Outre les incendies, la filière qui génère d'importantes recettes pour la région, va pâtir d'un manque de plus en plus prégnant d'ouvriers agricoles qualifiés. Selon les prévisions des services agricoles de la wilaya, Biskra devrait enregistrer, cette année, une production globale de 3 millions de quintaux de dattes dont 60 % est de la variété Deglet Nour, la plus recherchée sur le marché. Traduisant l'attention particulière dont jouissent les producteurs de dattes depuis une dizaine d'années de la part des pouvoirs publiques appréhendant la nécessité de développer ce créneau essentiel de l'agriculture saharienne, Biskra demeure la région de l'Algérie où la phoeniciculture évolue à un rythme régulier. Avec ses 4,1 millions de palmiers-dattiers recensés, dont 2,5 millions sont productifs, elle permet à des milliers de familles de vivre de la production, du conditionnement et du commerce des dattes, fruit du terroir, emblématique des Ziban, sur lequel repose, depuis des temps immémoriaux, un pan entier de l'économie de la région, voire du pays. Cependant, deux phénomènes inquiètent les producteurs de dattes de Biskra, lesquels interrogés, font grise mine cette année. C'est que beaucoup d'entre eux ont dû procéder à l'allégement des régimes de Deglet Nour pour atténuer les effets de la chaleur excessive ayant régné sur la région durant l'été. La diminution du nombre de rameaux et ainsi du poids des régimes, effectuée pour préserver la qualité des fruits, constitue une perte sèche pour eux. Ils ne sont pas aussi optimistes que les responsables du secteur. Ils craignent une baisse drastique de la production de dattes et particulièrement de Deglet Nour. Réputée pour être la plus belle et la plus tendre des dattes mais aussi la plus sensible et la plus vulnérable à toutes sortes d'aléas, cette variété de dattes va aussi pâtir d'un manque de plus en plus prégnant d'ouvriers agricoles qualifiés, capables de grimper aux sommets des palmiers pour décrocher les régimes de dattes arrivés à maturité. Il faut savoir que le métier de grimpeurs de palmiers est difficile. Requérant des aptitudes physiques particulières et une connaissance parfaite du palmier-dattier, dont les épines, redoutable moyen de défense, peuvent causer de graves blessures en plus du fait que le cueilleur de dattes travaille à des hauteurs variant de 6 à 15 mètres, il n'attire plus les jeunes. Dans les Ziban, on dénombre des dizaines de grimpeurs de palmiers, estropiés, éborgnés ou carrément morts pendant la récolte des dattes. Un grimpeur de palmier gagne actuellement 1500 DA pour 4 heures de travail. Un ouvrier agricole s'occupant du tri des dattes ne perçoit que 800 DA pour la même durée de travail. En dépit de cette bonne rémunération, le métier de grimpeur de palmier est en voie de disparition, assurent des producteurs de dattes craignant de voir les fruits pourrir sur pied avant de pouvoir les récolter. Négligence des exploitants Le second phénomène qui oblitère sérieusement les prévisions d'une augmentation de la récolte de Deglet Nour, ce sont les incendies qui ravagent les palmeraies des Ziban. Rien que pour les mois de juin, juillet et août, les producteurs de dattes de la wilaya de Biskra ont perdu plus de 3000 palmiers-dattiers calcinés lors d'incendies. Parmi eux, 1422 étaient productifs tandis que plus de la moitié de ces palmiers ravagés par le feu étaient de la variété Deglet Nour. Par bonheur, 10 851 palmiers-dattiers ont été sauvés de la carbonisation. Ces chiffres émanant de la cellule de communication de la Protection civile de Biskra, bien que ne prenant pas en compte les départs de feu non déclarés, donnent une idée des ravages causés à ces cultures du terroir par le feu. Les causes sont la négligence des exploitants agricoles et la hausse des températures durant ces 3 mois où les agents de la Protection civile sont intervenus 152 fois pour éteindre des feux allumés dans les palmeraies des Ziban. A ce sujet, le commandant O. Slatnia, responsable de la cellule de communication de la direction de la Protection civile de Biskra, est catégorique, disant «80% des incendies survenus dans les palmeraies pourraient être évités ou plus rapidement maîtrisés si les exploitants agricoles appliquaient les mesures prophylactiques de base consistant à nettoyer les palmeraies des palmes sèches et des mauvaises herbes, à installer des systèmes d'irrigation étanche et des bassins pour faciliter l'intervention des secouristes et à aménager des pistes d'accès pour les engins de la Protection civile. »