Un groupe de pression, «la mafia de la pomme de terre», exerce son poids pour le maintien de ce légume de large consommation à des prix hors de portée, jusqu'à 120 DA dans certaines régions. C'est l'explication donnée par Salah Souilah, président de l'Union générale des commerçants et artisans algériens (UGCAA), au cours d'une réunion des mandataires des marchés de fruits et légumes qui s'est tenue hier à Alger. D'ailleurs, avance M. Souilah devant la presse, le Système de régulation des produits de large consommation (Syrpalac) mis en place depuis quelques années pour lutter contre la hausse des prix en procédant à la mise sur le marché de la pomme de terre stockée, n'a eu aucun effet : «Où est la pomme de terre stockée ? Le ministère du Commerce n'a pas actionné ce système, du moins il n'y pas de pomme de terre provenant de ce dispositif sur les étals.» Des mandataires reconnaissent que des quantités de pomme de terre stockées sont vendues à des marchands qui les écoulent au même titre que celle de saison. Elle est écoulée ensuite au compte-gouttes de façon à ce que les prix soient toujours maintenus à la hausse, explique un mandataire qui rejette en bloc les assurances de M. Benaïssa, ministre de l'Agriculture et du Développement rural, concernant la baisse des prix attendue dans les prochains jours. «Nous défions le ministre de démontrer que la pomme de terre stockée dans le cadre du Syrpalac est sur les étals !» Les groupes de pression agissent aussi sur le choix de la semence, laisse entendre M. Souilah : «La semence importée est de mauvaise qualité, d'où la hausse des prix ces dernières années.» Le ministre de l'Agriculture a assuré, il y a quelques jours, que les prix baisseraient dans trois semaines. «C'est de l'utopie si les choses restent telles quelles», répond un mandataire. Le ministère du Commerce est acculé par les mandataires réclamant une meilleure organisation du marché. L'informel, qui étouffe les marchés de gros, s'avère être le premier souci des commerçants de fruits et légumes. «C'est injuste. Les commerçants payent des charges énormes dans un marché de gros dont les accès sont fermés par les vendeurs informels, bloquant l'entrée des clients. Et en contrepartie, des vendeurs informels font le triple du chiffre d'affaires sans être inquiétés ni par les contrôleurs ni par les services de sécurité. C'est ce qui explique aussi la hausse des prix des fruits et légumes, un moyen par lequel les commerçants récupèrent leurs frais», explique Mustapha Achour, président de la Fédération nationale des marchés de gros de fruits et légumes. Les mandataires réclament aussi des explications concernant la société créée par le ministère du Commerce ayant pour rôle la gestion et la régulation des marchés de fruits et légumes. Bien que le directeur général de cette entreprise ait été installé et que les textes permettant son fonctionnement aient été mis en place, cette société n'existe que sur le papier, accusent les mandataires, qui imputent la responsabilité de «l'anarchie et l'incohérence» du marché des fruits et légumes au département de Benbada. Ce ministère est également incriminé dans les défaillances recensées en matière de gestion, de location et de réhabilitation des surfaces destinées aux grossistes. «Le cahier des charges régissant la location est dénué de toute norme logique. C'est de la pure spéculation sur les prix de réalisation», accuse M. Achour. L'UGCAA menace d'organiser une grève illimitée dans quelques jours pour protester contre l'anarchie et le mutisme du ministère du Commerce «qui continue d'ignorer les préoccupations des commerçants et des consommateurs». Cette action concernera les cinq marchés de gros du centre du pays.