Le projet de révision du code de la famille, dont le rapport final a été remis au ministre de la Justice, Tayeb Belaïz, commence à susciter l'hostilité des milieux islamo-conservateurs. Après la décision du parti Mouvement pour la paix, de Bouguerra Soltani, de lancer une pétition d'un million et demi de signatures contre ce nouveau texte, d'autres relais sont en effet actionnés pour faire une propagande contre cette mouture. La prière de vendredi dernier a porté, entre autres, dans certaines mosquées de la capitale, sur ce sujet. Les fidèles ont eu droit à un discours de près d'une heure contre ces nouveaux amendements qui « sont contre la charia islamique et la nation », n'a cessé de marteler un imam de l'une des mosquées d'Alger. Lors d'une rencontre organisée lundi dernier à Blida, des militants et militantes du MSP ont exprimé leur opposition à ce texte, arguant que les propositions de la commission de révision du code de la famille sont en contradiction avec la Constitution, particulièrement avec l'article 2 qui stipule que « l'Islam est la religion de l'Etat ». Des intervenants ont rejeté catégoriquement l'idée de supprimer le tutorat et la tutelle matrimoniale pour la jeune fille contractant mariage. Pour le MSP, il n'est pas question que « les femmes algériennes se marient sans l'autorisation d'un tuteur ». L'avocate du parti, militante des droits de l'homme et membre d'une association de femmes, Mme Benbraham, présente à cette rencontre, se refuse à voir que « l'avenir des trente-deux millions d'Algériens sera décidé par une commission de 52 membres », a-t-elle déclaré, et d'ajouter : « Nous refusons que ce texte soit imposé aux Algériens, et nous nous interrogeons pourquoi la commission ne s'est pas occupée des autres articles encore plus graves dans le code de la famille. » L'avocate a annoncé qu'un groupe d'avocats et de magistrats se réuniront pour élaborer une plateforme explicative sur ce rejet et lancer une opération de collecte d'un million et demi de signatures contre ce nouveau texte. Le dossier en question a été, rappelons-le, pris en charge par la commission de révision du code de la famille constituée de 52 membres dont des députés, juristes, universitaires, sociologues et représentants du Haut Conseil islamique, depuis le 26 octobre 2003, et installée par le ministre de la Justice sous la présidence de Mohamed Zeghloul Bourtane, président de la Cour suprême. Sur l'ensemble des articles jugés discriminatoires, quatre ont fait l'objet d'amendement dont le droit au logement, la suppression de la répudiation, du tutorat et de la tutelle matrimoniale. L'article portant sur le divorce par le kholâ, la polygamie (art. 8), l'obéissance de l'épouse à son mari (art. 39), l'héritage (art. 126 à 183) n'ont subi aucun changement, pourtant des centaines de femmes subissent les conséquences graves souvent engendrées par ce texte. Elles sont nombreuses à se battre quotidiennement pour conserver un bien familial (surtout le domicile) car n'ayant pas d'héritier de sexe masculin, contre la volonté de la famille ou de la belle-famille qui veulent tout accaparer. Plusieurs affaires en justice portent principalement sur cette question. Par ailleurs, les associations féminines qui luttent pour l'abrogation du code de la famille accueillent favorablement les propositions d'amendement apportées, mais appréhendent les suites que réservent les députés à ce projet lors de la prochaine session à l'APN.