La crise au sein du FFS prend une nouvelle dimension. Trois ex-premiers secrétaires du parti, Mustapha Bouhadef, Djoudi Mammeri et Ali Kerboua, viennent d'unir leurs voix pour appeler à un sursaut qui dépasse la direction actuelle, coupable à leurs yeux d'avoir abandonné «les valeurs et les idéaux» de la formation politique. Dans une déclaration rendue publique hier, à la veille directe du conseil national du parti prévu demain, ils analysent qu'il y a bien «une tentative de normalisation et de domestication du FFS». Cette lecture, déjà formulée par des militants et des cadres intermédiaires, vite rentrés en conflit avec l'état-major actuel du FFS, prend appui une nouvelle fois sur la participation aux dernières législatives. Et dans l'affaire, il est derechef révélé, à se fier à la déclaration, que le débat sur la participation ou non a été pour le moins biaisé et expédié. «Nous avons alerté les instances dirigeantes du parti sur les risques qui pèseraient sur la cohésion et la pérennité du parti en participant au scrutin du 10 mai dans les conditions et les circonstances imposées par le pouvoir», rappellent les trois signataires. Juste avant de constater que ces appels «n'ont pas trouvé d'échos auprès des détenteurs du pouvoir réel au sein du parti. Ces mêmes personnes qui assurent la tutelle sur les organes de l'appareil du parti». Les instances du plus vieux parti de l'opposition seraient-elles donc doublées par un noyau dur invisible qui détiendrait les leviers de la décision au mépris de l'orthodoxie démocratique que dit s'imposer le parti ? Le grief fait florès au sein et dans l'entourage du FFS, mais personne ne va pour le moment jusqu'à identifier la nature et la composante de ce noyau. Les trois signataires, qui connaissent bien le parti, pour l'avoir dirigé lors des moments particuliers de son parcours, pour avoir vu partir des militants et des dirigeants et en avoir vu émerger d'autres, dénoncent par ailleurs cette promptitude soudaine de la direction à diriger ses feux contre «les saboteurs de l'intérieur» – formule inspirée par Aït Ahmed himself, dans son message enjoignant à la direction de prendre des sanctions – lors même où l'on s'est fendu d'obligeances diplomatiques envers «les maîtres du jeu électoral», le pouvoir et ses relais. Enfin, les trois ex-premiers secrétaires défendent «le rassemblement des énergies militantes du FFS», comme une «absolue nécessité» pour soustraire le parti aux stratégies claniques liées à la prochaine présidentielle. En somme, c'est à une refondation qu'invitent les trois signataires, puisque l'appel s'adresse à «tous les militants et sympathisants qui ont porté et qui continuent à le faire, les principes du FFS» pour «dépasser tous les clivages et les différences d'appréciation que le parti a connus depuis sa création». Cette sortie intervient au moment où la direction du FFS semblait avoir réussi à circonscrire l'étendue des remous nés au lendemain des législatives, avec notamment l'éviction dans le fracas de Karim Tabbou, un autre premier secrétaire. Là, ce sont des voix connues pour la modération et leur portée dans la profondeur du parti qui viennent de s'exprimer. La direction s'en trouve acculée à des amputations encore plus douloureuses et risquées ou à l'ouverture d'un débat que l'attitude ferme de Hocine Aït Ahmed a rendu pour le moins hypothétique.