Alors que le paysage audiovisuel algérien reste encore verrouillé par la volonté d'un pouvoir autoritaire, les téléspectateurs sont «submergés» par des chaînes de télévision algériennes satellitaires émettant à partir de l'étranger qui s'invitent dans le débat politique à l'occasion de la campagne électorale. Généralement «adossées» à des journaux quotidiens nationaux ou proches de milieux islamistes, ces télés «offshore», qui émettent à partir de pays du Moyen-Orient ou de Londres via des satellites en direction de l'Algérie, rappellent un peu ces plateformes pétrolières «offshore» installées en pleine mer ou, mieux, ces «radios pirates» de la fin des années 1960 installées dans les eaux internationales émettant en direction de l'Angleterre quand il fallait briser le monopole de la vénérable BBC sur les ondes. A l'image donc de ces «radios libres» de ces années-là, aujourd'hui, alors que partout ailleurs – exception faite de la Corée du Nord ou de Cuba – l'existence de télés privées est admise comme un élément essentiel de la diversité et du pluralisme en matière d'expression et d'information, chez nous, face au refus du pouvoir de céder sur ce monopole, certains ont choisi de contourner cet ostracisme vis-à-vis de toute initiative privée en la matière en passant par l'étranger via le satellite. Car, de toute évidence, dans de telles conditions, le plus absolu des pouvoirs politiques ne peut rien, si ce n'est interdire et réprimer l'installation de matériel de réception satellitaire, autant dire traquer des millions de citoyens et les obliger à se débarrasser de leurs antennes paraboliques et autres décodeurs. Irréaliste et impossible à faire, même pour la pire des dictatures. Mais il n'en demeure pas moins que par son attitude qui s'apparente à un combat d'arrière-garde, le pouvoir actuel prouve qu'il demeure toujours autiste aux attentes des citoyens qui aspirent à une parole et une image libérées de toute tutelle ou d'un quelconque monopole politique. Ce qui signifierait, pour eux, la possibilité de ne plus subir le «diktat audiovisuel» imposé par un pouvoir qui n'accepte ni diversité ni concurrence et de plus en plus fragilisé par ce repli sur soi. C'est ce qui explique ses tergiversations à propos de l'ouverture de paysage audiovisuel reporté à chaque fois aux «calendes grecques» par un pouvoir politique aux abois, incapable d'apporter des réponses cohérentes aux attentes des Algériens. Faudra-t-il, pour qu'il comprenne enfin cette nécessité, que le champ audiovisuel soit submergé par le «haut» par tout et n'importe quoi. Il sera sans doute trop tard pour de télés de qualité pour trouver la place dans un champ saturé par la médiocrité, l'appât du gain facile… Peut-être est-ce là la finalité recherchée ?