Le patron de la télévision tunisienne Nessma TV, Nabil Karoui, a été rendu coupable hier, par le tribunal tunisien, d'atteinte à l'ordre public et aux bonnes mœurs. Nabil Karoui, qui vient d'échapper à une peine de prison à laquelle ont appelé ses détracteurs, devra ainsi payer une amende de 2400 DT pour le fait pour lequel il est poursuivi, à savoir la diffusion d'un film de nature à nuire à l'ordre public et aux bonnes mœurs. Nadia Jamel, présidente de l'association Image et parole qui a assuré le doublage du film contesté, et Hédi Boughnim, responsable du service de visionnage, ont pour leur part écopé chacun d'une amende de 1200 DT. L'aboutissement de cette affaire est considéré, par certains, comme une victoire de la presse tunisienne étant donné que la justice n'a demandé aucune peine de prison à l'encontre des mis en cause. Pour d'autres, la justice tunisienne n'a fait, via cette décision, que couper la poire en deux, de manière à ne déplaire ni aux détracteurs de Nabil Karoui ni aux défenseurs de la liberté de la presse. Le procès Karoui a suscité l'implication mais aussi la division des Tunisiens et des organisations internationales. Alors que certains y voit une pure atteinte à la liberté de la presse dans ce pays en transition, d'autres par contre condamnent fermement le dépassement de cette chaîne sur les mœurs de la société tunisienne. L'annonce de ce verdict coïncide avec la Journée mondiale de la liberté de la presse, une journée largement célébrée, cette année, en Tunisie. L'affaire a été déclenchée le 7 octobre 2011. Quelques jours seulement avant le premier scrutin organisé après l'époque Ben Ali, Nessma TV avait alors diffusé un long métrage franco-iranien Persepolis. Ce film, qui raconte la diffusion du régime iranien à travers les yeux d'une petite fille, est jugé choquant vu que dans l'une de ses scènes Allah est incarné. Le procès Nessma TV était devenu, faut-il le rappeler, un symbole d'atteinte à la liberté de la presse et a suscité le soutien de plusieurs journaistes, militants associatifs et citoyens ordinaires. La diffusion de ce long métrage a valu à la chaîne Nessma une attaque enragée d'environ 200 islamistes et à Nabil Karoui de présenter ses excuses au peuple tunisien, mais cela n'a pas suffi à la partie plaignante qui consiste en un collectif d'une centaine d'avocats.