Personne n'a pu rentrer ou sortir de l'entreprise, dont la cellule de sécurité interne a instruit les travailleurs de ne pas quitter leur lieu de travail à la pause déjeuner de 13h. Le siège de l'Entreprise nationale des travaux aux puits (ENTP) est quasi-quotidiennement pris d'assaut par les sans-emploi de Hassi Messaoud. Hier, ils étaient des dizaines à bloquer les trois points d'accès du siège. Personne n'a pu rentrer ou sortir de l'entreprise dont la cellule de sécurité interne a instruit les travailleurs de ne pas quitter leur de travail à la pause déjeuner de 13h. Une situation qui gêne de plus en plus les travailleurs soumis au système de relève, qui sont pénalisés à l'heure où ils doivent reprendre des forces. D'ailleurs, pour cette fois-ci, nombre d'entre eux n'ont pas daigné suivre les instructions de la cellule de sécurité. Pour eux qui se lèvent avant tout le monde, réintégrer la base de vie pour prendre un déjeuner bien mérité après six heures de labeur, se reposer une petite demi-heure pour reprendre le travail jusqu'à 19h est un rythme quotidien que rien ne devrait venir chambouler. Un des travailleurs de cette entreprise des services pétroliers nous a informé que pour la première fois depuis le commencement des protestations de chômeurs à Hassi Messaoud, les manifestants qui avaient pour habitude de bloquer la route principale, ont décidé de quadriller les trois issues de l'ENTP, dont le siège se trouve sur l'axe principal de la ville, celui d'où arrivent tous les passagers transitant par Hassi Messaoud ou se rendant vers Illizi et In Amenas. Notre interlocuteur était indigné par cette situation : «C'est vrai que nous ne sommes pas autorisés à prendre les moyens de transport mis à notre disposition par l'entreprise, mais nous ne pouvions tout de même réintégrer la base de vie à pied.» Cette fois-ci, les émeutiers n'ont pas voulu laisser sortir les travailleurs, une manière de faire pression sur l'administration de l'ENTP, selon quelques témoins qui ont pris part aux négociations qui se sont déroulées devant la porte principale de l'entreprise. Des reproches, nombre de jeunes sans emploi en ont vis-à-vis des sociétés nationales qu'ils accusent plus que jamais de pratiques douteuses, notamment à l'ENTP qui agirait, selon eux, en connivence avec le bureau de main-d'œuvre de Ouargla pour recruter des personnes parachutées, souvent issues de quartiers bien déterminés voire de familles précises qu'il serait facile de repérer sur les listings des embauches. L'ENTP a d'ailleurs récemment recruté 120 personnes et aucune des recrues ne figurait parmi les sans-emploi de Hassi Messaoud. D'après un manifestant, «il est notoire que l'ENTP procède régulièrement aux recrutements familiaux et tribaux avec un quota spécifique destiné aux connaissances de prestige évidemment.» Un autre rétorque que «les directeurs ainsi que la plupart des responsables et décideurs ont recruté plusieurs membres de leur famille, ceci est connu de tous, on peut les nommer et le listing du personnel de l'ENTP peut bien attester ces faits.» Ce n'est donc pas seulement la proximité de la route principale et la facilité d'accès de l'ENTP qui motive ce blocage programmé. Les jeunes manifestants ne s'en cachent plus, ils soutiennent un discours des plus virulents vis-à-vis des responsables qu'ils croisent et lancent des boutades aux travailleurs voulant sortir de la base du 20 Août 1955. Les travailleurs de l'ENTP ont, quant à eux, essayé d'expliquer qu'ils comprenaient parfaitement la position des jeunes, d'autant plus que plusieurs d'entre eux comptent des chômeurs dans leurs foyers. Les salariés ne comprennent toutefois pas l'utilité d'emprisonner tout le personnel de l'ENTP sur leur lieu de travail. Les négociations entreprises entre les sans-emploi et les travailleur de l'ENTP n'ont pas abouti à une entente pacifique, le ton est vite monté d'un cran, laissant subitement place aux échanges de jets de pierres entre les deux parties opposées. Finalement, les agents de l'ENTP ont réussi à forcer la ligne des manifestants non sans avoir été victimes de lapidation. Plusieurs d'entre eux ont été blessés par les coups de bâtons, les jets de pierres et des coups de poing. Réjouis par leur petite prouesse qui a levé l'embargo sur leur entreprise, certains travailleurs de l'ENTP étaient contents de voir les manifestants prendre la fuite, libérant ainsi l'ensemble des travailleurs restés prisonniers dans leurs bureaux.