Le forfait du SA Mohammadia, vendredi à Bel Abbès, relance le débat sur la consistance du chapitre du professionnalisme en Algérie. Instauré depuis la saison dernière, ce dernier est aujourd'hui confronté à son premier et gros accroc. Une équipe professionnelle qui ne se présente pas sur le terrain à l'heure du match, pour des raisons qui ne sont pas expressément prévues par le règlement et qui sont liées à un empêchement majeur, exemple une catastrophe, un grave accident de circulation survenu avant d'arriver dans la ville où la rencontre est programmée, n'est pas un fait anodin. Surtout, s'agissant d'une équipe professionnelle comme c'est justement le cas du SAM. Les clubs pros dans leur écrasante majorité ne sont pas à l'abri de ce qui est arrivé au SAM. Cette regrettable situation est la conséquence directe de la non-préparation des clubs au passage au statut professionnel. L'opération de passage s'est effectuée sans aucune garantie contre ce type de risque qui pèse sur le gros peloton de la course (Ligues 1 et 2 confondues). Aujourd'hui, des clubs jouissent du label pro alors qu'en réalité ils ne disposent d'aucun des attributs de cette catégorie. Leur quotidien n'a pas évolué d'un iota. Ils demeurent des groupuscules budgétivores avec mains tendues et bouches ouvertes en direction des pouvoirs publics et des instances qui les représentent. Nulle part au monde, un club professionnel ne vit uniquement de subventions comme c'est, malheureusement, le cas en Algérie. Dans le contexte actuel, il est utopique de croire que le professionnalisme est viable en Algérie à moins que la générosité de l'Etat soit plus marquée pour soutenir à bout de bras des sociétés (clubs) privées sur tous les plans. Chez nous, le football est très loin d'être une entreprise rentable. Le socle sur lequel repose l'économie algérienne et ses règles ne plaident, mais alors pas du tout, en faveur de l'instauration du professionnalisme. La compréhension même de la notion de professionnalisme a été dévoyée. Les autorités locales, elles-mêmes, ne jouent pas le jeu dans la mesure où parfois le pouvoir local, wali, chef de daïra, président d'APC volent de manière inégale au secours de sociétés sportives par actions (SSPA) qui présentent un chapitre dépenses volumineux (salaires, primes…) sans aucune commune mesure avec leur réalité financière. Après une année et quelques mois d'exercice, c'est pratiquement la banqueroute partout. Excepté peut-être un club (USM Alger) dont l'actionnaire majoritaire dispose de moyens qui lui permettent de faire face, tous les autres se retournent vers les généreuses mamelles du Trésor public pour poursuivre, pour beaucoup, leurs très lucratives activités à la tête des SSPA. Au mois de mai dernier, la Ligue de football professionnel (LFP) avait rappelé aux clubs pros l'obligation de présenter les comptes sociaux avant la fin de l'été. Qui l'a fait ? Et pourtant, ils se sont engagés cette saison sans encourir la moindre sanction. En attendant, leur déficit se creuse de plus en plus. Le plus dramatique, c'est qu'aucune solution ou parade n'a été préconisée en cas de faillite. Ceux qui ont créé la société, acheté des actions ont un réflexe commun. Ne rien lâcher, fermer systématiquement toutes les voies d'accession au statut d'actionnaire. L'ouverture du capital, surtout en période de crise, peut s'avérer être une solution transitoire pour sauver la SSPA. Résultat des courses, les actionnaires en place affichent tous leur détermination à ne pas quitter le navire si les candidats repreneurs n'allongent pas les dizaines de millions de dinars comme remboursement de leurs frais de dépenses qui, par hasard, ne peuvent être certifiés puisque la présentation des bilans est à chaque fois renvoyée aux calendres grecques. Dans le cas de ces SSPA, pratiquement en faillite, le candidat repreneur achète quoi ? Les actions, qui ne valent rien, ou la dette de ces pseudos clubs professionnels ? Le moment est venu d'arrêter cette plaisanterie avant que l'argent du contribuable ne serve encore à consolider d'autres fortunes bâties sur des mirages. Une année après son lancement, le professionnalisme s'est déjà essoufflé. Il est plus raisonnable de repenser le professionnalisme avec des critères plus réalistes. De toute façon, ce ne sont pas tous les clubs qui ont besoin d'une licence pro (CAF-FIFA) pour rester en vie et participer aux compétitions locales. Ils sont une petite poignée seulement qui ont, véritablement, besoin de ce sésame qui leur permet de participer aux compétitions de la CAF. Ceux-là, il faut les aider à accéder à ce statut, car ils représentent le football algérien dans les compétitions continentales. Les autres feraient mieux de s'occuper de la formation des jeunes au lieu de s'adonner au difficile exercice de jouer aux riches sans avoir le sou.