Ils étaient une centaine de citoyens du village Tigrine, (commune d'Aït Chaffa) à manifester jeudi dernier devant le siège de la daïra d'Azeffoun. Les villageois ont déployé des banderoles où l'on pouvait lire : «Rendez-nous notre village». Le village Tigrine, situé à 20 km à l'est du chef-lieu communal, est mitoyen de la célèbre forêt de Bounamane. Actuellement aucun civil n'y habite, hormis des unités de l'ANP installées depuis 2002 dans ce vaste territoire devenu zone opérationnelle. Les membres du comité de village dressent un bilan de la situation. «Nous avons quitté le village en 1995 suite à l'insécurité qui y régnait. En 2000, pensant que la question sécuritaire s'est améliorée, nous avions entamé un timide retour au village. En 2002, les unités de l'Armée nationale se sont installées dans le village, vu que la sécurité n'y était toujours pas assurée. La localité est devenue une zone opérationnelle, plutôt interdite aux civils. Nous avions demandé à cette époque des solutions au maire d'Aït Chaffa et en collaboration avec le chef de daïra d'Azeffoun. Ils nous avaient aidés et avaient opté pour une délocalisation du village dans un terrain (mechmel), loin de la zone à risque. La décision a été approuvée par une commission de daïra, mais la conservation forestière s'y était opposée car ce terrain a été reboisé, mais les multiples incendies ont fini par le dénuder. Nous avions continué nos démarches et les forestiers ont fini par céder en nous délimitant la partie à occuper, sans toutefois nous délivrer un écrit. Nous avions été reçus ensuite par l'ex wali qui avait donné son accord de principe. Il suffisait juste de suivre une procédure. Avec les lenteurs administratives, la délocalisation n'a toujours pas abouti. Le wali actuel ne nous a toujours pas reçus malgré nos demandes maintes fois reformulées. Aujourd'hui nous sommes déterminés à obtenir une solution. Faire aboutir ce problème de délocalisation ou bien qu'on nous restitue notre village, avec toutes les commodités : routes, électricité, eau, aides à la reconstruction, dédommagements. Notre village a payé un lourd tribut durant la Révolution. Il compte 45 chahid et 75 moudjahid. C'était le PC du colonel Amirouche en 1957, à Bounamane, forêt mitoyenne du village. Le village était évacué en 1957». Interrogés sur leurs lieux actuels de résidence, les villageois indiquent que c'est plutôt la débrouille : certains se sont installés à Alger, d'autres à Azeffoun. Beaucoup ont loué un peu partout : Azazga, Azeffoun etc. Il y a même quelqu'un, étant seul, qui vit dans une hutte en forêt à proximité d'Aït Chaffa. «Nous sommes des SDF depuis l'apparition du terrorisme», dira un citoyen, excédé.