Un an après la levée de l'état d'urgence, le collectif SOS Disparus établit un rapport (mis en ligne hier) sur la situation qui prévaut actuellement en Algérie. Interrogée, Nacéra Dutour, porte-parole du collectif, affirme que «malgré cette levée, la situation de répression policière est toujours là. Suite à la série de décrets présidentiels établis au cours de l'année écoulée, nous constatons que les lois sur les associations sont ni plus ni moins que des lois liberticides». Concernant les marches et autres manifestations, elle constate qu'«elles sont toujours interdites, que ce soit dans la capitale, mais même au cœur de l'Algérie profonde. Il suffit de constater comment les comités de chômeurs à Laghouat ont été sévèrement réprimés». SOS Disparus considère qu'il y a eu un changement plutôt négatif. «Nous faisons face à un véritable mépris présidentiel à l'égard des citoyens de notre pays, regrette Nacéra Dutour. La répression est encore plus violente à l'intérieur du pays, alors que ces mouvements sont pacifiques. D'un côté, nous avons des civils qui demandent tout simplement leurs droits, et de l'autre, on les frappe et on les poursuit en justice.» Elle explique ce durcissement par «la peur du pouvoir». «Il a toujours peur que la société s'organise. Nous avons essayé de la restructurer, mais cette peur émanant des hautes sphères de l'Algérie officielle est là, une peur de l'effet domino due aux révolutions arabes, d'où des réformes en trompe-l'œil.» Elle constate également que «les pays occidentaux courent vers l'Algérie, suite à la crainte d'un éventuel scénario libyen évoqué fin 2011. Pour le pouvoir algérien, il ne faut absolument pas dépasser cette ligne rouge. Cependant, note-t-elle, bien qu'Alger soit poussé en quelque sorte à opérer ces réformettes, il ne s'agit nullement d'un soutien total à l'égard du régime.» Evoquant le cinquantenaire de l'indépendance de l'Algérie, Nacéra Dutour estime que «nous sommes assez mûrs pour regarder notre histoire en face. Nous voulons la voir écrite telle qu'elle est, tant par les autorités algériennes que par les autorités françaises.» Quant à la décennie noire, qui est un peu son cheval de bataille, «il est nécessaire d'écrire cette douloureuse histoire, et pour nous et pour nos enfants, et pour nos petits-enfants, sinon, cette tragédie pourrait se reproduire à tout moment, à un plus haut niveau encore.» Une histoire qui reste à écrire, «alors que maintenant on nous demande de tourner la page. Mais il est nécessaire et urgent de construire notre passé, pour aller de l'avant», a-t-elle conclu.