Le pétrole est-il une malédiction ou une bénédiction pour le monde arabe ? » C'est la question qui est revenue avec récurrence vendredi dernier lors d'un colloque intitulé « Pétrole et gaz, une chance pour les pays arabes ? », organisé par la Chambre de commerce franco-arabe avec la collaboration de l'Institut du monde arabe à Paris. De nombreux experts en questions pétrolières et énergétiques ont parlé des enjeux de l'or noir et du gaz naturel dans les relations internationales ainsi que les perspectives de développement qu'offrent ces ressources pour les compagnies pétrolières arabes. Rappelant que « 60% des réserves pétrolières et 30% de réserves gazières dans le monde se trouvent dans le monde arabe », Nicolas Sarkis, directeur général du Centre arabe d'études pétrolières, a jugé que « les progrès accomplis par les gouvernements arabes dans le domaine de l'économie et du social restent bien modestes au regard des potentialités productives que possèdent ces mêmes pays ». « Les pays arabes demeurent toujours sous-développés, avec un pourcentage croissant de chômage », soutient-il, avant de se demander « si le pétrole est réellement une chance ou un problème pour cette région du monde ». En ce qui concerne la consommation de cette denrée qui devient de plus en plus chère et rare, Philippe Boisseau, directeur Moyen-Orient du groupe Total, a estimé que la croissance de la demande internationale de pétrole va se maintenir avec la même cadence au moins jusqu'à 2015. Il évoque deux raisons majeures : la bonne santé des économies chinoise, indienne et américaine et de la faiblesse des exploitations des réserves pétrolières russes. « Les capacités de production disponibles actuellement sont faibles, indique-t-il. Il suffit d'un petit phénomène météorologique, financier ou militaire pour que le marché mondial soit complètement déstabilisé. Même l'OPEP sera incapable de redresser la situation. » Quels sont alors les facteurs qui peuvent contribuer à faire baisser les prix du pétrole ? Le responsable de Total n'en voit pas beaucoup pour l'instant. « La tension sur la demande reste forte sur le marché international. Seuls les efforts combinés des Etats et des entreprises visant à réduire la croissance de la demande peuvent éventuellement faire baisser la fièvre des prix », ajoute-t-il sans trop d'illusions. Toutefois, tous les participants se sont accordés à dire que nous étions loin de ce schéma. Pire encore, de nombreux spécialistes commencent à manifester la crainte d'un « pic oil », c'est-à-dire une déclinaison dramatique des quantités de pétrole disponibles sur le marché, ce qui créerait des difficultés supplémentaires de production. Ce scénario, à en croire les pétroliers, pourrait intervenir vers 2025. Pour éviter un nouveau choc pétrolier, les pays consommateurs cherchent des produits alternatifs, comme le charbon, le nucléaire et le gaz. Ce dernier pourrait éventuellement remplacer le pétrole dans certains domaines, tels que celui de l'énergie, par exemple. L'Algérie et la Qatar, qui possèdent des réserves importantes de cette matière, pourraient ainsi voir leurs exportations gazières augmenter en flèche d'ici à 2015, selon Nicolas Pochettino, analyste à l'Agence internationale de l'énergie (AIE). Le même interlocuteur pense que la consommation du gaz va vite augmenter, que les pays du Moyen-Orient (Qatar, Oman, Abou Dhabi) ainsi que ceux de l'Afrique du Nord (Algérie et Libye) joueront le rôle d'arbitres internationaux et deviendront les leaders en termes de production et d'exportation du gaz dans le monde. Un scénario qui ouvre de nouvelles perspectives pour la compagnie algérienne Sonatrach, dirigée par Mohamed Meziane, qui, pour des raisons inconnues, n'a pas pris part au colloque.