Les violences apparues dimanche à Beyrouth, suite à la publication des caricatures du Prophète Mohamed (QSSSL) dans plusieurs quotidiens européens, ont été le fruit d'importantes condamnations, aussi bien chez les politiques que dignitaires religieux du pays. La thèse du complot syrien refait apparition au lendemain des émeutes antidanoises qui ont fortement secoué la capitale libanaise. Hier, le gouvernement libanais a présenté ses excuses au gouvernement danois. Au même moment, plusieurs ministres ont montré du doigt la Syrie et évoqué sérieusement l'éventualité de porter plainte auprès du Conseil de sécurité de l'ONU. Le Premier ministre Fouad Siniora a déclaré que « plus de la moitié des quelque 200 personnes arrêtées sont des Syriens et des Palestiniens » et que les actes de violence qui ont eu lieu dimanche à Beyrouth « font partie du plan de déstabilisation dont est victime le Liban depuis plusieurs mois », faisant allusion à la vague d'attentats qui touche le pays depuis octobre 2004. La majorité au pouvoir a pour sa part décidé de « ne pas anticiper les conclusions de l'enquête ». Les organisateurs de la manifestation, notamment le mouvement islamiste Jamâa Islamiya, ont affirmé que des fauteurs de troubles s'étaient infiltrés dans le mouvement qui se voulait au départ pacifiste. Lundi, une réunion spéciale s'est tenue au Parlement, axée sur le dialogue national. Nabih Berry, président de la chambre, a insisté dans son discours sur l'importance de la paix civile, qui dépend, selon lui, du principe politique de la coexistence confessionnelle. Le parti chiite Amal, présidé par Nabih Berry, et le Hezbollah ont également dénoncé les violences survenues dimanche dans le quartier chrétien d'Achafieh. Le gouvernement libanais a pris la décision d'« accélérer l'enquête sur la participation des services de renseignements étrangers dans les incidents », afin de déterminer une éventuelle tentative de déstabilisation du pays. Alors que les écoles chrétiennes sont restées fermées hier, les dignitaires religieux musulmans ont condamné les violences à l'unanimité. Une délégation de Dar Al Fatwa s'est rendue auprès du patriarche maronite Nasrallah Sfeir, afin de présenter ses excuses. Les représentants sunnites ont salué « la retenue dont ont fait preuve nos frères chrétiens dans le quartier d'Achrafieh » en ne répondant pas aux provocations. Démission du ministre de l'Intérieur Dimanche, le ministre libanais de l'Intérieur, Hassan Al Sabaa, a déposé sa démission lors d'une réunion extraordinaire du Conseil des ministres, après avoir été violemment critiqué par des alliés chrétiens de la majorité parlementaire. Il s'est justifié en affirmant que seul l'usage des armes aurait pu faire reculer les manifestants, « ce qui aurait provoqué un carnage dont j'ai refusé de porter la responsabilité ». Le quotidien L'Orient-Le Jour a accusé hier le ministre de l'Intérieur, déclarant que « s'il avait eu le plus élémentaire bon sens, (il) aurait centuplé les cordons de sécurité ». « La riposte du gouvernement libanais, si lente, si désorganisée, relève les insuffisances du ministre de l'Intérieur. La situation est tragique lorsque la violence met en danger des vies, mais elle est encore plus tragique quand une violence prévisible n'est pas anticipée », affirmait pour sa part le quotidien libanais Daily Star. Quoi qu'il en soit, le bilan a été partout le même. Le spectre de la guerre civile continue de menacer ce pays, encore fragile.