La mise en garde émane d'un éminent expert. « Bientôt, les compagnies pétrolières américaines contrôleront vos recettes », disait Bernard Mommer, conseiller auprès du secrétaire général de l'Opep, à propos de l'ouverture du marché des hydrocarbures aux compagnies internationales. Au seuil de la concrétisation de la loi, controversée, sur les hydrocarbures (qui se fera progressivement selon le ministre de l'Energie), quelle place tiennent les multinationales pétrolières en Algérie ? Lentement mais sûrement, l'implantation des géants pétroliers se fait de plus en plus importante en Algérie. La production des associations paraît peut-être moins significative que celle de Sonatrach, mais elle affiche une constante progression. La production de pétrole brut et condensât, en 2005, est de l'ordre de 2 millions de tonnes équivalent pétrole (tep) pour Sonatrach contre 1,7 million tep pour les associations. Et tandis que la production de Sonatrach semble en perte de vitesse (-0,6%), celle des associations affiche une croissance de 6,6%. Plus impressionnant encore, la croissance de la production brute du gaz naturel des associations a atteint 70% (contre 3% pour Sonatrach). En tout et pour tout, 25% de la production de pétrole en Algérie est produite dans le cadre de l'association. Les exportations des compagnies étrangères restent, cependant, bien inférieures par rapport à celles de Sonatrach. Les firmes étrangères ont enregistré, au cours du premier semestre de 2005, des gains de 1,8 milliard de dollars pour une production de pétrole brut de près de 3 millions de tonnes contre plus de 100 milliards de dollars pour Sonatrach. Pour ce qui est du GPL, les compagnies internationales ont affiché des bénéfices de 115 millions de dollars au cours du premier semestre de l'année 2005 contre 1,3 milliard de dollars pour Sonatrach. Néanmoins, les entreprises pétrolières internationales ont tout de même vu leur chiffre d'affaires progresser de l'ordre de 30% en 2004. Le danger, d'après les experts, serait que l'Algérie ne puisse plus contrôler aisément ses ressources énergétiques et se verra, à moyen terme, dicter sa politique d'exportation par les compagnies pétrolières occidentales présentes sur son sol. Bernard Mommer illustre son analyse par l'exemple du Venezuela, l'un des premiers pays d'Amérique latine qui s'est frayé un chemin des réserves nationalisées vers une réouverture du marché au capital étranger durant les années 90. Alors que le niveau de production augmentait en flèche, les revenus fiscaux de ce pays sur le pétrole chutaient de manière dramatique : ils atteignaient les 66% en 1976-1992 et ont périclité à 37% en 1996-2000. Les responsables algériens, eux, adoptent un ton rassurant. On est bien loin, d'après eux, d'un scénario à la vénézuélienne. L'Algérie est l'un des premiers producteurs exportateurs de GPL dans le bassin méditerranéen. Dans la mesure où le GPL est un produit de moindre coût et qui réduit la pollution, notre pays est en train d'essayer de substituer de plus en plus le GPL carburant au diesel et à l'essence. Une mutation qui a permis à l'Algérie (qui compte actuellement avec ses pleines capacités en hors quota OPEP l'équivalent de 1 250 000 barils par jour) de tirer son plus grand profit des exportations de GNL, d'où l'intérêt d'augmenter ses capacités de production de gaz naturel. En somme, et d'après les responsables du ministère de l'Energie et de Sonatrach, le secteur se porte très bien. « La bonne santé de notre groupe se reflète tant par les principaux indicateurs physiques et financiers que par l'effort soutenu du processus de modernisation et d'amélioration du fonctionnement de Sonatrach, que nous avons poursuivi avec nos partenaires, grâce notamment à l'apport de leur expérience et de leur savoir-faire, qui ont contribué à l'augmentation de notre capacité de production et à l'atteinte de nos objectifs », soutient le patron de Sonatrach. Selon les dernières statistiques, la production nationale de pétrole brut a atteint 1,4 million de barils/jour en 2005. L'Algérie a exporté pour 45,6 milliards de dollars (45% par rapport à 2004) d'hydrocarbures en 2005. Et L'extraordinaire envolée des prix du baril du pétrole a permis de réaliser une croissance de l'ordre de 53% pour atteindre un montant de recettes fiscales de 2267 milliards de dinars. Les exportations d'hydrocarbures ont, quant à elles, atteint les 145 millions de tonnes en 2005 contre 137 millions en 2004. Et l'on devrait profiter longuement de la rente pétrolière puisque, indique le patron de Sonatrach, notre pays dispose de pas moins de 40 milliards de barils équivalent pétrole (bep) de réserves prouvées et récupérables d'hydrocarbures sur les 100 milliards que renferme le sous-sol algérien.