Dans ce documentaire de 93 mn, Fatima Sissani aborde le vécu modeste des immigrés algériens de la première génération en zoomant sur sa mère, à travers des images saisissantes filmées en France et en Kabylie, relatant son histoire et son attachement indéfectible à sa langue et au pays natal. «Les Kabyles existent d'abord par la parole. Chaque geste, chaque instant de leur quotidien peut donner lieu à une langue de vers, de métaphores, de proverbes. Ne dit-on pas que dans ces contreforts montagneux dont ils sont les hôtes, la joute oratoire était un exercice courant ? Une réalité qu'on se représente mal lorsqu'on plonge dans la société de l'immigration où ces hommes et femmes, souvent analphabètes, sont relégués exclusivement au rang d'ouvriers et de femmes au foyer. On imagine alors mal les orateurs qu'ils deviennent lorsqu'ils retournent dans leur langue. Cette réalité, je la pressentais. J'en ai réalisé toute l'acuité, mesuré la dimension en filmant ma mère, son quotidien et son histoire. J'ai vu, fascinée, une femme arrimée à sa langue de façon indéfectible. Une femme dévoilant une oralité transmise de génération en génération. Une langue charriant éloquence et poésie pour dire l'enfance bucolique, l'exil, la pauvreté. Cette langue, c'est l'ultime bagage que des milliers d'émigrants kabyles ont emporté avec eux. Une langue pour se construire un ailleurs qui ne soit pas que l'exil», écrit la réalisatrice dans le synopsis du film. «Je suis très contente d'avoir participé à ce festival. C'est la première fois que mon film documentaire est projeté en Algérie. Et c'est important pour moi, car l'Algérie c'est le pays où je suis née et auquel je suis toujours attachée. J'étais très touchée par l'accueil chaleureux du public. La cérémonie de remise des prix fut très émouvante d'autant plus que l'Olivier d'or dans la catégorie documentaire m'a été remis par Aït Menguellet en présence de Kamel Hamadi, deux monuments de la chanson kabyle qui ont bercé notre enfance par leurs chants et aidé beaucoup d'immigrés à supporter leur exil», nous dit Fatima Sissani. Cette édition du festival du film amazigh de Tizi Ouzou a accueilli trois autres documentaires. Il s'agit de Ccnu-id tamurt n leqbayel de Ramdane Iftini et Samy Allam qui a obtenu le Prix spécial du jury ; Cheikh Sidi Bemol de Youssef Bassaid et Yacine Remi et Heureusement que le temps passe de Ferhat Mouhali. Pour rappel, la Langue de Zahra avait décroché, ex aequo avec Murmures des cimes du cinéaste marocain Ameur Chergui, le Grand prix du 5e festival international Issni N'Ourgh du film amazigh qui s'est déroulé en octobre 2011 à Agadir (sud du Maroc).