Le président du Haut Conseil islamique du Mali (HCIM), Mahmoud Dicko, s'est aussi rendu dans la région, il y a quelques jours, pour discuter avec les islamistes armés. Le ministre burkinabé des Affaires étrangères, Djibril Bassolé, dont le pays conduit la médiation dans la crise malienne, s'est rendu hier matin à Gao, dans le nord du Mali, pour rencontrer les islamistes qui contrôlent la ville. Accompagné d'un conseiller et de quelques journalistes, M. Bassolé, parti en hélicoptère de Ouagadougou, a été accueilli à l'aéroport de Gao par des notables et un responsable local du Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest (MUJAO), le groupe islamiste qui tient la ville. Présenté comme étant un allié d'AQMI, le Mujao a, rappelle-t-on, évincé avec Ançar Eddine le Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA) de plusieurs localités où il a commencé à appliquer la charia. Ce groupe islamiste armé détient actuellement en otage quatre diplomates algériens. «Je dois me rendre à Gao puis à Kidal, dans le Nord-Est, pour porter un message aux groupes armés islamistes de la part du président burkinabé Blaise Compaoré, médiateur de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao)», avait indiqué le ministre burkinabé avant son départ. Il s'agit de l'émissaire de plus haut rang à se rendre dans le nord du Mali depuis que la région a proclamé son indépendance de manière unilatérale. Après environ deux heures à Gao au cours desquelles il a notamment visité l'hôpital de la ville, M. Bassolé s'est rendu par la suite à Kidal. Rien n'avait filtré hier soir sur la teneur des discussions entre le MAE burkinabé les représentants du Mujao et d'Ançar Eddine. Sauf peut-être qu'il ressort que ces deux groupes acceptent le principe de dialoguer ou négocier et reconnaissent au Burkina Faso le statut de médiateur. Ce qui est, en soi, un point positif dans la mesure où il peut éviter une guerre à la région. Favoriser des discussions directes entre Bamako et les Touareg Le chef d'Ançar Eddine, Iyad Ag Ghaly, a déclaré à ce propos, hier à Kidal, qu'il soutenait et acceptait la médiation du président burkinabé Blaise Compaoré. «On est contents. On soutient, on accepte la médiation du président Compaoré. C'est ce qu'on a confirmé tout de suite au ministre», a-t-il indiqué après un entretien avec le chef de la diplomatie burkinabé. «Incha Allah on va faire ce chemin ensemble. Allah va aider chacun à trouver ce qu'il veut», a ajouté Iyad Ag Ghaly.Le Burkina Faso dit vouloir favoriser une issue pacifique à la crise et notamment des discussions directes entre les autorités maliennes de transition et les groupes armés du Nord. La Cédéao a néanmoins averti qu'elle était prête à envoyer une force de quelque 3300 soldats au Mali dans le cas où les discussions n'arriveraient pas à avancer. L'option d'une intervention militaire est rejetée par l'Algérie, la Mauritanie et le Maroc qui plaident pour sur un règlement politique du dossier touareg. Officiellement, il n'y a jamais eu de rencontre entre Bamako et les rebelles touareg. Le président burkinabé Blaise Compaoré s'est, jusque-là, contenté de recevoir séparément des délégations du groupe islamiste Ançar Eddine et du MNLA en juin dernier. Le président du Haut conseil islamique du Mali (HCIM), Mahmoud Dicko, est par ailleurs parti, il y a quelques jours, discuter avec les islamistes armés qui veulent imposer la charia à tout le Mali, mais sans toutefois réclamer pas l'indépendance du Nord, contrairement au MNLA. Traoré a du mal à reprendre la main à Bamako De son côté, le président malien par intérim, Dioncounda Traoré, est rentré le 27 juillet dernier à Bamako. Il était en convalescence à Paris à la suite d'une grave agression dans son bureau à la présidence. Le 29 juillet, il avait annoncé la création de nouveaux organes de transition et précisé qu'il se chargeait lui-même de former le gouvernement d'union nationale exigé par la Cédéao. Ce cabinet d'union doit avoir l'assise et la légitimité suffisantes pour régler la crise du nord. Or, Dioncounda Traoré paraît encore loin d'avoir réussi à reprendre la main à Bamako. Preuve en est que les militants de Yèrèwolo Ton (Mouvement dignité, ndlr) ont investi une nouvelle fois, lundi, les rues Bamako pour demander son départ. Argument avancé par les manifestants : son mandat de président de la République par intérim a pris fin. Le mouvement Yérèwolo Ton, qui était l'un des organisateurs de la marche du 21 mai sur le palais de Koulouba (siège de la présidence de la République malienne), a réclamé en outre «la dissolution de l'Assemblée nationale dont le mandat est aussi terminé depuis le 31 juillet 2012». La manifestation de Yèrèwolo a d'ailleurs coïncidé avec la tenue, à Bamako, du procès de trois des organisateurs du soulèvement à l'issue duquel le président Traoré – investi le 12 avril après le retrait des putschistes – avait été agressé. Hamadoun Amio Guindo, Younouss Hameye Dicko et Rokhia Sanogo, des responsables de la Coordination des organisations patriotiques du Mali (Copam) favorable aux militaires qui avaient renversé le 2 mars le président Amadou Toumani Touré, sont accusés de «troubles graves à l'ordre public». Ils ont nié les faits qui leur sont reprochés. Le verdict sera rendu le 28 août. Ceci pour dire que le président burkinabé Blaise Compaoré, la Cédéao et les pays dits du champ (Algérie, Mali, Niger et Mauritanie) ont encore du pain sur la planche au Mali.