Le MNLA avait pour projet initial de faire du nord du Mali un Etat touareg et laïque. Les islamistes ont-ils pris le dessus sur les Touareg maliens ? C'est ce qu'il y a visiblement lieu de croire. Les dirigeants du Mouvement national pour la libération de l'Azawad (MNLA) ont, en tout cas, accepté samedi soir de fusionner avec le groupe islamiste Ançar Eddine. Dans la foulée, ils ont décrété la création de «l'Etat islamique de l'Azawad». Il est à rappeler que le MNLA avait pour projet initial de faire du nord du Mali un Etat touareg et laïque. «Nous sommes tous pour l'indépendance de l'Azawad» ; «nous acceptons tous l'islam comme religion», le Coran et la sunna sont «la source du droit», indique le protocole d'accord officialisant cette fusion. Depuis le coup d'Etat militaire du 22 mars, qui avait chassé du pouvoir le président Amadou Toumani Touré, les Touareg du MNLA, Ançar Eddine et des milices islamistes liées à Al Qaîda au Maghreb islamique (AQMI) se sont emparés de plusieurs villes du nord du pays. A mesure que la rébellion progressait, les islamistes prenaient le pas sur les Touareg laïcs et imposaient la charia dans les villes conquises.Si les autorités maliennes ont rejeté la création de cet Etat islamique aussitôt son annonce et réitéré leur volonté de restaurer l'intégrité territoriale du Mali dont le Nord s'est déclaré unilatéralement indépendant le 6 avril dernier, celles-ci ne paraissent toutefois pas en mesure de faire face à la rébellion touareg. Pour l'instant, la priorité du nouveau gouvernement consiste d'abord à s'imposer à Bamako même où les éléments de l'ex-junte dirigée par le capitaine Amadou Haya Sanogo ne paraissent pas vouloir lâcher prise. Bien qu'inquiète aussi de l'évolution de la situation dans le Nord-Mali, la médiation ouest-africaine estime que la fusion entre les deux groupes rebelles touareg peut être de nature à faciliter le règlement de la crise. «La médiation salue toute dynamique allant vers la cohésion entre les différents mouvements armés, l'essentiel étant que ce groupe choisisse l'option d'une solution négociée au conflit», a indiqué le ministre burkinabé des Affaires étrangères, Djibril Bassolé, dont le pays conduit la médiation au nom de l'Afrique de l'Ouest. «En plus de cette cohésion, la médiation souhaite que non seulement ils (les groupes fusionnés) aillent vers la solution négociée, mais qu'ils préservent l'intégrité territoriale du Mali et qu'ils abandonnent la terreur et le terrorisme comme moyens d'action», a-t-il poursuivi. Estimant qu'«il est toujours mieux d'avoir à négocier avec un seul groupe qu'avec plusieurs aux intérêts parfois diamétralement opposés», M. Bassolé s'est dit attendre une plateforme de revendications commune des rebelles touareg «qui pourrait (…) aider à avancer dans les discussions». L'Algérie et l'UE parlent de la crise malienne La crise au Mali a été également évoquée hier à Alger par le ministre délégué chargé des Affaires magrébines et africaines, Abdelkader Messahel, et une délégation de l'Union européenne (UE), a indiqué un communiqué du ministère des Affaires étrangères. Lors de cette rencontre avec la délégation de l'UE, qui comprenait les chefs de missions diplomatiques européennes accréditées en Algérie, M. Messahel a exposé à ses interlocuteurs «l'approche et les initiatives algériennes pour le règlement de la crise au Mali ainsi que pour le renforcement de la coopération entre les pays du champ et leurs partenaires de la communauté internationale, dans la lutte contre le terrorisme, le crime organisé et les trafics en tout genre qui sévissent dans la région», précise le communiqué. S'agissant du Mali, M. Messahel a rappelé «les urgences auxquelles devait faire face le pays, avec l'appui de la communauté internationale». Il s'agit notamment du «parachèvement du processus de retour à l'ordre constitutionnel et la mise en place d'un gouvernement consensuel, fort et légitime, et la préservation de l'intégrité territoriale et de la souveraineté du Mali», ajoute la même source. M. Messahel a, dans le même contexte, insisté sur «la préservation de l'intégrité territoriale et la souveraineté du Mali, le règlement de la question du Nord à travers l'organisation d'un dialogue avec les rebelles pour la prise en charge de leurs revendications légitimes, la prise en charge de la question humanitaire et la lutte contre le terrorisme et le crime organisé». Ainsi énoncée, la position algérienne devrait certainement conforter la médiation ouest-africaine dans sa mission au Mali.