Bidonvillisation, RPH, rebidonvillisation et ainsi de suite... Ainsi va la «boulitique» des pouvoirs publics. Souk Ahras est la ville où l'on peut tout le temps enfreindre la loi et être sûr que l'on ne sera jamais inquiété pour la simple raison d'avoir à ses côtés tous ceux qui détiennent les outils répressifs, tous impliqués dans des affaires de corruption ou de détournement. La situation perdure depuis des décennies. Le phénomène de la prolifération des bidonvilles, géré à distance par des politiciens en mal d'ancrage populaire et des milieux occultes, prouve, à lui seul, toute la fragilité des structures officielles devant les barons du marché, puisque plus de 300 baraques ont été érigées en quelques mois à la cité Ibn Rochd et aucune instance responsable n'a a vu un inconvénient. Les habitants de cette cité s'inquiètent et dénoncent en déclarant: «Cet espace de plus d'un hectare était une assiette où l'on devait proposer la réalisation d'un parc d'attraction. Des étrangers à la ville y ont construit des logis de fortune et c'est des élus de l'APC de Souk Ahras qui les soutiennent.» Et d'ajouter: «La toute dernière attribution de logements sociaux a encouragé tout le monde à construire de nouvelles baraques. La majorité des attributaires était issue des bidonvilles et le quota réservé à ces derniers n'obéit qu'à une seule condition: présenter un bon de recensement délivré par les services communaux.» De visu; des dizaines d'autres constructions illicites bâties à base de matériaux rudimentaires, de tôles ondulées, de branches d'arbres et de toiles cirées sont en cours de construction sur plus de trois hectares de terres appartenant à la commune qui sont ainsi squattées par les nouveaux venus. Non loin d'une masure en terre qui n'est guère habitable, un homme prend le volant d'une Polo neuve, nous dévisage un à un et démarre vers une destination inconnue. De l'autre côté, des salafistes organisent leur petit bidonville, légèrement retiré des autres agglomérations, et c'est un îlot en béton tout en rideaux qui vous rend plus convaincu que tous ceux qui squattent ces espaces n'agissent pas de leur propre chef. Le circuit est bien structuré. Prostituées, drogue, objets volés, prédicateurs, talebs et guezzanate… tout s'enchevêtre dans une cité où l'illicite paie. Une baraque y est cédée à 180 000DA.