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Cinéma : une histoire (trop) officielle
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Publié dans El Watan le 16 - 03 - 2012

150 scénarios de films abordant la guerre de Libération nationale ont été soumis au ministère de la Culture à la faveur d'un appel à scénario lancé en juin de l'année écoulée. Promulguée en février 2011, la loi régissant la cinématographie déroute les professionnels. Le droit de regard du «gouvernement» sur les films historiques et des procédures vagues sèment le trouble. Enquête.
Flash-back : février 2011. La nouvelle loi sur le cinéma est promulguée. D'emblée, un article déroute, il porte le n°6 et exige que tout film traitant de la guerre de Libération nationale soit «soumis au préalable à l'approbation du gouvernement». Sans plus de précisions. Le flou qu'entretient la loi défraie la chronique parmi les professionnels du cinéma. «Ce n'est pas par hasard si cette loi a été promulguée à l'aube du cinquantenaire de l'indépendance. Cette loi est faite pour mettre la main sur l'histoire», déclarait le réalisateur Bachir Derrais, il y a quelques mois, aux prémices de l'enquête menée par El Watan Week-end. Une année plus tard, aucun décret d'application n'ayant été publié au Journal officiel concernant ces aspects (à part le texte régissant le Fonds de développement de l'art, de la technique et de l'industrie cinématographiques (Fdatic), publié dans le JO du 4 mars 2012).
Alors que les préparatifs de la célébration du cinquantenaire de l'indépendance sur grand écran vont bon train, les porteurs de projets sont perdus. Bachir Derrais dénonce une loi «ambiguë» et opaque. «On ne sait pas qui doit décider pour ce genre de films, il n'y a aucune transparence.» Seule certitude : tout projet de film historique se retrouve, à un moment donné, confronté à l'Etat. Que ce soit pour le financement, les autorisations de tournage ou l'exploitation du film fini. Les professionnels du cinéma s'accordent à dire qu'il est quasi impossible de mener à bout un film sans l'aide financière de l'Etat, particulièrement s'il est à caractère historique. La dépendance du secteur du cinéma du financement de l'Etat s'explique par les sommes faramineuses qu'exige la production d'un film. Pour Lotfi Bouchouchi, producteur, la réalisation d'un film contemporain, qui n'a même pas à obéir aux exigences d'un film historique, représente près de 40 à 50 millions de dinars. Le producteur associé de Viva Laldjérie (Nadir Moknèche, 2004) estime que l'apport du Fdatic représente, selon lui, 20 à 30% du coût total d'un long métrage. Cependant, à l'occasion du cinquantenaire, un fonds spécial a été prévu…
Clientélisme…
Depuis plusieurs mois, Bachir Derrais se bat pour porter sur grand écran deux projets de films, le premier retraçant le parcours de Zighout Youcef, dont le scénario est signé Rachid Boudjedra, et le second autour du personnage de Larbi Ben M'hidi par Mourad Bourboune. Malgré l'accord de la commission du Fdatic, il a été prié de déposer son dossier auprès d'une commission ad hoc, présidée par le réalisateur Moussa Haddad, chargée d'étudier les scénarios dédiés à la Révolution du 1er Novembre, à l'occasion du cinquantenaire de l'indépendance de l'Algérie. Cette commission, placée sous la tutelle du Centre national de cinématographie algérienne - et donc sous la tutelle du ministère de la Culture - traite tous les projets liés au «cinquantenaire», exception faite des commandes directes du ministère des Moudjahidine, qui, par ailleurs, n'a pas voulu répondre à nos questions. La ministre de la Culture, Khalida Toumi, précise que seuls les scénarios qui citent nommément un acteur de la guerre de Libération se verront soumis à l'autorisation du ministère des Moudjahidine, et ce, au nom du respect de la mémoire ainsi que pour protéger les familles et ayants droit. En effet, l'article 57 de la loi du 5 avril 1999, relative au moudjahid et au chahid, permet «le constat d'authenticité des textes et des œuvres audiovisuels, écrits, filmés ou techniques ayant trait à la révolution de Libération nationale (…) avant leur présentation et/ou leur publication…»
L'argent, le nerf de la guerre
In fine, une bonne partie de l'histoire tourne autour de l'argent. Pour le gouvernement et pour le département de Khalida Toumi, la gestion de l'argent public, c'est-à-dire dans ce cas précis, l'aide à la création ne peut se faire en dehors de toute réglementation, sinon, «ce seront toujours les mêmes qui se partageront le gâteau». Car, selon certaines sources officielles, les professionnels ne s'inquiéteraient pas pour les bonnes raisons. Le vrai problème ? Que le ministère des Moudjahidine soit devenu un producteur ayant bénéficié d'un budget cinéma conséquent bien qu'il s'agisse… d'une administration ! Or, l'octroi exceptionnel d'argent - à l'occasion du cinquantenaire - à ce ministère, qui lui permet de faire des commandes directes, sans passer par aucune commission de lecture, peut facilement favoriser le clientélisme.
Capitaux étrangers ?
«Si on avait une autorisation de tournage, on pourrait au moins faire appel aux capitaux étrangers», s'insurge Derrais. Dans l'incapacité de réunir les fonds nécessaires, de plus en plus de cinéastes se tournent vers l'étranger pour financer leurs films. Option «intéressante, mais contraignante», selon Bouchouchi qui évoque les exigences d'une telle entreprise. «Pour qu'un film soit retenu pour l'avance sur recette par le Centre national de cinématographie français, il doit compter 50% du dialogue en langue française et véhiculer des idées propres à la culture occidentale.» Et de prendre pour exemple deux de ses coproductions :Viva Laldjérie et Barakat (Djamila Sahraoui, 2006). Pour sa part, Derrais commente : «Ce n'est pas facile. La France, par exemple, est très hésitante et prudente lorsqu'il s'agit de la révolution…» Mohamed Bensalah, réalisateur et critique, confirme à ce sujet que «tout investisseur d'argent impose son point de vue», en prenant pour exemple «les productions de la diaspora dans lesquelles on sent qu'on essaie de plaire à ceux qui financent les films». Enfin, même en se passant du financement de l'Etat, tout réalisateur est obligé de demander une autorisation de tournage, qui exige le dépôt du scénario auprès du ministère de la Culture. D'autant que l'article 20 de la loi relative à la cinématographie stipule que «toute exploitation commerciale d'un film sur le territoire national ainsi que des supports publicitaires y afférents est soumise à un visa préalable délivré par le ministère chargé de la Culture après accord de la commission de visionnage des films».
Mainmise ?
A propos de l'intervention du ministère des Moudjahidine dans les projets du cinquantenaire, le réalisateur Mounes Khammar rappelle : «Cette période inclut deux partenaires, la France et l'Algérie. Nous avons plus de points de vue français, même lorsqu'ils dénonçaient le colonialisme. C'est un fait. Je pense que dans ce cas de figure, il est normal qu'il y ait un œil sur ces différents projets pour ne pas laisser passer des choses qui seraient discutables, avant de préciser qu'en revanche, le gouvernement ne doit pas avoir totalement la mainmise.» Le producteur Rachid Dechemi abonde dans le même sens : «Cela peut paraître étonnant que le ministère des “anciens'' Moudjahidine puisse financer le cinéma, mais juridiquement, il en a le droit, car il y a une structure au sein du ministère qui le lui permet. Il produit des films “de commande'' indirectement, et comme tout producteur, celui-ci a un droit de regard sur le produit. Il ne s'agit pas de subventions telles que le Fdatic», explique-t-il. Pourtant, souligne Bachir Derrais : «Il n'y a pas, à ma connaissance, de service cinéma ou de commission dans ce ministère.»
Idem pour Belkacem Hadjadj, producteur et réalisateur d'El Manara : «Ce n'est pas normal que ce ministère devienne une source de financement importante du cinéma.» Le réalisateur Yanis Koussim insiste : «Nous le connaissons ce gouvernement, alors ne soyons pas surpris. Ils veulent tout contrôler, d'où cette continuité logique !» Pour sa part, Belkacem Hadjadj nuance : «Je considère que la vigilance est de rigueur, je prétends être un créateur et je considère que l'acte de créer ne va absolument pas avec l'atteinte à la liberté d'expression.» Bachir Derrais va plus loin : «Le fait de ne pas débloquer les moyens prouve qu'on a peur de nos films. On est dirigés par un système qui a assis son pouvoir sur une légitimité révolutionnaire qu'il n'a pas. On s'en rend compte lorsqu'on travaille sur la vie de personnages historiques», déclare-t-il en brandissant le manuscrit du scénario Larbi Ben M'hidi. Insistant sur l'importance pour les Algériens de se «réapproprier leur histoire», il lâche : «Vous ne trouverez jamais la véritable histoire de Ben M'hidi ou de Abane Ramdane dans les manuels scolaires…»
Mohamed Bensalah, lui, rappelle que les dispositions de l'article 6 «ont profité d'une certaine conjoncture. Un certain nombre de personnes ont abordé l'histoire en méconnaissant chiffres, dates et personnages et en falsifiant une partie de notre histoire». Cependant, le chroniqueur et enseignant-chercheur à l'université d'Oran estime que l'article 6 est «dangereux, car il donne un point de vue partiel et partial de l'histoire, en substituant au cinéaste une commission qui s'érige en détenteur de la mémoire et de l'imaginaire collectif. Ce n'est pas un avis consultatif, mais un véritable diktat. Une censure qui ne dit pas son nom.» En effet, si l'obligation de passer par une commission est justifiable pour l'obtention d'un financement par un organisme d'Etat, la dépendance entière du cinéma algérien des subventions étatiques confère à ces commissions un grand pouvoir et permet de filtrer les œuvres qui verront le jour.


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