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Une ville en quête de son charme
EL OUED lutte pour sortir de son sable
Publié dans El Watan le 20 - 03 - 2006

Nous avons visité la ville d'El Oued, il y a une dizaine d'années. Hormis la « ceinture verte » la ceignant de pousses d'eucalyptus plantés à ses différentes sorties, et les arcades embellissant ses larges rues et artères, la ville n'a pas changé d'un iota.
L'état des lieux est même pire qu'avant, du moment que, redoublant de férocité, la remontée des eaux menace plusieurs quartiers et cause même des dégâts énormes. Vrai, le projet d'assainissement, dont on ne faisait que parler à cette époque-là, est enfin en cours de réalisation, et ce, depuis le mois de janvier dernier. Les Soufis doivent attendre au moins trois ans pour voir leur ville débarrassée de ce fléau nauséabond et destructeur de toute vie. Du sable, évidemment. Que du sable dans la ville. A peine s'il y a une chaussée filiforme visible, tant le sable vorace bouffe tout. Les Soufis doivent évidemment déblayer devant leurs portes, mais rares sont ceux qui le font. Et, bizarre, en ville, les véhicules circulent à vive allure, soulevant des nuages de poussière ininterrompus. On nage, on vit en pleine poussière, d'autant plus que le sable de la ville est pollué par rapport à celui des dunes, en dehors de la ville, propre, virginal. Il en est des bancs de sable dans la ville d'El Oued comme des flaques d'eau dans les villes du Nord. Et les piétons ont toujours tort d'être au mauvais endroit. Lors d'un séminaire organisé en 2002 sur les maladies des yeux, l'on a appris qu'en dehors du phénomène naturel du vent de sable, qu'on peut à tout le moins éviter la pollution du sable (comme nous le verrons plus tard), constitue l'un des principaux facteurs causant ce genre de maladies, et l'on avance le chiffre effarant de 120 000 cas de trachome et celui de 30 000 cas de glaucome enregistrés, soit le quart de la population de la wilaya d'El Oued, qui compte 600 000 habitants. Hormis quelques grandes artères bitumées, toutes les rues ou ruelles, surtout celles de l'ancienne ville, n'ont ni trottoir, ni goudron. Il n'y a que du sable, datant sûrement de la nuit des temps. La rue devant désengorger ou séparer deux quartiers anciens et populaires, Lamsaâba et Laâchache, d'une population de 25 000 habitants, soi-disant goudronnée, est crevassée en plusieurs endroits, sans trottoir, ni bas-côtés. Nous pouvons voir des bâtisses en ruine ; d'autres menacent de s'effondrer. Il faut dire que le vieux bâti de la ville d'El Oued, dont les maisons sont joliment faites avec des matériaux locaux, principalement du gypse, se dégrade chaque jour davantage, et qu'au rythme où va la remontée des eaux, et s'il n'y a pas une intervention des responsables afin d'y mettre le holà, il ne résistera pas longtemps à l'effondrement. Il en est tout autant pour d'autres quartiers. Sûrement, quand surviendra un malheur, on bougera. A propos du vieux bâti qui tombe en ruine, le vice-président de l'APC d'El Oued, Ali Zkaïra, dira qu'on a demandé il y a longtemps le classement du vieux El Oued au patrimoine mondial, notamment la cité Laâchache et celle Lamsaâba, en vain. Pas de réponse. C'est dans ces quartiers que la remontée des eaux fait des siennes. Le nombre d'habitants sinistrés du fait de la remontée des eaux dans la seule ville d'El Oued est de plus de 160, selon le vice-président. Le dossier de ces habitats est pris en charge par la Dlep, ajoutera-t-il. Certains habitants bénéficieront de 50 habitats ruraux. Cent autres habitats ruraux font actuellement l'objet de négociations pour ces habitants, négociations car la ville d'El Oued n'ouvre pas droit à ce type d'habitat. Parlant de Sidi Mestour, le président de l'association de cette cité, qui compte 5000 habitants, avance le chiffre de 400 familles sinistrées. En 2004, certains de ces habitants avaient observé un sit-in à l'intérieur de l'enceinte de l'APC d'El Oued, quelques-uns avaient été arrêtés par les forces de l'ordre. Ils écoperont de quelques mois avec sursis. Ils ont adressé quatre correspondances au wali, lui exposant leurs problèmes. La dernière en date remonte au mois d'octobre 2005, dans laquelle ils relevaient le fait de désengorger le réseau d'assainissement qui était bouché, pour qu'il n'y ait pas de remontée des eaux et surtout à l'approche de la saison des pluies. Elle fait état aussi des promesses de l'ex-wali relatives à l'octroi de 50 logements ruraux et 500 millions de dinars pour la réhabilitation du quartier Sidi Mestour situé à l'est de la ville, non loin du siège de la wilaya. Actuellement, Sidi Mestour est humide, beaucoup de citoyens l'ont déserté avec leurs petits moyens, mais beaucoup d'autres continuent d'y vivre le calvaire. Puisque l'on parle d'habitat, il y a lieu de savoir que 5000 dossiers de demandeurs de logement social ont été transférés à la daïra pour étude, car 200 logements achevés sont prêts à la distribution. L'on apprend aussi que d'ici 2009, 500 autres seront construits. Selon le vice-président, si le logement participatif patine, voyant difficilement le jour, le logement évolutif, lui, a bien réussi à El Oued, cependant si les habitants y sont intéressés, la dernière opération remonte à 1999. Outre l'effet de la remontée des eaux, des amoncellements d'ordures ménagères jonchent les terrains vagues, qui ne sont autres que les anciens ghots remblayés. Ce sont des cratères de sable, dont les versants constituent des réceptacles pour les ordures. Et la grande trouvaille, pour faire disparaître celles-ci, on les remblaie de sable ! Mais jusqu'à quand ? Au quartier Lamsaâba ouest, quatre ans auparavant, il y avait un joli ghot, îlot de verdure, mais le phénomène de la remontée des eaux a fait partir en fumée des dizaines de palmiers. Il est devenu maintenant un terrain de football, étrangement profond.
Ordures, AEP, routes...
A propos de ghots devenus décharges publiques, le vice-président de l'APC dira que ces ghots appartiennent à des privés, à qui on a demandé s'ils les délaissaient au profit de l'APC afin de les remblayer complètement et d'utiliser le terrain pour l'intérêt public, mais ils n'ont pas accepté. Question de décharges sauvages, il insistera sur le manque de civisme de certains citoyens. Les services de la commune se sont dotés de moyens matériels, selon lui, assez importants pour mener à bien le nettoiement quotidien de la ville, en vain. Ainsi, la commune a acheté 7 camions de nettoiement sur son propre budget et 3 camions sur le budget de l'Etat. Malgré ces véhicules et 7 tracteurs ainsi que le travail de 7 entreprises et des charrettes menées par des ânes pouvant accéder aux venelles, rien n'y fait. Le budget du nettoyage coûte 10 millions de dinars par an. Malgré tout cela, la ville est toujours sale. Il faut dire que la ville d'El Oued figure parmi les 40 communes (précision, communes) les plus peuplées d'Algérie, avec 130 000 habitants. Le vice-président de l'APC dira aussi qu'on avait déjà déposé des bacs dans quelques quartiers, mais certains citoyens n'y jettent pas leurs ordures. Et d'ajouter : « N'empêche, on va encore déposer 6 bacs, mais il faut que les citoyens jouent le jeu ; un service spécialisé dans le nettoyage a été créé dernièrement qui s'occupera de ce volet. » L'une des plaies sérieuses d'El Oued provient du fait que la ville n'a pas ou presque pas de réseau d'assainissement. Selon le vice-président, le taux de raccordement au réseau existant est de 30%. Dans certains endroits, les eaux usées sont déversées dans la ville, sinon dans des puits perdus. On compte dans la région du Souf, dans 18 communes, mais bien sûr le plus gros dans la ville d'El Oued, 60 000 puits perdus. Ce qui parfois crée des cross connexion et des cas de typhoïde, comme à Reguiba l'année dernière. Les eaux usées s'ajoutent à celles qui remontent, et elles rendent la nappe phréatique extrêmement polluée. Aussi, il n'est pas étonnant de voir des citernes sillonner quotidiennement les rues pour la vente d'eau potable, il s'agit de l'eau dite de Âter, provenant de Tébessa. Les 20 litres coûtent 30 DA. Deux unités de traitement d'eau privées font vendre de l'eau filtrée. Mais, attention, beaucoup ne peuvent pas se permettre cette eau. Le Soufi paie donc deux factures, celle provenant de l'Epdémia, et l'autre de l'eau de Tébessa ou celle filtrée. Par ailleurs, concernant l'état du réseau routier de la ville d'El Oued, le vice-président dira qu'une fiche technique a été établie par les services de la commune relative à la réhabilitation des routes existantes et au revêtement des rues. L'étude du réseau routier a été effectuée en 2003. Mais le retard du lancement de ces opérations est expliqué par le fait que leur inscription est assujettie à la mise en place du réseau d'assainissement ou en dépend. (Lire l'article sur le projet d'assainissement de la vallée du Souf). Cependant, les cités Er Rimmel, 5 Juillet, 160 Logements, 400 Logements et celle de 300 Logements, ont été pourvues du réseau d'assainissement, de celui du gaz naturel et ainsi que de l'AEP, les travaux de revêtement des routes sont en cours. D'autres cités, Oum Selma, Ouled Ahmed et El Gara, sont elles aussi concernées par le revêtement puisque déjà équipées par les trois différents réseaux, on en est aux préliminaires administratifs avant le lancement des travaux. Pour s'attaquer à l'aménagement de la ville, routes, trottoirs, éclairage public, espaces verts et aires de jeux, l'argent est disponible, selon le vice-président, qui cite les propos du wali. En effet, la commune d'El Oued bénéficie d'un bon pactole devant provenir de trois programmes, celui complémentaire du président de la République de 6 milliards de dinars (à départager entre toutes les communes d'El Oued), du programme du fonds Sud, et enfin du plan de relance économique. La ville des Mille coupoles est donc à la recherche de son pittoresque, perdu du fait de la bêtise humaine...
Abdelwahab. Boumaza, Youcef Rezzag Salem


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