Le coordonné veste, gilet et pantalon, réinterprété par les designers les plus avant-gardistes, est particulièrement tendance en cette fin d'hiver, bien qu'il ait été absent dans les collections classiques de certains grands noms des défilés à Paris. Ainsi va le jeu de la mode qui semble jouer aux extrêmes : l'hyper-classique avec le trois pièces, d'un côté et, de l'autre, la tendance sportswear qui bat son plein. Evidemment, le juste milieu n'a pas tardé à se frayer une petite place. C'est ainsi que le beau complet trois pièces en flanelle gris anthracite se portera accessoirisé d'une montre de gousset ou d'une chaîne à médaille, style académicien. Dans un autre registre, la veste et le gilet du même complet se porteront dépareillés avec un pantalon en jean ! Archétype du chic tiré à quatre épingles, le costume trois pièces devient un pilier de placard. C'est même un grand classique de la mode masculine, à la différence qu'il n'est plus proposé exclusivement pour une clientèle réservée. Désormais, de nouvelles propositions s'adressent aux jeunes qui, tout en ayant la possibilité d'être très élégants, ne ressembleront pas pour autant à leurs ancêtres. C'est dans ce sens que Kris Van Assche s'est attaché, lors de sa dernière collection, à moderniser les beaux classiques auxquels les hommes sont le plus habitués. Parmi eux, le fameux costume coordonné qui ne compte d'ailleurs pas trois pièces, mais quatre ! Comme c'était le cas jadis, lorsque les tailleurs avaient pour habitude de confectionner deux pantalons par complet. Le couturier belge a repris l'idée en proposant pour chaque complet un pantalon droit et un autre baggy, dont la coupe est plus contemporaine. Le succès a été instantané ! Il y a de l'allure Le complet s'affiche, dans certaines grandes capitales du monde, sans cravate et affiché de façon décalée par des jeunes. Ce qui dénote, pour les hommes, d'une envie de chic classique et habillé, qui ne soit ni apprêté ni guindé ! Elégantes sous toutes les coutures, une majorité des collections de cet hiver trouvait son inspiration dans le cinéma, notamment dans les vieux films noirs où les gangsters étaient vêtus de complets. Les musts, les costumes en flanelle cachemire d'Yves Saint Laurent, avec le pantalon plus ample. Ou le rayé tennis en lainage de Versace. Plus sport, l'Américain Michael Kors réinterprète la veste du complet façon saharienne, avec quatre poches plaquées à soufflets. Ou, version ultra-sexy chez les canadiens Dsquared, qui proposaient le pantalon à taille descendue sur les hanches et à ourlet un peu court porté sur des derbies montants ; entre la veste et le gilet, ces deux créateurs glissent un blouson en jean pour dynamiser l'allure du complet. Chez Dolce & Gabbana, un manteau trois quarts a remplacé la veste. Bref, toutes les dérives sont permises, pourvu qu'il y ait de l'allure ! L'apparition du costume trois pièces dans l'histoire de la mode masculine fait suite à une période où tous les excès avaient été permis. Son invention découle même de la promulgation en 1666 d'un décret prônant la sobriété chez les Anglais, à la suite de la grande épidémie et du célèbre incendie qui dévastèrent Londres. Beaucoup croyaient fermement que ces deux catastrophes étaient des punitions pour les excès dans l'habillement à la cour. Tout avait démarré de là. Et pour faire bonne figure face à un peuple à la rue, les hommes de la cour d'Angleterre se mettent à porter une culotte, un gilet et une veste longue, tous trois taillés dans un même tissu. C'est l'ancêtre de l'actuel costume trois pièces, bien que veste et gilet arrivent encore au-dessus du genou. En France, Louis XIV voulant ridiculiser le souverain anglais, il imagine une version française du gilet, raccourci à hauteur des hanches, et en impose le port aux fantassins et aux palefreniers... Mais la mode du trois pièces est déjà lancée dans les courseuropéennes.