Dans son dernier livre, Lakhdar Kaïdi, une histoire du syndicalisme algérien, publié récemment aux éditions Chihab, le sociologue et chercheur Nasser Djabi retrace une étape charnière dans l'histoire du mouvement ouvrier en Algérie. Construit autour d'un entretien-fleuve avec feu Lakhdar Kaïdi, un des piliers et acteurs du mouvement syndical, l'ouvrage permet une meilleure compréhension des caractéristiques et de la profondeur historique de l'action syndicale et ses enjeux. Le témoignage de Kaïdi, bien structuré, nous conduit au cœur des luttes politiques, sociales et syndicales qu'a vécues le pays pendant une période particulière de son histoire. Le livre décrit également le lien entre le militantisme politique et le militantisme syndical, entre son ancrage national et sa dimension internationale. Cependant, il faut relever que la conception de l'exercice syndical de Lakhdar Kaïdi, qui avait épousé les idées communistes, est aux antipodes de celle de Boualem Bourouiba qui avait adhéré à la conception nationaliste. Dans son entretien avec le sociologue, l'ancien dirigeant syndical a, en effet, parlé de deux opinions opposées concernant les voies et moyens devant mener à la libération du pays. M. Djabi a résumé ces divergences en ces termes : « La lutte était vive, en bien de périodes politiques, entre le parti du peuple (PPA/MTLD) et le parti communiste algérien en vue de la prééminence sur l'orientation du mouvement syndical en Algérie et dans l'immigration, et en vue de la définition des priorités et du lien à établir entre le caractère de classes et le caractère national, de la dimension nationale et de la dimension internationale, le niveau politique et le niveau économique et social. Ces divergences et ces conflits politiques et idéologiques se sont traduits en définitive en une succession de secousses et de changements dans les formes d'organisation syndicale. »