Le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, Yazid Zerhouni, a tranché hier l'éventualité de voir les anciens responsables du FIS postuler pour des mandats électifs ou exercer une activité politique. « C'est clair, la charte exclut ces gens-là, du moins tant que je suis encore ministre de l'Intérieur. » C'est en ces termes que M. Zerhouni s'est exprimé hier à l'occasion de son passage à l'émission « Questions de l'heure » de la Chaîne III de la Radio nationale, au moment où l'opinion s'interroge sur l'éventuel retour des anciens dirigeants du parti dissous, mais aussi des chefs des groupes armés sur la scène politique. Pour le ministre, la charte exclut clairement « ces gens-là » qui ont instrumentalisé la religion à des fins politiques et qu'ils « ne pourront plus exercer la politique ». Zerhouni est d'autant plus ferme à ce propos qu'il n'est pas question d'après lui « d'appliquer les dispositions favorables de la charte au détriment d'autres ». Le ministre promet que « le droit sera appliqué » contre ceux qui enfreindraient cette « ligne rouge ». Dans le même ordre d'idées, le ministre appuie certes la réinsertion sociale des détenus d'opinion et des ex-chefs terroristes, mais y met un bémol. « Il ne s'agit pas de privilégier ces gens-là pour des postes de travail, mais simplement de les mettre sur un pied d'égalité avec les autres Algériens. » Il précise cependant que certains amnistiés, qui occupaient des postes sensibles, pourraient ne pas être réintégrés dans leur emploi d'origine. Pour ce faire, l'Etat étudiera au cas par cas, et proposera le cas échéant des indemnités à la place d'une réintégration au poste d'origine. En revanche, il encourage toutes sortes d'initiatives visant à prêcher la bonne parole, y compris dans les lieux de culte, même si elle émanerait des repentis. « Quiconque voudrait apporter la bonne parole est le bienvenu même dans la mosquée », a en effet déclaré Zerhouni. Interrogé sur le rejet par les familles des victimes du terrorisme des dispositions de la charte, le ministre de l'Intérieur, tout en affirmant « respecter » leurs opinions, assène qu'elles sont « minoritaires », et que le document de la charte est très « équilibré ». Quelles sont les garanties que les « libérés » ne seraient pas tentés de reprendre du poile de la bête ? Zerhouni qui n'ignore pas le risque invite « la société à être vigilante pour les surveiller, car l'action de l'Etat ne suffit pas ». Transition faite, il estime qu'il y aurait entre 700 et 800 terroristes encore au maquis, activant notamment en Kabylie et à Boumerdès, et qu'un groupuscule du GIA composé d'une dizaine d'éléments active dans la wilaya de Chlef. C'est pourquoi, le ministre promet malgré les textes de la charte que « l'Etat ne démissionnera pas de la lutte contre le terrorisme qui pourrait durer des années... ». Yazid Zerhouni révèle en outre que les maquis ne se sont pas forcément vidés depuis l'adoption de la charte, puisque d'après lui « entre 50 et 100 terroristes, dont certains avec leurs familles, se sont repentis depuis le 29 septembre ». El Para et Boumaârafi seront-ils être libérés ? Le ministre de l'Intérieur reconnaît que « leur cas est délicat et pas facile », mais il compte sur les juges, dont il est convaincu qu'ils assumeront leur travail avec « responsabilité ». S'agissant des personnes impliquées dans des actes de terrorisme à l'étranger, Zerhouni exclut leur extradition en faisant valoir le fait que cette démarche ne doit pas être « sélective ». Pour lui, les dossiers de ces personnes relèvent de « la souveraineté nationale » et que, à ce titre, ces accusés seront jugés en Algérie. En se demandant ce qu'il y a dans les dossiers d'accusation établis par certains pays (France, Allemagne et Grande-Bretagne) sur des activistes algériens, le ministre déclare néanmoins qu'ils peuvent être « discutés au cas par cas ». Au chapitre législatif, il estime que les nouvelles moutures des codes de la commune et de la wilaya, dont on en parle depuis 2003, pourraient être adoptés, au mieux, à la fin de cette année. Bien que le dossier soit ficelé au niveau de son cabinet, Zerhouni dit : « Cela ne dépend pas de moi, mais du calendrier du gouvernement. »