A quelques jours de l'entame de l'an 3 du professionnalisme, des présidents de club pros des Ligue 1 et 2 menacent de recourir au boycott du championnat «si les pouvoirs publics n'accompagnent pas les clubs dans le dur apprentissage du professionnalisme», indique une source proche du forum des présidents de club professionnel. Cette menace sera-t-elle mise à exécution ? Rien n'est moins sûr dans un contexte marqué par une grave crise financière qui secoue le football, pas uniquement en Algérie. La particularité du football professionnel en Algérie par rapport à celui des pays européens, c'est que le notre mène un train de vie largement au-dessus de ses moyens. Il défie même toutes les normes économiques et financières qui président à la bonne gouvernance. Les présidents de club ne tiennent nullement compte du difficile contexte dans lequel évolue le football algérien depuis l'instauration du professionnalisme (saison 2010-2011). Le cadre économique dans lequel ils tentent de survivre ne leur laisse aucune chance d'éviter le dépôt de bilan et la faillite. Economiquement, le professionnalisme n'est pas viable. Le football algérien, niveau club, est loin d'être un produit qui peut bien se vendre. A partir de là, il reste une seule alternative aux responsables de club : prier pour que les subventions publiques ne s'arrêtent pas. Cela s'appelle le professionnalisme marron, ou d'Etat. Les responsables des clubs pros restent sclérosés à l' ancien schéma. Les pouvoirs publics débitent des subventions qu'ils se chargent ensuite de leur choisir la destination.Cette situation n'est pas près de changer. Les mentalités sont phagocytées. Les dirigeants ont gardé les mêmes réflexes qui guidaient leur politique avant l'instauration du professionnalisme. «On me donne l'argent, je le gère». Et là, les (différents) ordonnateurs qui interviennent dans le circuit du ballon rond portent une responsabilité dans ce qui arrive. Ils n'usent pas le pouvoir que leur confère la loi, à savoir contrôler l'utilisation de l'argent faite par les clubs. Que dire du sponsoring sportif si ce n'est qu'il maintient en vie des clubs qui ne savent faire qu'une seule chose : produire du déficit. Ne parlons pas de quelques obscurs circuits qu'emprunte l'argent récolté auprès de «généreuses» entreprises publiques et privées. L'annonce de l'arrivée de Sonatrach et de trois de ses filiales pour «accompagner des clubs» a affolé le reste du contingent des clubs pros. Ils demandent leur «part du gâteau». Le ministère de l'Energie, puisque c'est de lui que dépendent les entreprises citées pour «venir en aide» à un quatuor de clubs, ne peut encore garder le silence sur ce sujet. Les pouvoirs publics qui portent à bout de bras les clubs pros doivent impérativement leur fixer le cadre en-dehors duquel nul ne peut se mouvoir. Les présidents ont besoin d'un sévère rappel à l'ordre en matière de gestion des deniers publics qui permettent aux clubs pros de respirer. Le forum des présidents de club pro doit assumer ses responsabilités en invitant ses membres à changer complètement de stratégie en matière de gestion. Il est inconcevable pour un club en difficulté financière de verser aux joueurs des salaires qui dépassent l'entendement. Cette dangereuse politique salariale qui plombe les comptes des clubs. Ce chapitre (salaires et primes) représente plus de 90% du budget des clubs. En Europe, par exemple, où le football professionnel se débat dans une grave crise, les dirigeants ne se permettent pas des folies en matière de transferts. Le marché des transferts de l'été 2012 a été plat. Les grosses écuries européennes ont plus vendu que transféré.Les présidents de club européens ont instauré une règle pour éponger le déficit. Dégraisser l'effectif et réduire, jusqu'à 40%, le salaire des joueurs. En Algérie, les clubs n'ont pas enregistré d'entrée d'argent au chapitre transferts de joueurs. Ils ont beaucoup déboursé et aggravé par la même leur déficit abyssal. C'est en quelque sorte le professionnalisme à l'algérienne. Une entreprise spécialisée dans la production et multiplication des déficits.