Majoritaire à l'Assemblée, minoritaire dans la société, l'ex-parti unique n'a obtenu que 6,11% des voix des électeurs. Le FLN n'a eu que 1,32 million de voix sur les 21,64 millions d'Algériens inscrits sur le fichier électoral. Son électorat est resté relativement stable comparativement aux élections législatives de 2007 ; il n'a réussi à glaner que 900 000 voix de plus. En termes de sièges remportés, le FLN passe, en revanche, de 137 en 2007 à 221 en 2012. Un bond que le parti ne doit qu'au système électoral en vigueur et non pas à une adhésion supposée à son discours, comme pourrait le laisser croire «sa large victoire». Si le nombre de députés élus lui permet de dominer la future Assemblée nationale, sa suprématie reste relativement faible sur la scène politique. Le RND, qui est arrivé en seconde position avec 524 057 voix lui assurant 70 sièges à l'APN, a vu son réservoir électoral enregistrer une baisse sensible par rapport au scrutin législatif de 2007 où il obtenu 591 310 voix. En termes de suffrages, le parti de Ahmed Ouyahia est arrivé en troisième position derrière les indépendants qui ont réussi à fédérer autour de leurs listes 671 190 votants. Mais l'éparpillement des voix les a largement défavorisés ; ils n'ont obtenu que 19 sièges, même s'ils ont réalisé un score supérieur à celui de 2007 (562 986 voix). Les résultats définitifs, validés par le Conseil constitutionnel, ont confirmé également que le réservoir électoral des trois partis islamistes (MSP, El Islah et Ennahda) regroupés sous la bannière de l'Alliance verte, a substantiellement chuté. Ces trois partis réunis avaient obtenu, lors de l'élection de 2007, 891 051 voix, contre 475 049 lors des législatives du 10 mai. L'Alliance verte perd plus la moitié de ses voix. L'autre remarque est que l'ensemble des voix obtenues par les trois partis au gouvernement ainsi que celles d'El Islah et d'Ennahda ne dépassent pas les 2 323 469. Le Front des forces socialistes en a recueilli uniquement 188 275 lui donnant 21 élus. Contrairement aux autres partis, le FFS a bénéficié de la concentration de ses voix dans les quatre wilayas du Centre (Béjaïa, Tizi Ouzou, Alger et Boumerdès) où a émergé l'intégralité de ses élus. Le Parti des travailleurs (PT), avec 283 585 voix, recule de 6000 voix par rapport à 2007 et perd du coup 9 sièges. Pareil pour le Front national algérien (FNA) de Moussa Touati qui passe de 13 sièges en 2007 à seulement 9 élus ; il a perdu plus de 40 000 voix. Le Front pour la justice et le développement de Abdallah Djaballah a glané 232 676 voix lui assurant seulement 7 sièges. Le reste des formations, qui ont réussi leur entrée au Parlement en obtenant de un à six sièges, ont réalisé des scores allant de 100 à 170 000 voix. A la lumière des résultats, il apparaît clairement que l'abstention et/ou le boycott s'affirment comme une tendance ascendante. Plus de 14 millions d'Algériens ont préféré bouder les urnes. Et 1,7 million de votants ont glissé un bulletin nul. Ce qui donne, au final, seulement 6,7 millions d'Algériens qui ont exprimé un vote d'adhésion pour les 44 partis politiques en lice. «La vérité n'est pas dans l'urne», pour reprendre l'ancien ministre du Commerce, Smaïl Goumeziane. En rappelant les chiffres et autres statistiques accablantes des réalités politiques, économiques et sociales du pays, Goumeziane, dans une tribune publiée dans le journal électronique La Nation, explique qu'«au-delà de ces scrutins, de leurs chiffres, ou du sempiternel débat entre vote et boycott, ou entre participation et abstention, le pays a besoin d'un véritable électrochoc, pacifique et démocratique, pour permettre à la rupture politique et économique de se réaliser sans violence. Cette triple situation de blocage, en termes politiques, économiques et globaux, montre plus que jamais le chemin semé d'embûches qui reste à parcourir pour conjurer l'arbitraire et la montée des périls, atteindre le stade de pays à régime démocratique».