Léopold Sédar Senghor s'est expressément invité, jeudi dernier, au Centre culturel français. L'engagement et le parcours sinueux y ont été succinctement revisités. Pour ce faire, Jacques Chevrier, professeur émérite à la Sorbonne et Mme Fadila Chaâbane, enseignante au centre d'enseignement intensif des langues, ont été de la partie. La rencontre fut rehaussée de la présence remarquée des ambassadeurs du Sénégal et de France. L'occasion, elle, s'y prêtait pour fêter deux événements, le centenaire de la naissance de Léopold Sedar Senghor et la francophonie dont il fut l'ingénieux inspirateur avec quelques « bonnes volontés ». Le thème de la négritude, cher à l'homme, et son contenu idéologique seront également approchés. Quelque peu confuse, Mme Chaâbane éclairera, en condensé sur le parcours de l'homme de son natal au sunlight de l'Elysée. Jacques Chevrier retracera, lui, à loisir le parcours du premier président du Sénégal. N'ayant jamais fait l'unanimité de son vivant ni après sa mort, Senghor ne laisse personne indifférent quant à sa trajectoire « ondoyante ». Aussi, explorer « Les terres senghoriennes », titre tout retrouvé de la conférence, n'est guère aisé, avouera le professeur Chevrier. Sa « causerie » s'articulera beaucoup plus autour de la poésie de l'homme que sur son action politique. Le conférencier soutiendra qu'une « dynamique » semble se faufiler dans les 6 recueils composant l'œuvre senghorienne. Le conférencier y trouvera, pour cela, une profusion de verbes de mouvement et la récurrence du thème du voyage. Le second champ lexical est celui de l'espace. « La poésie de Senghor est toujours située géographiquement, territorialisée avec une grande précision qu'il s'agisse d'évoquer l'espace originel, l'Afrique ou bien l'espace second, c'est-à-dire l'Europe. Un va-et-vient se décline sous le mode de l'inquiétude et de l'angoisse », soutient-il. Le troisième trait marquant est celui du « doute » qui mène, de bonne logique, vers le dernier réseau lexical qu'est « la quête toujours recommencée » Plusieurs facettes s'y dégagent, à la lecture de l'académicien, dont celle de l'homo viator et le go-between, notion anglaise pour désigner, soutient M. Chevrier, l'intercesseur et celui qui n'est « ni d'un côté ni de l'autre ». De son côté, Son Excellence, M. Saïdou Nourou Ba, ambassadeur du Sénégal « piqué au vif » dira, à la fin avec prestance la grandeur de cet homme d'Etat. Il rappellera à juste titre les paroles de Senghor. « Il n'y a pas de patrie sans terroir la nation se nourrit du suc et de la sève du terroir, enracinement donc... mais nécessaire dépassement... » Une phrase, lue par M. Saïdou, résume l'homme. « C'est une chance pour moi d'avoir échappé à cette pureté, à cette solitude du sang, puisque je suis né au croisement des sangs sérère, peulh et malinké. »