Après le Nigeria, l'Egypte, le Niger, c'est au tour du Cameroun d'être touché par le virus H5N1 de la grippe aviaire selon une déclaration officielle, datée du 11 mars. Le virus a été détecté sur un canard d'élevage et confirme « les craintes des experts internationaux qui ont estimé que l'Afrique, par manque d'infrastructure, de personnel qualifié et de moyens, seraient en difficulté face à cette menace », est-il rapporté dans le quotidien français le Monde dans son édition du 12 mars 2006. « Sans lire dans une boule de cristal, on ne serait pas surpris que la tache d'huile continue à s'étendre », avait prévenu Joseph Domenech, chef du service santé animale à l'organisation de l'ONU pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), après la découverte de ce virus hautement pathogène au Niger. Comment expliquer cette propagation alors que le Cameroun avait pris des mesures de restrictions des importations de volailles avec le Nigeria lorsque le virus avait été détecté. Le Cameroun partage 1800 km de frontières avec le Nigeria. Combien en partageons-nous avec le Niger, lui-même infecté ? Peut-on garantir que l'Algérie ne commerce plus la volaille en provenance de ces pays ? Et si des échanges commerciaux sont interrompus ou inexistants, qu'en est-il de la migration des oiseaux sauvages ? Une première pandémie était crainte en début septembre lorsque les premiers vols se faisaient du Nord vers le Sud. Mais voilà que ces mêmes oiseaux vont reprendre leur envol du Sud vers le Nord dès l'arrivée du printemps. Mais surtout, quelle est la procédure d'alerte mis en œuvre par les autorités pour endiguer le phénomène si jamais il devait se présenter à nous ? de quoi s'agit-il ? Les premiers facteurs de risques immédiats sont liés à la stratégie de détection et de lutte contre une éventuelle pandémie. Peut-on affirmer qu'une stratégie a été définie par les autorités ? Difficile à croire puisque, en premier chef, les vétérinaires semblent indiquer une totale méconnaissance du sujet. « Nous n'avons aucune information quant à la tenue à adopter en cas de détection d'un oiseau mort. Quelques personnes sont venues nous voir pour nous signaler un oiseau mort, mais à part leur dire d'aller le signaler au laboratoire d'El Harrach, nous ne pouvions rien faire. » D'abord parce que les vétérinaires craignent eux-mêmes d'être contaminés. Ensuite, parce qu'ils ne disposent d'aucune information. « Pour détecter une maladie quelconque sur une volaille, nous avions recours à une autopsie. Depuis le phénomène de la grippe aviaire, nous ne nous y risquons plus. » Une situation engendrée par l'opacité entourant la maladie elle-même et le virus H5N1, mais également l'absence d'intermédiaire ou d'interlocuteur. « Certains nous ont rapporté qu'il n'était pas sûr que le laboratoire d'El Harrach fasse les analyses nécessaires pour la détection du virus », ajoute un vétérinaire d'une clinique située à Chéraga. Un autre d'affirmer : « Je suis sûr du sérieux de la direction des services vétérinaires. Le problème se pose du point de vue de l'acheminement de l'information. Comment s'assurer que les autorités concernées seront rapidement mises au courant de cas suspects, puisque personne ne sait à qui s'adresser ? » Une petite expérience éclaire d'elle-même : téléphoner au 19, le renseignement, pour demander la direction des services vétérinaires. Au premier coup de téléphone, les renseignements donnent le numéro de téléphone d'une clinique vétérinaire. Au second coup et après insistance sur la dénomination de la direction des services vétérinaires et non de cliniques vétérinaires, les renseignements donnent le numéro de l'inspection vétérinaire - une inspection chargée au niveau du port d'Alger de veiller à la bonne qualité des marchandises et produits alimentaires. Quant au numéro de la direction des services vétérinaires, personne ne répond. Un autre facteur à risque réside dans l'absence de vaccins. Les autorités algériennes affirment s'être approvisionnées en vaccins. Mais à quelle hauteur, quand les suggestions provenant de l'OMS consistent à préconiser un stock devant traiter au moins 25% de la population ? D'ailleurs, plusieurs Etats ont gardé secret l'endroit où les vaccins étaient stockés, et il est fort probable que les distributions s'effectuent en utilisant les moyens disponibles dont l'armée. En effet, si la pandémie se déclare, les autorités s'attendent à de violentes réactions, motivées par la panique. Les facteurs contextuels L'Algérie est classée à la huitième position tant ses zones humides occupent sur notre planète un espace important. Des zones où les oiseaux migrateurs se posent le temps d'une halte ou pour se nicher en attendant que l'hiver passe en Europe. Ainsi, des millions d'espèces se rencontrent en automne, mais également au printemps. Or ce sont les oiseaux sauvages qui véhiculent le virus. C'est sans compter sur l'absence de réglementation quant à l'élevage de volaille. En effet, n'a-t-on pas déjà vu des poules traverser la routes vers Triolet à Alger ou des enfants jouer avec des canetons en plein centre de Belcourt ? Il est possible de trouver des éleveurs à chaque coin de rue sans prétendre pour autant avoir un élevage. En effet, avoir une ou deux poules dans une cour n'est pas considéré comme élevage, et il est hautement pratiqué. Mais le plus dramatique étant que les volailles infectées par le virus H5N1 ne présentent aucun signe clinique. « Il ne s'agit pas d'un chat ou d'un chien qui seraient par exemple en détresse respiratoire. La volaille elle est sur ses deux pattes en train de picorer. Puis, on la retrouve morte », explique le vétérinaire de la clinique de Chéraga. Et ils peuvent néanmoins excréter longtemps le virus influenza aviaire H5N1 dans leurs selles. « Les symptômes détectables sont sensiblement identiques à ceux de la maladie de Newcastle : déshydratation, congestion sévère du système musculaire, attaque du système respiratoire et du système digestif. » Il est apparu récemment que le virus pouvait être transmissible aux félins. Des tigres de zoo se sont retrouvés contaminés par le virus après avoir été nourris par la viande d'oiseaux morts, certainement porteurs du virus. Un chat en Allemagne semble également avoir succombé au H5N1. Est-il besoin de souligner l'importance de chats errants en Algérie ? Le chat, étant aujourd'hui considéré comme un vecteur de la maladie, apparaît comme une nouvelle source de contamination. Source qui amplifie le risque de pandémie. De nombreuses questions restent encore ouvertes sur la grippe aviaire qui aura cependant touché l'ensemble des continent, hormis l'Océanie et l'Amérique, causant la mort de 101 personnes.