Grèves successives, intempéries, mobilisation des enseignants pour les élections… Les élèves de terminale vont se présenter au bac, qui démarre le 3 juin, avec… 40% du programme en moins ! Le ministère campe sur ses positions, les parents réclament de l'indulgence dans les épreuves et les syndicats continuent à revendiquer pour eux-mêmes. Les victimes de cette année particulière sont déjà connues : les élèves. Les cours sont terminés et les épreuves du bac blanc presque achevées. Alors que les examens du bac commencent le 3 juin, les candidats affichent leur angoisse. «Nous ne sommes mêmes pas arrivés au seuil minimum fixé par le ministère de l'Education. Certains de nos enseignants continueront de nous donner des cours pendant la période des révisions. Mais c'est inadmissible puisque ce temps-là devrait justement être consacré uniquement à cela ! Pas à suivre des cours en classe !», s'énerve Nabil, candidat au bac au lycée Idrissi, à Alger. Mouna, lycéenne à El Achour, s'estime chanceuse d'être inscrite aux cours particuliers où certains enseignants se fixent comme objectif d'enseigner le programme minimal. Avec huit semaines de retard pour les terminales et les 4es années moyennes, et plus de douze semaines pour les autres niveaux, le Conseil des lycées d'Algérie (CLA) affirme que le programme est réalisé à seulement 60% pour les terminales et à peine à 50% pour les 1re et 2e années secondaires. Ce retard remet-il en cause l'organisation de l'examen ? Pour le ministère, en aucune façon. Il maintient d'ailleurs toutes les épreuves et vient même de mettre en quarantaine le personnel chargé d'élaborer les sujets d'examen. Le ministère et même les syndicats n'ont jamais été favorables au décalage des examens, pour ne pas pénaliser les candidats dans le Grand-Sud. Le ministère maintient toutefois les mesures exceptionnelles décidées en 2007, à savoir deux sujets au choix et 30 minutes supplémentaires. «Les sujets d'examen porteront sur les cours effectivement dispensés en classe», affirme le ministère dans un communiqué officiel. Les élèves sont déçus et les parents d'élèves toujours inquiets. Pour autant, le CLA dénonce : «Une telle situation est favorable aux élèves qui ne cherchent qu'à réussir leur bac au détriment du savoir et de la connaissance.» Pour l'Union nationale des associations de parents d'élèves, c'est une «année catastrophique». «Dans certains établissements, les élèves ont été surpris d'avoir des sujets d'examen du bac blanc non enseignés pendant l'année !», constate Ahmed Khaled, président de l'association. Le Syndicat national autonome des professeurs d'enseignement secondaire et technique (Snapest) affirme qu'avec toutes les perturbations enregistrées, il s'agit réellement d'une année «spéciale» pour le secteur de l'éducation, «mais nous voulons un bac de qualité», affirme-t-on au niveau du syndicat. Il s'en lave toutefois les mains : «Notre syndicat a essayé de ne pas perturber le troisième trimestre avec des grèves.» Il ne panique pas: «Je crois que les établissements en retard arriveront à terminer le programme. Catastrophe Le ministère est en train de faire du bricolage ! Nous avons eu une année exceptionnelle à cause des grèves répétitives de tous les corps de l'éducation, des intempéries et de la mobilisation de 25 000 enseignants pour les élections législatives. La dernière grève de l'Unpef en mai a sérieusement perturbé la scolarisation des élèves dans tous les paliers.» Contrairement aux pédagogues et aux syndicats, l'Union nationale des associations des parents d'élèves demande à ce que les sujets d'examen soient «faciles». Ahmed Khaled suggère aussi au ministère d'élaborer un barème de correction favorable aux candidats. Que la surveillance soit moins sévère pour éviter «toute provocation» des candidats le jour J. Le CLA estime qu'il est déjà trop tard pour réagir et prendre les décisions adéquates pour cette année. Il affiche son désarroi en anticipant les réactions du ministère de l'Education. «Il se félicitera du succès de la réforme en avançant des taux de réussite dépassant les 70% dans les examens de fin d'année, obtenus grâce à un programme allégé et des sujets faciles.» «Devant cet état de fait, nous n'avons aucune solution pour cette année scolaire qui se répète malgré le fois d'avoir tiré la sonnette d'alarme à plusieurs reprises, explique Idir Achour, porte-parole du syndicat. Nous devrons, toutefois, agir rapidement et efficacement dans le cadre d'une démarche concertée pour éviter le pire l'année prochaine qui recevra dans le secondaire une double promotion d'élèves : ceux issus de la 6e (système fondamental) et ceux issus de la 5e de la réforme.»