Seize employés du complexe Cevital se trouvant à l'arrière-port de Béjaïa sont entrés hier en grève de la faim pour réclamer leur réintégration dans leurs postes de travail. Assis sur des cartons à l'entrée du complexe, les grévistes sont déterminés à rester là jusqu'à leur rétablissement dans leur droit. Ils dénoncent un licenciement collectif «abusif» qu'ils assimilent à une sanction faisant suite au mouvement de grève qui a marqué le complexe cette année, pour la première fois de son histoire. «Dix jours après notre grève du 1er avril, 27 personnes ont été convoquées en conseil de discipline pour répondre d'une faute de 3e degré. Sur quelle base a-t-on désigné ces 27 travailleurs alors qu'il y avait plus de 500 grévistes ? Le dernier d'entre nous a 10 ans d'ancienneté dans cette usine, nous avons contribué à son essor et à sa préservation», déclare un des grévistes, qui affirme que 11 des mis à pied ont été réintégrés, le reste licencié. «Les décisions de notre licenciement nous sont parvenues par voie postale», ajoute un de ses collègues. Sur les décisions qui mettent fin à la relation de travail, l'administration évoque la loi 90/11 relative aux relations de travail en vertu de laquelle les travailleurs demandent le droit de créer leur syndicat, l'une de leurs premières revendications. «Ils parlent d'une loi qu'ils n'appliquent même pas», accusent les grévistes, qui ne reconnaissent aucune légitimité à la commission de discipline. «Nous ne l'avons pas élue. En plus, elle est présidée par un DRH qui n'a pris ses fonctions que le 1er avril, soit le jour de notre grève», disent-ils. Le complexe a connu, le 18 janvier dernier, sa première grève qui a abouti à une augmentation salariale de 5% et à une commission d'enquête dépêchée par le patron de Cevital. Deux mesures qui ne satisfont pas les grévistes. «5% c'est une goutte ! Cela fait, pour un employé à la catégorie 6, à peine 800 DA d'augmentation. Ce n'est pas le cas par contre pour les gros salaires», argumentent-ils. Concernant l'enquête, c'est aussi la déception : «Ils n'ont pas écouté tout le monde.» «On nous pousse à l'immolation collective», menace un des grévistes, qui jouissent du soutien exprimé par le PST, qui a rendu publique une déclaration de solidarité. Au niveau du complexe, notre demande de rencontrer un responsable est restée sans suite.
Le licenciement justifié
Le groupe Cevital considère, par la voie de sa chargée de la communication, que le licenciement des travailleurs grévistes de la faim répond aux dispositions du règlement intérieur et rappelle que les concernés «ouvrent droit à un recours auprès de la direction générale dans les délais requis». Il est ainsi reproché au groupe de travailleurs grévistes d'avoir «bloqué l'accès au complexe avec de graves menaces et intimidations aux autres employés qui avaient refusé de les suivre» le 1er avril. L'accusation concerne le jour du mouvement de protestation que la direction de Cevital qualifie de «mouvement visant à perturber les activités lancé par un groupe d'individus». «Toutes ces entraves ont eu par conséquent des préjudices financiers (détérioration d'actifs) pour la société et un retard dans les livraisons des produits basiques à la consommation aux clients», écrit encore la chargée de la communication de Cevital, qui rappelle la feuille de route «discutée et validée par les représentants des travailleurs» au début de l'année en cours et relative à la gestion des ressources humaines. Une feuille de route qui comporte donc, entre autres points, l'engagement de la direction de Cevital de lancer une étude comparative des salaires (benchmark), la création d'une mutuelle et l'installation «en cours» d'un comité de participation.K. M.