L'axe principal qui traverse la vallée de la Soummam pour rejoindre Béjaïa, le chef-lieu de wilaya, est arrivé à un niveau d'encombrement proche de l'asphyxie totale. Une seule route, vétuste, étroite, cabossée, saturée, livrée à l'anarchie des marchés informels, pour l'une des régions les plus peuplées d'Algérie. Bienvenue dans l'enfer de la RN26, cauchemar quotidien de milliers d'automobilistes au bord de la crise de nerfs. L'axe principal qui traverse la vallée de la Soummam pour rejoindre Béjaïa, le chef-lieu de wilaya, est arrivé à un niveau d'encombrement proche de l'asphyxie totale. Il faut compter 5 à 6 heures de route pour parcourir un tronçon de plus ou moins 80 km, ponctué par plus de 180 dos-d'âne et passages cloutés. C'est encore plus vrai lorsque la saison estivale jette sur la route des milliers d'estivants tentant de rallier désespérément la côte. Du délire ! Emprunter la RN26 en allant, ou en revenant, de la ville de Béjaïa est devenu un exercice stressant, voire traumatisant, qui demande des nerfs d'acier et une patience à toute épreuve. De l'entrée de la vallée, dans la localité de Maillot, jusqu'à la sortie de Sidi Aïch, il n'y a pas d'autre choix que de rouler en première ou en deuxième vitesse, à une allure d'escargot, en priant que des énergumènes passablement énervés ne viennent pas couper la route à coups de pneus enflammés pour réclamer la venue du wali pour un problème de conduite d'eau ou de ligne électrique. Chaque jour, dès les premières heures de la matinée, ce sont des kilomètres de bouchons qui se forment au niveau de chaque agglomération traversée par un flot ininterrompu de voitures et de camions qui roulent pare-choc contre pare-choc. La palme de la difficulté revient toutefois à Akbou dont les embouteillages paralysent la ville pendant des heures. Les jours de marchés, il faut compter jusqu'à deux heures de temps pour faire les 3 ou 4 kilomètres qui séparent l'ancienne zone industrielle de la nouvelle. De nouvelles épreuves du même acabit attendent les infortunés automobilistes à Ighzer Amokrane, Takeriets puis Sidi Aïch. A l'étroitesse de la route s'ajoute celle des esprits. L'incivilité des uns et des autres, les comportements anarchiques, voire criminels, des chauffards font le reste et conduisent bien souvent à la paralysie complète de la circulation. A ces difficultés majeures est venu se greffer un nouveau phénomène tout aussi accablant ces dernières années. Tous les conflits économiques et sociaux prennent la route pour exutoire. En l'absence d'un dialogue social et politique, la seule manière d'attirer l'attention des autorités sur ses problèmes est de couper la route nationale à la circulation. Le dialogue social est devenu un rapport de force où chacun négocie sa capacité de nuisance. L'Etat n'existe plus que sous sa forme la plus répressive : les forces antiémeute et les communautés en sont réduites au chantage ou à la prise en otage de ce qui leur tombe sous la main. Pour le réseau routier comme pour tous les secteurs névralgiques, la wilaya de Béjaïa paie le prix d'immenses retards qui handicapent gravement son développement. Le dédoublement de la RN26 n'a été réalisé que de Béjaïa jusqu'à El Kseur. Soit à un jet de pierre ! Le reste du chantier a été abandonné depuis des années. Pour la haute vallée de la Soummam, là où se concentrent les activités et la population, seule une misérable trémie a été réalisée à Guendouza, Akbou. En attendant des jours meilleurs et des projets plus concrets, les autorités s'emploient à décaper les bosses et les sillons d'une route que les poids lourds venus du port ont fini par complètement déformer. Le drame pour les usagers de cette route est qu'il n'y a rien à espérer à long comme à moyen termes. Le dédoublement de la RN26 tout comme le projet de la pénétrante qui doit relier la région à l'autoroute Est-Ouest, s'ils venaient à être concrétisés, prendraient encore plusieurs années. La saturation de cet axe vital est en train d'étouffer toutes les activités économiques de la région. Aucun développement économique n'est possible sans routes. A chaque occasion qui leur a été offerte, les opérateurs économiques de la région ont tiré une sonnette d'alarme que personne ne veut entendre. «Il n'est plus possible de continuer ainsi. Trop de retard a été accumulé», soulignait une industrielle de la ville d'Akbou qui a été contrainte de changer d'activité. Pour bien souligner ce retard, il convient de préciser que le chemin de fer et la route carrossable sont dans le même état que lorsqu'ils ont été réalisés par la puissance coloniale au début du siècle passé. Malgré le dynamisme économique bien connu de la région, rien, absolument rien, n'a été fait en matière d'infrastructures routières. Avec des routes saturées, c'est le secteur du tourisme qui est en train de péricliter, c'est le port de Béjaïa qui est en train d'étouffer, ce sont les nombreuses unités économiques qui voient leurs activités ralenties ou complètement freinées. C'est, de fait, toute la région qui est en train de mourir d'asphyxie.