«Je m'oppose fermement à toute forme d'intimidation à l'égard des journalistes», s'est exclamé hier Nacer Mehal, ministre de la Communication au sujet de la violence policière dont ont été victimes deux journalistes en plein exercice de leur fonction. L'ancien D.G. de l'APS s'est exprimé au centre des conventions d'Oran, invité par le Forum des citoyens qu'organise régulièrement le quotidien d'information Ouest Tribune. Il a déclaré s'être d'abord renseigné, puis avoir confirmé qu'il y a eu effectivement un incident brutal avant de témoigner de sa sympathie envers les deux victimes et leurs directeurs respectifs. «La DGSN a pris les sanctions nécessaires et je m'en félicite», a-t-il ajouté en précisant que c'est «le général major El Hamel lui-même qui a ordonné ces sanctions». A l'origine, Nacer Mehal, qui a souhaité que ces genres de comportements ne se reproduisent plus, devait donner une conférence sur les perspectives de la communication en Algérie. Son intervention a concerné les contours de la nouvelle loi sur l'information et la communication comme moyen de développement social culturel et économique. «Je suis le seul ministre à oser critiquer la télévision algérienne», se vante-t-il en outre et, maintenant qu'il la connaît de l'intérieur, il trouve même que c'est un miracle si elle continue à fonctionner. Il estime qu'elle ne dispose ni de grands ingénieurs, ni de grands réalisateurs, encore moins de grands designers pour rendre attractive son image. Avec 70 métiers recensés et qui restent à réhabiliter, M.Mehal parle d'un véritable «plan Marshall» à mettre en œuvre pour la réhabiliter et la réconcilier avec les téléspectateurs algériens, actuellement bombardés de l'extérieur. Tenant compte des dernières émissions caractérisées par une liberté de ton peu ordinaire, le ministre promet plus de débats contradictoires et estime que, désormais, il n'y a plus de tabous mais dans le respect des lois, de l'éthique et de la déontologie. «Ce n'est qu'un démarrage, il faut beaucoup d'efforts pour redresser la barre mais je confirme la volonté du gouvernement d'aller vers plus d'ouverture, du moins tant que je suis là, c'est-à-dire jusqu'au 11 mai (au lendemain du scrutin législatif)», explique-t-il en mettant en avant un exemple donné à titre illustratif, la nécessité que les 5 chaînes nationales entrent en concurrence en se dotant, pourquoi pas, de journaux télévisés différents, ce qui n'est pas le cas en ce moment. Reconnaissant quelques tares, il trouve aberrant que la chaîne 4 (amazighophone) continue de diffuser son JT dans cette langue à 18 heures au lieu de 20 heures. Sur un plan technique, le premier responsable du secteur de l'information promet la couverture de tout le nord du pays en télévision numérique terrestre (TNT) avant la fin de l'année. Suivront les grandes villes du Sud et, avant la fin de l'année 2013, 90% de la population bénéficiera de cette nouvelle technologie de transmission télévisuelle. Cette mutation de la télévision publique sera suivie par l'ouverture du champ au capital privé. La loi sur l'audiovisuel étant en préparation, le ministre a seulement indiqué que des garde-fous sont prévus pour éviter l'intrusion de capitaux étrangers mais aussi les tendances à la monopolisation qui seraient en contradiction avec la mission de service public des médias lourds. La définition du journaliste professionnel, le statut des journalistes suivi de la nomenclature des différentes catégories (comme le correspondant de presse ou le journaliste reporter d'images), la suppression des peines d'emprisonnement et l'aide à la formation sont autant de thématiques développées à la lumière de la nouvelle loi sur l'information qui attend ses textes d'application. Ont été également évoqués les salaires insignifiants donnés aux journalistes par certains titres de la presse écrite ainsi que les dérives constatées tels que le marchandage des agréments, une forme de «trabendisme» qui inclut les journaux qui vivent de la publicité sans existence réelle sur le marché. La grille des salaires proposée pour le secteur public est l'une des fiertés du ministre qui promet 160 000 DA de rémunération aux journalistes expérimentés en fin de carrière contre 56 000 DA pour les débutants. Le gouvernement compte également combler le vide juridique lié aux publications électroniques et assainir le sous-secteur des agences de communication (3000 recensées) qui activent dans l'anarchie totale, avec un simple registre de commerce, selon lui. «La loi, soutient-il, ne répond pas à toutes les préoccupations mais, en l'état actuel des choses, les nouveaux textes vont faire avancer le secteur de la communication et permettre de relever les défis politiques culturels et économiques auxquels est confronté le pays.»