C'est connu, l'excès de législation et de réglementation handicape les entrepreneurs et décourage l'initiative. Le laxisme et la permissivité ne créent pas l'émulation et éloignent les investisseurs parce qu'il y a absence de règles et de contrôle. C'est le règne de la débrouillardise et le développement des réseaux parallèles. Entre ces deux extrêmes, il y a certainement une voie médiane qui concilierait les affaires et l'effort. A n'en point douter, la rigueur et le légalisme en sont les pivots. Le problème est comment réunir ces deux éléments qui ne sont pas antinomiques pour réhabiliter la valeur travail dans un pays qui s'est alimenté sur une bonne période de son existence de slogans creux sans lendemain. Après bien des péripéties ponctuées de temps douloureux, il faut convenir qu'aujourd'hui tous les ingrédients pour réussir cette transition sont là. Les pouvoirs publics se sont appliqués depuis moins d'une décennie à rassembler les morceaux du puzzle avec beaucoup de succès. Le gros du travail étant maintenant fait, il devient urgent de passer à la vitesse supérieure, c'est-à-dire favoriser réellement l'éclosion d'un environnement ou la rigueur légaliste doit constituer la norme pour tous sans favoritisme aucun. Cette rigueur qui s'accompagne quelquefois de transparence commence à se diffuser dans les administrations économiques mais elle reste insuffisante parce qu'elle ne se prolonge pas jusqu'à la fin de l'opération. C'est comme si quelque part on a tracé une ligne pour marquer la limite du parcours. Les vieilles habitudes n'ont pas encore disparu malgré les profondes mutations qui affectent le pays. Si on prend par exemple la procédure de passation des marchés publics, force est de reconnaître qu'un effort méritoire a été fourni par les pouvoirs publics pour rendre transparent tout le processus qui va de l'appel d'offres à l'attribution du marché en passant par toutes les phases (ouverture des plis, sélection, négociation, choix...). Le nouveau code des marchés publics a instauré cette rigueur légaliste en imposant le respect des règles qui sont inscrites. Cette rigueur s'arrête là. L'état des routes ou du bâti renseigne sur la suite. C'est précisément là où l'effort doit s'investir pour introduire cette rigueur qui doit conduire ceux qui sont en charge de la réalisation de ne pas se contenter de boucler un programme juste pour consommer l'enveloppe sans se soucier réellement de la qualité des ouvrages ou du produit. Une route est faite pour durer au minimum cinq à dix ans avant renouvellement, ce qui n'est pas souvent le cas dans nos contrées. C'est cette continuité dans l'action qui fait défaut pas toujours il est vrai mais elle est criante dans certains secteurs. Les explications ne manquent pas mais le constat est là. La transition vers l'économie de marché s'est installée dans la durée et elle n'en finit pas de durer parce qu'on continue à se comporter en rentier. Une économie de marché n'est pas simplement une libéralisation et une ouverture du marché, c'est aussi un comportement, des méthodes de gestion compatibles avec l'esprit d'ouverture, un partage des responsabilités entre les différents acteurs et surtout la discipline, la rigueur et la légalité. Les hommes d'affaires sérieux citent à ce propos l'exemple du Chili ou une offre qui a demandé six mois de travail pour l'entreprise soumissionnaire n'a jamais été ouverte, simplement parce que la caution n'avait pas été versée selon les règles prévues. Bel exemple de rigueur et de légalité. Si les règles du jeu sont respectées avec rigueur et légalisme, il est certain que la corruption ne trouverait pas à prospérer. Les investisseurs ne sont jamais dérangés par les difficultés ou les barrières à l'entrée, ils sont beaucoup plus réticents lorsque les conditions de travail sont difficiles. Là où il est facile de travailler dans le sens où règne une discipline, une rigueur, un respect de la réglementation et pour peu que le marché le permette, les opérateurs viendront et travailleront. Les pays qui ont compris cela connaissent un afflux d'investisseurs et parmi eux nombreux sont ceux qui ont rendu l'accès à leur marché difficile. C'est dire que la variable réglementation à elle seule ne suffit pas et qu'il doit nécessairement exister à l'intérieur des déterminants économiques capables de faire la différence en constituant un réel facteur d'attractivité aussi bien pour les nationaux que pour les étrangers.