivée d'une délégation pour préparer la mission des observateurs de la Ligue arabe chargés de veiller à l'application du plan arabe de sortie de crise, qui prévoyait en premier lieu l'arrêt des violences. L'opposition a qualifié cette mission d'«échec» et appelé à une aide de l'ONU, estimant que la politique «molle» de la Ligue arabe à l'égard du régime avait conduit «à une hausse des morts dans la répression». Le comité ministériel arabe chargé du dossier syrien doit se réunir demain au Caire pour entendre le rapport du chef des observateurs. Parallèlement, des dizaines de milliers de manifestants ont défilé hier après-midi dans de nombreuses villes, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH) et les Comités locaux de coordination (LCC), qui chapeautent la mobilisation sur le terrain.